Chronique

Section Fu
Mortal Kombat

Night & Day - 1996

Sorti en 1996, Mortal Kombat était censé poser les fondations d’un groupe présumé régner sur l’underground du rap français et offrir une nouvelle direction à un hip hop explorant déjà de multiples pistes. L’on ne peut plus fertile label Night & Day avait ainsi donné la possibilité aux quatres rappeurs (Dexter, Linko, Rudee et Voodoo) d’exprimer sur vinyle une folie entraînante et jusque là peu commune. Ce mini LP de trois titres (avec intro et instru en sus) devait donc permettre de présenter ce crew déjanté avec pour conséquence logique la sortie à plus ou moins longs termes d’un album que beaucoup qualifiaient prématurément d’explosif…

Section Fu n’est cependant pas ce genre de groupe prévisible sur lequel il est possible de dessiner une trajectoire. C’est en partant de ce constat que l’on peut affirmer que l’intro sombre et inquiétante de cet EP, composée de basses pesantes, n’est en réalité qu’un leurre. En effet, aussitôt la prod grasse de Voodoo effacée, suit l’envoûtant classqiue ‘V’la les Fu’, morceau egotrip présentant l’univers dans lequel évolue chacun des quatres Mcs. Autant dire que c’est un véritable tour de force, et que l’on ne peut que se réjouir de la fraîcheur des lyrics et des flows sur une production aussi légère. Notons au passage les premières rimes du morceau : « J’arrive avec mes potes devant la porte du hip hop : c’est nous ! Check check one two, v’la les Section FU ! », annonciatrices d’une volonté d’insuffler un nouvel élan dans le hip hop hexagonal.

La face B est dédié à deux titres fondamentalement distincts, dont le premier versant est le freestyle Quel f*cky en featuring avec T. Apollo G. et Wicked Dread sur les refrains. Les ‘lyrics explicites’ de ce titre font inévitablement sourire, tant les rimes gratuites (freestyles oblige) se succèdent l’une après l’autre, chaque MC essayant d’en faire un peu plus que celui qui l’a précèdé (« La Section Fu aime éclater les lattes de ton lit… »). ‘Mortal Kombat’, titre éponyme de l’album, est sans aucun doute le plus sombre des trois proposés. Certes c’est aussi un egotrip mais il sonne nettement plus brut et démontre que les quatre rappeurs sont tout aussi à l’aise sur un instru moins enjoué. Le morceau, streetlife à souhait, comporte quelques phases bien senties de la part de Voodoo : « Ne parle pas de corde au coup dans la maison d’un pendu« , « Les mecs de la rue sont des bêtes enfermés dans un zoo, la France connaîtra bientôt le phénomène de ghetto« , ou encore « la rue reste mon terrain de jeu mais le bitume ne sera pas mon tombeau » et viennent percuter à chaque mesure, confirmant ainsi l’étendu des possibilités des rappeurs.

Si Mortal Kombat fait encore à l’heure actuelle l’unanimité, on peut légitimement se poser des questions quant à la fortune qu’a obtenue le groupe. Malgré des titres très remarqués par la suite (‘Ruff reality,’ ‘Ton Fils’, ‘Shoot dans le 1000’) et d’innombrables apparitions sur mix-tapes, l’album/compilation Fu Infanterie sorti en 2000 ne rencontrera pas quant à lui le succès tant escompté. Toujours resté fidèle à leur ligne de conduite initiale, l’indépendance, les Section Fu n’ont jamais cédés aux compromis proposés par les maisons de disques… 2002 sonne peut-être comme l’année d’un nouveau départ, après le maxi deux titres L’homme à abattre / Dexologue, les Fu devraient en effet suivre l’exemple de leurs compères d’Octobre rouge en sortant prochainement un album, que l’on espère à la mesure de leur talent.

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