Sidekicks

Il fait désormais pleinement l’unanimité, jusqu’à faire (quasiment) oublier les railleries qu’il avait suscité à l’époque de sa sortie. Aujourd’hui, Première Consultation est un grand classique, reconnu et célébré. La célébration des classiques organisée à La Bellevilloise vendredi 25 septembre fera la part belle au ‘sieur Bruno. L’ex-gynécologue du dix-huitième assurera un showcase centré sur les jours heureux de cette Première Consultation. Un grand moment nostalgique en perspective et une (re)plongée dans un album qui comportait déjà tous les traits du personnage : « l’arrogance flegmatique, le ricanement désenchanté et la mise à distance du rap. » Dabeull, Arthur King et Uncle T viendront compléter le tableau avec un gros DJ Set. Une fois n’est pas coutume, on offre des places pour cette soirée sur notre page Facebook. Les photos de Vanessa, Bérégovoy et Roger Milla sont de rigueur.

Il n’est peut-être pas nécessaire de s’attarder sur Man plans, God laughs, dernier album studio de Public Enemy : à la première écoute (distraite), il semble se ranger parmi les moins bons opus du groupe. Mieux vaut s’écouter Chuck D, Bring the Voice, la mixtape de Bachir et Slurg… Ceci dit, on peut quand même signaler la sortie, en tout un tas de versions plus ou moins fournies, de leur Live From Metropolis Studio. C’est le résultat d’un concert — enregistré et filmé donc — donné en août 2014 (vingt-sept ans après le London Invasion Tour de 1987 qui les fit connaître), dans une petite salle londonienne, mythique par sa petite taille (125 places). Le Guardian avait donné un compte rendu assez moqueur, mais en fin de compte plutôt élogieux de cette drôle d’expérience, désormais accessible au grand nombre.

Sortira ? Sortira pas ? Après plusieurs semaines de doute et de promotion surprenante, le deuxième album de Jay Rock, 90059, verra bien le jour cette année. Mieux : déjà disponible en digital depuis ce vendredi 11 septembre, il sortira en version physique le 18 septembre. Les premières écoutes de cet album concis – onze titres – sont plutôt réjouissantes. Parmi les bonnes surprises, un nouveau titre entêtant avec le Black Hippy au complet, « Vice City », où Kendrick Lamar, Ab-Soul et ScHoolboy Q viennent prêter main forte à Jay Rock, renforçant son image de pilier au sein du label TDE. Et l’un des autres morceaux de ce nouvel album, « Fly On the Wall », est produit par un Français, AAyhasis. Autant de raisons de jeter une oreille à cette nouvelle sortie d’un des labels les plus attrayants du rap américain.

Il faut le voir, dans la vidéo ci-dessus, s’exclamer « I tell you, it’s hip-hop! » pour comprendre. Il n’y a certes qu’un rappeur invité (Supernatural, sur le morceau-titre) sur Days of Freeman, nouvel album en date du saxophoniste James Brandon Lewis. Mais c’est tout l’album qui, avec les moyens du jazz (un trio saxophone – basse – batterie des plus classiques), est traversé par une vibe hip-hop, comme l’explicite le descriptif de chaque morceau contenu dans la pochette. Un morceau dérive des Digable Planets, le suivant d’une phrase de Q-Tip sur Midnight Marauders, et Pete Rock & CL Smooth ou les Leaders of the New School côtoient Don Cherry. « Unarmed with a mic », James B. Lewis est en revanche parfaitement équipé pour tout le reste, lui qui a composé et arrangé la quasi-totalité d’un disque chaudement recommandé.

Il faut croire que les deux larrons de Hits Alive ont pris leur nom au pied de la lettre. Mayer et Martinezz, fans de films d’horreur et producteurs horriblement doués, viennent de sortir « JCVD » avec Dixon. Depuis son départ précipité de la structure Golden Eye Music, le rappeur séquano-dyonisien semblait faire le mort, ou plutôt le croque-mort, comme l’indiquait son titre « Undertaker ». Sur sa première collaboration avec Hits Alive, Dixon, revanchard, a l’air de revenir d’outre-tombe, revitalisé par l’instrumental tout droit sorti du labo de Victor Frankenstein venant d’être frappé par la foudre. Appuyé par un clip façon grand détournement, mais sauce Jean-Claude Van Damme, le morceau annonce le projet OST : Original Sound Tracks des deux producteurs, et peut-être, sait-on jamais, une collaboration sur le plus long terme avec Dixon.

Chicago n’a pas fini de nous étonner. Entre la vague Drill qui dure malgré ses détracteurs et les succès du crew Save Money, Chance et Vic en tête, on a vraiment de quoi se mettre sous l’oreille. Et voici un nouveau challenger. Clark AirLines est présent depuis quelques années sur la scène locale mais augmente la cadence en 2015 pour conquérir le monde. Sa force : un flow tout terrain et des vidéos léchées très ré-créatives qu’il réalise lui même. Cette science du fun tout-en-un apporte une fraîcheur devenue rare chez les jeunes artistes indépendants. A l’écoute de TrillAir EP, on se dit que le timbre chevrotant de Clark AirLines risque de nous titiller encore un moment. Comme un petit vieux qui nous racontent des histoires grivoises assis sur son banc. On a toujours envie de connaitre la suite.

Après avoir offert un morceau inédit à Stephen Colbert pour la dernière du Colbert Report, Kendrick Lamar était le premier invité musical de la nouvelle émission de l’animateur. Pour conclure The Late Show, le rappeur de Compton a interprété un incroyable medley de To Pimp A Butterfly et en a profité pour donner tort à ceux qui pensent que le rap est forcément ennuyeux quand il est pratiqué avec des musiciens. Une prestation intense qui donne une autre vie à « Wesley’s Theory », « Momma », « King Kunta » et « u ». De quoi patienter avant l’album de Jay Rock.

Crown, I.N.C.H., Gabz du collectif Le Gouffre, Shaolin, DJ Simsima, DJ Low Cut… Ces dernières années, le rappeur new-yorkais The AbSoulJah a multiplié les collaborations avec des beatmakers hexagonaux, en particulier sur les très bons Dim the Light (2014) et When the Moon Shines (2015), ses deux derniers albums. Aujourd’hui, c’est avec le producteur parisien Ugly Tony qu’il s’allie, non pas pour quelques morceaux mais pour un projet commun baptisé The Author Illustrates, dont la sortie est prévue vendredi 11 septembre. Au menu : 14 titres, sans featuring (en dehors de DJ Low Cut), d’un boom-bap particulièrement consistant si l’on en croit le trailer mixé par DJ Duke, et une superbe pochette signée Ghettoblaster (Just Do Hit).

Leur collaboration ne date pas d’hier. « J’ai découvert The AbSoulJah en 2007 sur le premier album d’Al’Tarba, se souvient Ugly Tony. Voix, flow, ambiance… J’avais trouvé son style inimitable. Je bossais alors sur mon premier projet, At Nightfall, et j’ai décidé de le contacter via Myspace pour lui proposer un son ». Il en résultera le titre « In Between the Lines »… puis un certain nombre d’autres, parus ou inédits, réunis en mars dernier sur le EP gratuit Sketched in Outlines.

La « bonne connexion musicale » entre le beatmaker parisien et le MC du Queens les a alors décidés à se lancer dans la conception d’un projet commun. Si le travail s’est d’abord fait à distance, les allers-retours réguliers d’AbSoulJah entre New York et Paris ont permis d’entretenir et de développer en studio la bonne dynamique créée via internet. Et de bâtir The Author Illustrates petit à petit, sur la durée. Ugly Tony : « Au final, on est devenus potes. Depuis 2009, que ce soit pour des concerts, des clips ou enregistrer des sons, il revient tous les ans en France et dort parfois à la maison. On en a donc profité pour chaque fois affiner le projet, entre deux bouteilles de vin rouge ! ».

Après avoir travaillé avec une trentaine de MC’s internationaux sur At Nightfall (2011), puis avec Phil The Agony le temps d’un EP (Antagonysm, 2014), Ugly Tony, membre du collectif Sick Digger, poursuit donc son ouverture par-delà les frontières hexagonales. Et compte bien continuer dans cette voie : le beatmaker parisien planche actuellement sur son nouvel album, qui s’intitulera Time Flies et sur lequel devraient être présents, entre autres, Edo. G, Ruste Juxx et Vakill.

C’est officiel : Oxmo Puccino est de retour avec un huitième album. Le huitième projet d’une carrière atypique dans le paysage hexagonal qui l’a vu aussi bien croiser le micro avec Dany Dan qu’avec Olivia Ruiz, poser sur des instrumentaux de DJ Mars et d’Ibrahim Maalouf. Sur Twitter, Oxmo a donné quelques indications au sujet de La Voix Lactée : « il sera plus marqué hip-hop » que ses derniers projets et il n’y aura aucun invité (on n’aura donc pas de suite à « J’rappe pour rien » en 2016). Histoire de faire patienter son public, Oxmo vient de mettre en ligne le clip de « Une Chance » dans lequel on le voit notamment mis en images sous un graphisme qui rappellera les plus grandes heures d’Actua Soccer à certains nostalgiques. En attendant le 13 novembre prochain.

Que faire quand on a produit « Niggaz in Paris », l’hymne d’une génération ? Cachetonner auprès de toutes les stars de l’industrie ? Fricoter avec les égéries pop les plus inavouables ? Inviter tout ce beau monde sur un album solo dégoulinant ? Hit-Boy n’a pas choisi cette voie. Il préfère égaliser sa carrière des deux côtés du microphone et mettre en avant son groupe de potes HS87, avec un morceau déjà classique en prime. L’homme a l’air de faire exactement ce qu’il veut, sans contrainte. Et nous sommes les premiers gâtés.

La surprise de cette fin d’été se nomme Zoomin et laisse encore Hit-Boy sur cette même ligne, presque en dehors de tout ce jeu. On retrouve cette manière agaçante de tourner des violons classiques en bourrique et de les clouer de batteries coups de feu. Chaque morceau montre une aisance dans le grandiose, sans jamais quitter les pieds du sol. En 5 titres, Hit-Boy créé la mini bande originale d’un film qu’on n’a pas encore vu. Zoomin est la courte profession de foi d’un futur encore à écrire.

A noter la présence sur deux morceaux de Quentin Miller, le fameux ghostwriter de Drake. Pied de nez efficace face au bruit estival ambiant ou juste une façon de montrer que rien n’est calculé ? Même dans les détails, Hit-Boy reste toujours à contre courant.