Dans le vocabulaire musical de LinLin, un mot semble ne pas exister : la concession. Depuis 2023, la rappeuse française, aussi connue en tant que “high empress of rap” sur ses réseaux sociaux, torpille ses auditeurs à coups de titres abrasifs, saturés, et dansants, mélangeant tour à tour rap, influences R&B et sonorités électro (notamment sur le très bon “KISS X3”) sans jamais perdre de vue le plus important : sa créativité.
Derrière les clips et les pochettes soignées de LinLin se cache en effet un univers artistique (déjà) riche, que la rappeuse vient récemment d’encore plus étoffer. Le nom de sa nouvelle livraison : “BOOGEYMAN”. Un titre à la fois déstabilisant à la première écoute et hypnotisant par la suite, dans lequel l’artiste du Val-de-Marne déroule durant trois minutes un rap plein d’egotrip sur une rythmique lente tendance années 90 (avec son supplément scratchs) tout en le blindant de sirènes et de synthés stridents rappelant “Hellifornia” de Gesaffelstein. La proposition, déjà originale, trouve alors encore plus de sa singularité à travers son outro, qui s’envole dans des arrangements cosmiques avec ses voix célestes et ses claviers spaciaux, avant de s’arrêter subitement.
Si “BOOGEYMAN” n’est pas le titre le plus facile d’accès de LinLin (“CONTACT” sorti en février dernier est peut être une porte d’entrée plus aisée) sa mini-radicalité en fait un beau manifeste de ce que la rappeuse semble vouloir faire. Sans se plier aux règles de la facilité, et en prenant soin de mélanger des influences éloignées sur le papier, LinLin crée son propre univers sonore et visuel, et le livre ensuite au public, quitte à ce qu’il soit déstabilisé. C’est toute la force de sa musique, autant capable de prendre à contrepieds qu’emporter celui qui prend le temps de l’écouter.