Album

Perso, une référence pour les références

Perso nous avait laissé en 2020 avec l’EP Chambre Noire. Une pandémie plus tard, il continue son code couleur  monochrome en développant ses clichés dans Éminence Grise, toujours à l’abri des regards indiscrets, dans son refuge du Midi, entre Avignon et Marseille plus exactement. Une façon de faire dans l’ombre, avec le duo de producteurs Just Music Beats, qui suit le chemin tracé par ses pairs transatlantiques, The Alchemist en tête. La science de la boucle est maîtrisée, les batteries dépouillées, terriblement efficaces sur « Bang », produit par Perso lui-même, et magnifiquement effacées sur « Paradis », deux morceaux aux titres antinomiques dont l’un se perçoit comme la conséquence de l’autre : fuir la furie. Une paire de mots qui aurait pu rentrer dans « FF », introduit par un témoignage du Rat Luciano et en featuring avec Sat, ode à la Fonk Fam mais aussi un exercice de style brillant, mettant la sixième lettre au centre des assonances.

Éminence Grise est court mais les références sont nombreuses. Dans une écriture voisine de celle de Sameer Ahmad, Perso n’est pas avare en traits d’esprits, souvent prétextes à un égotrip ravageur. Ou vice-versa. Sur « Ravage et prodige »,  justement : « Rappeur de niche peut-être mais loin des chiens de la casse ». Sur «Unplugged» : « L’ancienne école c’est la classe, la nouvelle c’est en distanciel ». Ou encore sur « Porte Flingue » : « Tendre la main, ça peut coûter un bras / Ils entendent mais ils écoutent rien / Les principes n’ont pas de prix, ça ne veut pas dire qu’ils ne coûtent rien ». Parallèlement, ce sont aussi des extraits du Parrain, de L’Impasse ou de Boyz N The Hood en V.F, une déclaration de feu Prodigy en V.O, le fait qu’« Unplugged » reprenne l’instrumental de « Waterboarding » de Mobb Deep qui font de cet album une flatterie pour les auditeurs avertis ayant grandi dans les « 90’s », avant-dernier titre de cet Éminence Grise à la replay value indispensable pour en saisir toutes les subtilités.