Sidekicks

Ruff N Tuff, tel est le nom de l’album de Venom qui vient de sortir, huit ans déjà après le portrait qui l’avait présenté ici même. Un album qui, comme on peut le voir, reste fidèle à l’univers du Parisien. Un album qui affiche aussi un sacrée brochette d’invités, allant de MED à Ras Kass en passant par Nolan the Ninja, Conway ou Rah Digga. Cependant, l’album ne se veut pas une simple compilation, mais un vrai album de producteur, à la manière du Soul Survivor de Pete Rock ou du Insomnia d’Erick Sermon. Ce qui est sûr, c’est que ça cogne, et que les samplers fin-de-siècle de chez Ensoniq et E-mu n’ont pas dit leur dernier mot.

Tiens, tant que vous traînez chez Marvel Records, on vous conseille d’écouter Femme Fatale, le très bon album de la rappeuse Marquee (présente aussi sur Ruff N Tuff) sorti en juin dernier, produit par Ninjustice au complet, c’est-à-dire Venom accompagné de Kyo Itachi. Il est en écoute ci-dessous, ne reste plus qu’à presser play.

« Mais qu’est-c’j’m’en branle des pharaons, moi, j’pompais les flows de L’Skadrille », répondait Gringe à Orelsan dans un morceau des Casseurs Flowters, il y a quatre ans. Une belle manière de nous rappeler le talent et la fougue du duo dont faisait partie 13OR. Celui qui s’est fait appelé un temps Ghetto Youss reprend son nom de l’époque de Dangereux 2001 et Extazik pour ce « Super Nwar », où il ne kicke pas que sa chaise Quechua. Sur ce nouveau titre, 13OR déroule un débit actuel, rapide, urgent, en donnant l’impression de marcher entre deux époques (« Pas de défrisage négro : crâne rasé, c’est la coupe des vainqueurs, Jordan et Zidane »). L’instrumental livré par Madizm laisse la même sensation : sa boucle hypnotisante en reverse rappelle l’esthétique du rap français d’il y a dix ans, mais sa rythmique bondissante rappelle que le producteur passe les saisons comme des Timberland. « Super Nwar » n’est pas accompagné d’une date de sortie d’un futur disque, mais donne envie de découvrir ce que peut livrer 130R sur des prochains titres. Avec les récentes sorties de Flaco et Azuul Smith, et si c’était la renaissance du rap made in 7.8. ?

Mimile x Pandemik

« Je le fais mieux ». Quatre mots qui résument bien ce que l’on pense du parcours de Joe Lucazzi, toujours en progression quand la plupart des artistes de sa génération sont déjà tombés ou s’accrochent péniblement. Notamment auteur de l’une des meilleures sorties de l’année 2015, le rappeur parisien s’était aussi distingué la saison passée sur notre compilation maison et celle du Bon Son, et s’apprête à dévoiler, le 12 janvier prochain, No Name 2.0, trois ans jour pour jour après le premier du nom. Un album sur lequel il sera de nouveau bien entouré puisqu’on retrouvera aux manettes l’indispensable duo Pandemik Muzik, mais aussi Mayer d’Hits Alive, Frencizzle et Pee Magnum. Côté micro, le panorama sera tout aussi appréciable avec les participations de Flynt, Alpha Wann, Express Bavon et du trop rare et donc infiniment précieux Cross. Treize titres, dont ce superbe « Je le fais mieux » qui nous rend forcément impatient de fêter la nouvelle année.

Prolifique, insatiable, cela fait bientôt cinq ans que Mani Deïz livre au rap français des écrins sonores raffinés. Tantôt tapis soyeux, tantôt couvertures mélancoliques, avec une passion pour la boucle aux couleurs désaturées, le beatmaker de l’Essonne a finalement créé sa propre esthétique. Le rap français qualifié d’indépendant en raffole, et parfois même plus, en témoigne la liste des collaborations effectuées par le Kids of Crackling. Mais Mani Deïz a décidé de satisfaire d’autres faims. En l’occurrence, ce seront les siennes. Lui qui se nourrissait déjà de ses beat tapes sortira début 2018 un album plus trip-hop que rap. Pas tout à fait dans la veine d’Archive ni de Thievery Corporation mais un peu quand même, Infinity-1 transformera les boucles du producteur français en longues nappes mélancoliques, sporadiquement accompagnées de chant et de chorus. Une démarche et une évolution qui n’est pas sans rappeler celle d’un certain Fred Yaddaden et son album Shadow of a Rose. Si les deux pattes sont et resteront singulièrement différentes, il est difficile de ne pas rapprocher les trajectoires musicales. Mais un peu trip-hop, un peu abstract, que les fanatiques des boucles de celui qui s’était décrit comme les autres se rassurent : Infinity-1 restera du 100% Mani Deïz. La promesse d’un beau glissement d’univers.

En attendant rien ne semble pas être la première sortie de Lafrog, mais c’est en tous cas cette mixtape qui lui servira de carte de visite. Mise en ligne il y a quelques jours sur Youtube et téléchargeable via Haute Culture, elle laisse entendre le rappeur parisien sur différents registres au long des seize titres qui la composent. Pour se faire une idée, l’Abcdr recommande l’écoute du très efficace « Gundogan », de « Ouais Ouais » ou encore de « Anarchie (Rmx) ». Quelques jours après avoir été dévoilée En attendant rien porte déjà mal son nom, et il y a fort à parier qu’avec le temps, les raisons d’attendre une suite à cette tape seront nombreuses. Quoi qu’il en soit, cela faisait depuis un moment (Freebase 1 de Kekra ?) que le « marché » français de la mixtape gratuite n’avait pas proposé un fichier .rar aussi alléchant.

Les relations franco-américaines ne sont pas encore refroidies. En tout cas, pas dans le rap, où les producteurs français continuent à fournir leurs compositions pour des rappeurs US. Récent exemple en date : Marty Baller, rappeur d’Harlem, proche de l’A$AP Mob, qui fait briller son style de flambeur sur l’instrumental épileptique d’HollaDaze, membre du collectif MVP Most Valuable Producerz.

Il y a trois ans, on rencontrait Blastar, qui venait de finaliser la réalisation d’Ateyaba, premier long format de Joke. Le producteur de Golden Eye Music pouvait alors se targuer d’un C.V. complet, avec ses compositions pour Rohff, Sefyu, le 113 ou encore Mac Tyer. Mais il annonçait déjà, en toute fin d’entretien, son envie de développer de nouvelles idées. C’est en substance ce qui transpire de sa première beat tape, Ex_machina. A l’image de son single « Gumbo » sorti il y a quelques mois, Ex_machina est un plat mêlant de nombreuses cuisines, entre sample oriental, cadences tropicales, piano soul, rythmiques traps, incursion dancehall, nappes spatiales, et inspirations French touch. Tout en évitant l’indigestion. Le chef Blastar prépare actuellement un EP pour 2018, et ce Ex_machina : The Beat Tape se déguste comme une appétissante farandole d’hors-d’oeuvres.

Mise à jour le 16/11/17 : le concert de Passi est finalement reporté au 9 février 2018, à La Cigale.

Il n’y a pas que les « puristes » qui le disent : 1997 était une grande année de rap français. Parmi les disques qui fêtent aujourd’hui leurs vingt ans, il y a Les Tentations de Passi. L’album du rappeur du Minister A.M.E.R avait rencontré un succès colossal lors de sa sortie en 1997. L’une de ses qualités, en plus de la désinvolture de Passi, était la production du disque. Akhenaton y scelle définitivement ses capacités de beatmaker et des pointures telles que Doctor L, le duo White & Spirit ou évidemment Desh complètent le travail du Marseillais. Le résultat ? Un tapis sonore quasi sans faute qui fait office de parfait contrepoids à l’indolence feinte de Passi. Et si l’incroyable succès de « Je zappe et je matte » et sa galerie de name dropping télévisuels ont fait la renommée des Tentations, celles-ci méritent encore aujourd’hui d’être réécoutées dans leur intégralité. Ça tombe bien, Passi fêtera le vingtenaire de son disque à l’Elysée Montmarte ce 16 Novembre. Le concert sera suivi d’un aftershow gratuit mais auquel L’Abcdr vous propose de vous payer un verre (et un accès coupe-fil). Kozi, Noize et Just Dizzle seront aux platines de cette soirée. Alors rendez-vous sur notre page Facebook si vous êtes tentés.

On croyait que Slaine était mort. Eh bien non : bien vivant et même en forme, il revient en « anti-héros » dans le cadre d’un duel amical avec Termanology. Parmi la longue liste d’invités de cet album de 14 titres qui sort chez Brick Records, on trouve les noms de Conway, Ill Bill, Evidence et autres joyeux lurons. Le premier extrait réunit une équipe de choc puisque le Bostonien et son compère sont épaulés par Bun B (à qui décidément le boom-bap va bien) et l’increvable Everlast, toujours là même si sa voix n’a plus la puissance d’antan. Sans oublier un certain DJ Premier aux manettes, qui sort pour l’occasion une de ces boucles obsédantes dont il a le secret.

En 2007, Fredy. K décédait d’un accident de la circulation. Le posse ATK se retrouvait orphelin de l’un de ses plus généreux rappeurs. Un disque rassemblant l’ensemble du collectif – c’est à dire à l’époque où ils étaient plus de vingt et un – était sorti pour rendre hommage au MC de Maximum de Phases. Dix ans plus tard, ce sont des graffitis qui ont fleuri sur cinq murs de France et de Belgique. En hommage à Fredy toujours, parti trop tôt, car ATK, ce n’était pas qu’un rap mélancolique sur boucles de violon-piano, mais aussi de belles couleurs dans chaque coin de l’Heptagone.