La Rumeur : « le rap, c’est du cinéma pour aveugles »
Interview

La Rumeur : « le rap, c’est du cinéma pour aveugles »

Depuis son commencement, La Rumeur fonctionne par trilogies. Nos rencontres ne dérogent pas à la règle. Une interview en forme de troisième volet, cette fois après « Du coeur à l’outrage », et une bonne gueule de bois post-électorale. Où l’on parle du disque et de plusieurs projets prometteurs, mais pas seulement. Loin de là.
VO

, et

Abcdr du son : Dans quel contexte s’est fait ce troisième album ? Vous en aviez beaucoup parlé lors du deuxième…

Ekoué : Regain de tension, ça a été une tournée et un contexte assez épuisants pour nous. C’est un album qui est sorti sous le feu des attaques, et contrairement à ce qui a été dit ici ou là, il a pris autant de temps et de soin que les précédents, à la différence près qu’il fallait qu’on réagisse du tac au tac face à une actualité tristement prémonitoire. On a senti que le contexte social et policier en France s’était largement durci, preuve en est le fait qu’on soit attaqués par le ministère de l’Intérieur. Il fallait défendre nos propos devant un tribunal, et aussi sortir un disque qui les défende. En tant qu’artistes hip-hop, la seule réponse qu’on puisse donner au plus grand nombre, c’est un album, articulé à des interviews ; à la fois pour donner plus de poids à nos arguments, et pour apporter des réponses subsidiaires par rapport à l’album, en faisant notre magazine par exemple. Ensuite, énorme tournée pour Regain de tension, certainement la plus éprouvante, des concerts dans beaucoup de villes et à un rythme très soutenu.

Pour Du coeur à l’outrage, on a profité de cette « période d’épuisement » physique, intellectuel et moral, pour se dire qu’on devait faire un album « comme ça » et pas autrement. On assume complètement ce qu’on a fait dans le passé et on entend assumer ce qu’on fera dans l’avenir. On a le sentiment que l’expérience et le poids du deuxième album sont au service d’une démarche artistique plus mûrie, plus réfléchie. Avec aussi et surtout la volonté d’amener l’album exactement là où on a voulu. Je pense que c’est un fait inédit depuis que La Rumeur existe. Les types de morceaux qu’on voulait écrire, on les a amenés à la rime près. Une fois qu’on s’est mis d’accord entre nous sur le thème, on a fait trois, quatre, cinq versions avant d’arriver aux textes définitifs.

A : Il semblait en effet que Regain de tension avait été enregistré sur un temps plus court… Comment ça s’est passé cette fois-ci ?

E : En fait, le pouvoir ou l’« acuité » que te confère la scène, c’est de pas perdre de temps quand tu enregistres un morceau en studio. Tu peux amener la prise au niveau où tu veux le faire. Avec Philippe, on a commencé à écrire des textes et à faire de la scène à 14-15 ans, donc ça va faire grosso modo plus de la moitié de ma vie que j’ai un micro en main et que je rappe. La Rumeur, avant d’être des personnalités aux caractères ou aux parcours de vie différents, on est des purs produits de la culture hip-hop, vraiment. Moi, j’ai été graffeur, j’ai taggué (avec beaucoup moins d’investissement que dans le rap, évidemment), et j’ai fait du rap. Donc on considère que ce qui prend du temps dans la conception d’un album, c’est le recul que tu peux donner à ton oeuvre, parce que les thèmes on va pas les réinventer, on va pas écrire sur des sujets qui n’appartiennent pas à notre schéma de pensée et le soin apporté.

C’est là toute la magie de la rime finalement, c’est quand tu as le sentiment que tu peux amener ton rap où tu veux. Solaar disait une phrase juste, que je partage complètement, c’est que le rap, c’est « du cinéma pour aveugles ». Il y a des morceaux qui en trois minutes te permettent de voyager, avec suffisamment d’images, de lieux, d’évocations pour t’amener de A à B. C’est ça qui prend du temps. Cette démagogie qui consiste à dire « j’écris mes textes en studio… Personnellement, j’ai un peu plus de respect pour l’auditeur. Ou alors, tu fais des mix-tapes. Nous, on reconnaît clairement la différence avec le soin qu’on apporte aux albums.

A : De toute façon, en tant qu’auditeur, tu peux souvent reconnaître ce qui a été écrit vite fait… En ce qui te concerne, il y a plusieurs morceaux introspectifs qu’on imagine difficilement écrits en studio…

E : Disons qu’en studio, il y a des exutoires. Je kiffe poser sur Représailles ou Que d’la haine, ou c’est de la crasse du début à la fin, ou tu es pas forcément dans la morale, et tu sais que c’est confiné à un public beaucoup moins important qu’un album. C’est à consommer plus vite, tu essaies des trucs, tu te lâches… C’est le côté ludique qu’on peut apprécier dans le hip-hop. L’album, ça demande du soin, et aussi de coller à un certain contexte. Et il n’y aurait pas eu les albums sans la première trilogie, ni Du coeur à l’outrage sans Regain de tension. Avec Hamé et Philippe, on se dit qu’on arrive au terme de notre deuxième trilogie, après dix ans de parcours discographique. Il y aura normalement une troisième trilogie, et après, en tant que groupe de rap, on arrêtera. Après, ça peut prendre des formes différentes… Mais les cinq-six années à venir, on y réfléchit.

A : Philippe, on a l’impression que tes deux solos, sur cet album, sont interprétés un peu différemment que par le passé…

Philippe : C’est aussi le background qui fait que je les ai écrits différemment, en adéquation avec le climat social dans lequel on baigne. ‘Du sommeil, du soleil, de l’oseille’, j’aurais pas pu l’écrire sur le premier album, il est venu en réaction aux émeutes de 2005, donc émotionnellement… Je pense que chaque texte se doit d’appartenir à une époque précise.

A : Hamé, sur ‘Un chien dans la tête’, tu sembles vouloir illustrer combien l’écriture sert parfois de thérapie pour apaiser tes maux…

Hamé : Oui mais pas uniquement. Ce morceau évoque aussi le démon de l’écriture qui me ronge parfois profondément, il fait référence à toute cette période de gestation où tu te mets en disposition pour écrire mais où la plume se refuse à toi. ‘Un chien dans la tête’ traite cette relation paradoxale que je peux avoir avec l’écriture, la nécessité d’écrire mais aussi l’angoisse et l’errance, notamment nocturne, sur laquelle tout ça peut déboucher. Le paradoxe est aussi là, la rime ne soigne pas, on peut seulement nourrir l’espoir que ponctuellement elle soulage. J’ai eu une période insomniaque très problématique à un moment.

A : Ton morceau ‘La Meilleure des polices’ semble faire écho à des réflexions de Nietzsche sur la valeur du travail. Pour résumer, il explique que le travail représente la meilleure des polices. Ce que tu décris fait aussi penser au concept de discipline chez Michel Foucault dans Surveiller et Punir, est-ce que ces deux auteurs constituent des sources d’inspiration à tes yeux ?

H : J’ai croisé le chemin de ces auteurs au travers de mon parcours estudiantin. Après je dis ça sans vouloir faire mon mec bardé de références. Ces livres sur la question du contrôle des pulsions créatrices chez l’individu sont non seulement merveilleusement écrits mais ils ont une vraie puissance philosophique et politique.

Après, au-delà de ce parrainage involontaire, ‘La meilleure des polices’ rassemble avant tout mes propres expériences, mon parcours dans un milieu ouvrier. Ce morceau est aussi né d’une volonté de donner un petit frère à un titre que j’avais fait pour le deuxième volet : ‘Le pire’. Si ces morceaux sont nés dans des contextes complètement différents, je voulais de nouveau traiter ces questions de l’intériorisation de l’échec et d’une certaine fatalité, cette intériorisation de sa propre domination. Ce sont des thèmes qui m’intéressent et que je compte creuser d’avantage dans d’autres projets notamment cinématographiques.

A : Justement, il semble que tu aies pour projet de partir aux États-Unis étudier le cinéma. Peux-tu nous en dire plus, notamment sur les sujets que tu aimerais creuser et la continuité entre ton activité de MC et celui de réalisateur ? 

H : Il y a forcément une continuité entre ces deux activités. En fait, je vais terminer mon troisième cycle de cinéma à NYU [NDLR : New-York University], troisième cycle que j’avais débuté à Paris, à la Sorbonne. J’ai l’intention de mener à terme un projet autour d’un auteur noir américain : Ralph Ellison. Il a beaucoup travaillé autour de la métaphore de la cave et l’invisibilité des noirs américains dans l’Amérique blanche en évoquant combien les fantasmes et stéréotypes pouvaient être nourris par la société dominante.

Je pars là-bas en me laissant le loisir d’apprendre des choses là-bas, pour tourner un truc, parachever mes études et y retourner. En plus on a commencé avec notre label, La Rumeur Records, à diversifier les supports. Les disques, le magazine, le documentaire que l’on finalise avec MK2…

A : Que va-t-on retrouver dans ce documentaire ?

H : Des images inédites de La Rumeur, une couverture du procès en première instance, des extraits du concert de l’Elysée-Montmartre. Le documentaire exposera aussi notre démarche, combien avec notre humble expérience on s’est toujours efforcé de croiser le politique et l’artistique. Il est prévu que ce documentaire soit exploité dans un certain nombre de salles MK2. Il sera aussi édité en DVD d’ici la fin de l’année. On a encore des choses à tourner, notamment l’arrêt de la cour de cassation qui doit être rendu le 13 juin. On saura à ce moment là si on a gagné définitivement… Ce sera une semaine après notre concert au Trabendo pour les dix ans de La Rumeur.

A : Il y a un changement important dans le cadre de l’album, c’est que vous faites appel à des producteurs extérieurs, dont Demon et P.A.T., plutôt investis dans la musique électronique, même si Demon a fait des trucs pour 113. Pour quelles raisons avoir fait appel à eux ?

E : On avait fait appel à d’autres producteurs pour L’ombre sur la mesure, mais effectivement, ça restait des cercles très proches de La Rumeur. Il y a un groupe que j’apprécie qui sont des amis avant d’être des rappeurs, c’est Specio, que je connais depuis dix ans et qu’on a invité sur l’album, et eux travaillaient avec Demon. Ils avaient exprimé la volonté de produire des sons pour nous depuis longtemps, mais comme on a un univers très précis, on n’avait pas forcément envie… C’est ce qui peut nous donner de l’extérieur, et que je peux comprendre, un côté « fermés sur nous-mêmes« , un peu autocentré.

Et pour cet album… Je vais faire un parallèle. Il y a une émulation entre les MC. Aujourd’hui, Hamé est arrivé à un tel niveau d’écriture, que pour Philippe et moi il s’agissait pas de courir derrière lui, mais de s’affirmer dans nos styles. On a chacun des atouts, donc une grande complémentarité entre nous. Mourad est moins présent, parce qu’il a un taf… Pour Hamé, Philippe et moi, je pense qu’aujourd’hui, les attributs qui font un rappeur complet, on les a. Hamé, ce qu’il n’avait pas, c’était partir en impro et se lâcher à la fin d’un concert ; maintenant il l’a et parfois il fait même mieux que nous. Inversement, Philippe, son atout c’est la métrique, la façon dont il assène les rimes, un découpage qui nous a toujours impressionnés, une façon de rentrer et de sortir des caisses… Moi, je pense avoir mes qualités aussi… Et derrière les discours et les thèmes, il y a un amour de la rime, de la technique au service du propos. Résumer en trois phrases ce que tu peux écrire en quinze, c’est toute la magie et toute la difficulté du rap, en tout cas comme nous on l’entend. Si les gens arrivent à apprécier nos textes, c’est parce qu’on consacre un effort de forme parfois presque plus important. Et on prend du plaisir à écrire un texte mais aussi à être sur scène ou à rapper parce que c’est notre métier et qu’on le fait avec soin et engouement.

Étant donné cette concurrence là, on s’est dit que Gérald aussi avait besoin de se retrouver face à d’autres mecs ayant un gros niveau, pour qu’il puisse sortir le meilleur de lui-même. Soul G c’est un mec qui a une culture musicale, qui joue de la basse, du piano, de la guitare, de la batterie ; et c’est vraiment un DJ à l’ancienne. Hier, on était sur scène à Bruxelles, et on s’amuse ! Gérald nous connaît, sur un clin d’oeil il cutte la musique puis la renvoie, il envoie des scratches à la Premier, pas trop appuyés, il a une musicalité naturelle…

Pour Du coeur à l’outrage, on a voulu ramener des mecs qui ont un univers à eux et qui sont costauds. C’est le cas de Demon, de P.A.T. et aussi de Laloo. Laloo, honnêtement, c’est aujourd’hui un des programmateurs qui me parlent le plus en France. Quand tu écoutes ses sons, tu as envie d’écrire des films dessus. Les beats qu’il a ramenés… Au début, le beat de ‘Nature morte’, ça devait être celui de ‘Qui ça étonne encore ?’ [On ouvre de grands yeux]. Et puis Demon a ramené un son et on s’est dit que ce serait plutôt celui-là… che-lou, hein ?

« ‘La meilleure des polices’ rassemble avant tout mes propres expériences, mon parcours dans un milieu ouvrier. »

Hamé

A : D’ailleurs, on ne sait pas quels sont les choix de singles, mais ‘Qui ça étonne encore ?’ défonce vraiment…

E : Hier on l’a fait sur scène, et ça renvoyait ‘Premier sur le rap’ et ‘P.O.R.C.’ à l’âge de pierre. C’est un morceau qui appartient à son temps, et quelque part c’est le porte-étendard de Du coeur à l’outrage. Il a une résonance qui, avec le contexte politique qu’on risque de vivre ces cinq prochaines années, est décuplée. Pour nous, c’est du rap… voilà, quoi. Nos couplets, c’est huit mesures écrites avec le sang de nos veines, plutôt que de partir dans un long monologue… La difficulté de ce morceau, c’était d’écrire en huit ou en douze mesures ce qu’on aurait pu expliquer en trente-deux. Quand je commence… [Il récite son couplet a capella], c’est vraiment le concentré de ce que j’avais en tête. « Qu’attendons-nous du système, à part ses euros ? » : on va pas se leurrer, on vit pas comme des ascètes, bien sûr qu’on veut de l’argent…. Tout ce côté attentiste : « Considérez-nous comme des citoyens, on est des Français comme les autres« , cette espèce de démagogie, moi je suis pas là-dedans. Ça peut d’ailleurs être perçu aussi comme de la démagogie pour certaines personnes, mais nous on est intègres par rapport à ce truc là. Bref, de l’émulation, quand Demon a ramené ce son, ça a joué sur Soul G.

P : Inversement, je pense qu’avant de nous faire écouter des prods, les mecs savaient déjà quel calibre il fallait, au vu de ce que Gérald avait fait sur les précédents albums. C’est une émulation saine, qui est là pour apporter quelque chose, pour contribuer à faire en sorte que ce soit un bon album.

A : D’ailleurs, il n’est pas toujours facile de deviner qui a produit quoi…

E : Ouais, les mecs connaissaient notre univers… Encore une fois, je ne juge personne, mais la démagogie qui consiste à faire passer du rire aux larmes, moi je me sens pas suffisamment « artiste » pour accomplir ce genre de trucs. Il y a Brel qui savait le faire. Ou Renaud. Des mecs qui ont une telle qualité d’écriture, que Renaud peut te faire ‘Ma gonzesse’, ou ‘Mort aux enfants’, ou ‘Triviale Poursuite’, et de l’autre côté ‘Je suis une bande de jeunes à moi tout seul’ ou ‘Marche à l’ombre’… Mais pour arriver à un tel accomplissement de soi, c’est pas quinze ans d’écriture qu’il faut, c’est vingt ou trente. Nous on s’en sent pas capables. Des fois on nous dit qu’on devrait faire des morceaux plus « rigolos« … Mais moi sincèrement, je sais pas faire ça. Il y a des groupes qui croient savoir le faire, mais je trouve que c’est pas bien fait.

A : Et puis il n’y a pas de format d’album unique, on est pas obligé de faire un morceau qui touche le coeur, un morceau rigolo…

E : Exactement, et le rap c’est ça maintenant. Nous, on assume notre caractère sombre, ce qui veut pas forcément dire qu’on l’est dans notre vie… Comme le disait Casey récemment dans une interview, les mecs d’Iron Maiden, ils mettent des têtes de mort sur leurs pochettes, mais le dimanche ils vont promener leurs enfants, et en vacances ils font du jet-ski ! [rires] Ta sensibilité artistique fait que tu es dans un registre sombre, mais voilà ; personnellement les groupes que je kiffe, c’est des trucs comme Smif-N-Wessun, Gangstarr, Mobb Deep, Ali Vegas, Cormega, CNN, Jeru… Après, heureusement qu’il y a des Jay-Z ou des 50 Cent… Même un groupe comme Pete Rock & C.L Smooth, avec un compromis entre un côté « club » et un côté « ghetto », les morceaux que je retiens c’est ‘They Reminisce Over You’ où il parle de la mort de son pote, des trucs qui, quand tu saisis un peu les paroles, peuvent de mettre la larme à l’oeil, c’est ça qui marque.

« NTM à l’ancienne, il y a pas de problème, pareil c’est des mecs que j’ai aimés de leur vivant. »

Ekoué

A : Tu parlais de Renaud tout à l’heure, il y a un morceau clin d’oeil dans l’album, c’est un hommage ? Aujourd’hui on a plutôt un regard consterné sur son évolution, sans oublier qu’il a fait des choses très bien…

E : Je suis complètement d’accord… Effectivement, Renaud aujourd’hui incarne tout ce que je peux détester, c’est-à-dire le vieux chanteur réac’ – même si j’ai l’impression qu’il est un peu revenu sur ses propos ces derniers temps – qui voit que ses rimes et sa façon de faire de la musique prennent des rides et qui se retrouve sérieusement concurrencé… Quand il vole au secours de Pascal Sevran, je peux que lui cracher à la gueule. Mais ses premiers albums, les compilations, je les écoute. Ça me fait penser à Desproges qui disait, avant que Gainsbourg meure, « J’appréciais Gainsbourg de son vivant« . Moi c’est pareil pour Renaud. Depuis le premier volet, j’ai toujours été inspiré par son style d’écriture… Donc il y a un clin d’oeil…

A : Même chose, le passage sur « Laisse pas traîner ton fils », c’est un clin d’oeil pour NTM « de leur vivant » ?

E : [rires] Ouais, c’est ça, pareil. Plein de monde m’en parle de cette phase. Ce morceau, ‘Quand la lune tombe’, c’est un peu un ‘Blessé dans mon ego’ dix ans plus tard. La phase en question, bon, des fois tu contrôles pas ton écriture… Je sais pas pourquoi j’ai pensé à ‘Laisse pas traîner ton fils’, et j’allais pas dire « qui glisse » ! Fallait que je trouve une rime avec « gens » [rires]. Tu crois que c’est un dédicace et puis en fait, c’est juste venu comme ça. Maintenant, NTM à l’ancienne, il y a pas de problème, pareil c’est des mecs que j’ai aimés de leur vivant. IAM pareil, bien sûr. On a peut-être des intérêts divergents, mais… Pardon, mais le dernier album d’IAM, j’ai écouté des trucs, c’est pas possible, j’ai juste envie de leur dire d’arrêter…

A : C’est pas évident de vieillir dans le rap non plus…

E : C’est vrai, mais je pense qu’IAM faisait partie des groupes qui auraient pu bien vieillir. C’est des mecs qui savent indéniablement bien écrire, enfin, qui savaient. est un super bon album, il y a pas à chier, pareil, il y a des morceaux terribles dedans. Mais là, ils ont tellement voulu courir derrière les tendances… Au bout d’un moment, ton rap a l’âge de tes artères. Et moi, mes préoccupations sont celles d’un trentenaire, comme je le dis dans ‘Quand la lune tombe’…

Souvent, les gens – à juste titre, et je pense qu’on en est en partie responsables – ont eu une idée préconçue de La Rumeur… Parce qu’on a fait des études et parce qu’à la télé, même si on n’est pas d’accord avec nous, on a une capacité à argumenter, ce qui pas le cas commun des groupes de rap aujourd’hui, et c’est triste, je le dis vraiment avec un pincement au coeur en oubliant qu’à côté du rap on a une vie, et qu’au-delà des discours, on est ce qu’on peut appeler des gars de la rue, mais vraiment. Ce que je raconte dans ‘Que la lune tombe’… Mes ramifications s’arrêtent pas à Sciences Po’ Paris ou à l’université machin : je connais des gens de tous les milieux. Toutes les images évocatrices du morceau, ça vient de virées nocturnes, La Chapelle-Place de Clichy… J’ai des potes qui tiennent des sex-shops, des voyous au sens sociologique du terme, des mecs qui ont consacré leur vie au crime, des « Monsieur« . Ce regard, ça permet de démystifier tout le gangstérisme dans le rap, parce que c’est pas cette réalité là. La vraie mafia, d’une elle fait pas de rap, deuxièmement elle vend des organes, troisièmement elle vend de la coke et elle fait tapiner des putes. Quand tu fais du rap, t’es un poète, point. Ce qu’on aimerait entendre, c’est un discours construit et cohérent, pas des mecs qui sont en train de singer un truc alors qu’ils en sont à des années-lumière, parce que c’est tout simplement incompatible.

Maintenant, on a toujours été sensibles et fait des clins d’oeil à un certain Paris noir, à un Paris des voyous, sans que ce soit explicitement dit, comme ‘Le coffre-fort ne suivra pas le corbillard’, ou sur ‘Paris nous nourrit, Paris nous affame’… Mais ce que t’apprend Paris, c’est que ceux qui font de l’oseille ne roulent pas avec du son à fond, ils sont discrets. Le Paris des non-dits, celui qui hérite d’une tradition de Pigalle, les différents gangsters… Ce qui est unificateur, c’est l’agent, mais c’est aussi le jargon, les références… ‘Quand la lune tombe’, c’est un hommage à la frontière entre le « milieu » et le fait que toi, humblement avec ton rap, tu essaies juste de donner des codes.

A : Mais c’est aussi ce qui vend, les adolescents qui recherchent le côté violent ou criminel en perdant un peu cette différence là…

E : Ouais, mais la conception qu’on a, c’est un rap qui colle à une certaine réalité. Après, il y a toujours un côté fantasmagorique, une certaine exagération que tu peux faire, un côté freestyle… Mais quand on aborde des sujets sérieux, on essaie de jamais trop en faire.

A : Le fil est parfois mince, pour éviter de tomber dans la caricature…

P : Le but, c’est décrire au plus juste, le plus près possible…

E : On a toujours eu cette espèce de mystique : si un jour on avait le sentiment de trahir les fondamentaux de la Rumeur, ou si on partait dans des choix hasardeux ou des morceaux formatés pour Skyrock, si on commençait à retourner notre veste, le concept se retournerait contre nous.

Franchement, le hip-hop, le rap, je finis par croire que ça a été un don du ciel. Ça m’a redonné fierté, ça m’a resocialisé. Je suis pas venu aux études comme ça, j’ai toujours eu un rapport conflictuel avec, mais le rap m’a permis d’abord d’avoir confiance en moi, et ensuite d’aller vers le savoir. Et donc on a coutume de dire, même si ça peut paraître un peu démago, que c’est une musique qui nous a tellement apporté qu’on considère qu’on a beaucoup à lui rendre. On peut nous trouver excessifs ou butés dans nos propos, je comprends que de l’extérieur ça peut parfois être déroutant ou énervant. Mais on le vit tellement sincèrement et pleinement, que… Moi je refuse qu’on fasse n’importe quoi. Je dis pas du tout que tous les groupes devraient être comme nous, et tant mieux s’il y a différentes options, le rap a toujours été comme ça : heureusement qu’il y a des Biz Markie ou même des 2 Live Crew. Mais il y a avait un truc qui fait que tu savais que tu avais affaire à des mecs hip-hop.

« Franchement, Noir Désir et Serge Teyssot-Gay en particulier, je les considère comme des « grands frères » sur le plan musical, c’est vraiment le groupe qui manque aujourd’hui en France. »

Ekoué

A : Pour revenir à l’album, une… rumeur avait circulé, selon laquelle il aurait pu s’appeler « Entre les deux tours », idée abandonnée ou intox ? En tout cas la date de sortie de l’album n’est pas anecdotique…

P : [Philippe et Ekoué sont pliés de rire] Pure intox ! C’est un hasard que l’album tombe entre les deux tours, je te jure. Au départ, on devait le sortir quelques mois plus tôt, et on a pas pu pour des raisons d’organisation, donc il a été repoussé au mois d’avril. Et si ça nous convenait complètement, c’est parce que ça correspondait à quelques jours près aux dix ans de La Rumeur.

E : Le premier volet est sorti en CD le 14 avril 1997 ; Du coeur à l’outrage était d’abord prévu pour le 16, puis le 23 avril 2007. Parole d’honneur, par rapport aux élections : hasard de calendrier. Et même mieux : c’est pas forcément une date de sortie avantageuse…

P : Les gens sont tellement préoccupés par autre chose, ils ont pas forcément envie de consommer de la culture.

A : Vous avez à nouveau invité Serge Teyssot-Gay (sur scène ça donnait vraiment bien), pourquoi cette nouvelle collaboration ?

E : Franchement, Noir Désir et Serge Teyssot-Gay en particulier, je les considère comme des « grands frères » sur le plan musical, c’est vraiment le groupe qui manque aujourd’hui en France. Bon évidemment il y a l’histoire Cantat, regrettable, mais c’est mon pote et je l’assume ; c’est aussi ça qu’on apprend au quartier, ne pas désavouer quelqu’un pour ce qu’il a fait. Quand tu vois ceux qui les ont pompés pour les désavouer ensuite, ça fait vomir.

Noir Désir, ils sont venus nous voir après L’ombre sur la mesure alors qu’on était qu’un petit groupe issu de l’underground, et ils nous ont permis d’ouvrir plusieurs Zénith. Si on a vendu presque 60.000 albums, c’est en partie grâce à Noir Désir. L’expérience de ‘Paris nous nourrit, Paris nous affame’ était concluante, mais je préfère le résultat de ‘Je suis une bande ethnique…’. Ensuite, Hamé et Casey ont un projet avec Teyssot-Gay…

A : On allait justement t’interroger là-dessus Hamé. D’où est née cette idée ? Quelles sont vos envies et objectifs autour de cet album ?

H : On partage avec Casey un goût pour le rock. Elle en écoute beaucoup, moi également. On s’échange régulièrement des disques de rock, parfois même de hard rock. Ça peut aller jusqu’à AC/DC, un groupe que j’aime vraiment. J’aime l’énergie qui peut émaner de groupes comme ça, ces groupes qui ont pu être influencés par le blues, je pense à Led Zeppelin, Hendrix, même Deep Purple. Le blues est à mon sens le parrain de toutes les musiques dites actuelles.

J’ai proposé un jour à Casey de rencontrer Sergio [NDLR: Serge Teyssot-Gay] et de lui soumettre une idée sur laquelle on avait cogité, elle et moi. Notre idée était d’expérimenter et réaliser une sorte de fusion entre rock et rap, quelque chose qui ne serait pas une énième redite de Rage Against The Machine. On avait envie de travailler avec un musicien rock et à ce titre Sergio de Noir Désir était tout désigné. On avait déjà avec lui beaucoup de discussions vraiment enrichissantes. On a fait des essais ensemble pour voir comment sa guitare pouvait s’apposer à des breakbeats qui obéissent moins aux codes binaires classiques du rock, avec cette volonté de jouer d’avantage sur le pied et la basse, construire quelque chose autour de ça pour aboutir à un truc funk épais.

En dehors de Noir Désir, Sergio a un groupe qui s’appelle Zone Libre. Le groupe est composé d’un batteur et de deux guitaristes. On s’est rencontré tous les cinq et on s’est isolé en janvier dernier dans un studio à Angoulême. Ils ont pondu dix morceaux qu’on compte balancer à partir de l’été 2008. On a aussi prévu de jouer cet album sur scène.

On veut faire un projet qui soit une réponse à l’embourgeoisement complètement consommé du rock…et du rap dont on connaît la situation. On va prendre le temps de travailler ce projet qui musicalement peut vraiment être énorme. Dans un an, on découvrira la bête et ce sera alors au public de juger.

A : Ekoué, tu es le seul membre du groupe qui apparaît régulièrement ailleurs. Les autres, ça vous intéresse moins, ou ce sont des opportunités qui ne se sont pas présentées, ou… ?

P : Si, il y en a, mais il faut avoir le temps, ce qui n’est pas toujours évident, on se renvoie la balle, ça dépend… Et puis même si on est sollicités, on prend pas tous les projets, des fois honnêtement on calcule pas…

E : Comment dire… Disons que dans le milieu très rap, très parisien, les gens ont besoin de symboles, ou d’une mascotte pour chaque collectif, je sais que c’est con à dire… Au départ j’ai été pas mal sollicité, mais récemment Philippe et Hamé aussi, et puis ces derniers temps je me suis calmé, en m’éparpillant moins pour me consacrer à La Rumeur. Le dernier truc que j’ai fait, c’était avec Ludo, un mec de Sarcelles que j’apprécie, pour la compilation « Fat Staff »… Et puis bon, je suis pas une machine à écrire non plus ! Des fois, quand on écoute des couplets qu’on a posés sur un projet comme Que d’la haine, ça nous fait rire nous-mêmes ! Sauf si Casey m’appelle, les proches etc., je préfère garder ce que j’ai pour un album. Mais maintenant, avec Sarkozy au pouvoir, ça va pas arrêter.

A : On t’a entendu par exemple avec Flynt…

E : J’aime beaucoup Flynt. C’est un des rappeurs les plus prometteurs de sa génération. Il rappe simplement, il est flow, il écrit bien… Pour moi c’est vraiment du bon rap français.

P : C’est un bon rappeur, il est carré. En fait, on écoute pas beaucoup de rap français, à part nos potes, ou des gars comme Flynt… Même si ça s’arrête pas là…

A : Quelqu’un comme Oxmo ?

E : Ouais, Oxmo : indéniablement, c’est un mec qui sait écrire. La Scred Connection, j’aime bien. Kimto [Less du 9] aussi, c’est indéniablement un mec qui sait écrire, même si on a des intérêts divergents avec eux… [Suit une référence à Ol’ Tenzano, qui dérive en une mini-discussion bordélique sur le fait que le fils de Sarkozy serait producteur…].

« Les mecs comme Dieudonné, je les laisse dans les poubelles idéologiques du FN… »

Ekoué

A : La procédure judiciaire contre vous est en cours depuis cinq ans. On devine bien les problèmes que ça pose, mais inversement, est-ce que vous en avez retiré quelque chose de positif ?

E : Ce qu’on apprend surtout, c’est que celui qui a initié la procédure et qui se pourvoie en Cassation, Nicolas Sarkozy, est aujourd’hui Président de la République. Il y a eu d’autres affaires sans intérêt dans le fond, mais les médias sont friands de ce genre de spectacularisation de la violence et de l’insulte facile, ça vient nourrir les clichés, c’est vendeur. Il y a autre chose qu’on a peut-être eu tort de pas mettre en avant, c’est que La Rumeur est un groupe pluri-ethnique. Mes deux meilleurs amis, c’est des Français de souche, un Breton et un, on sait pas trop… [rires] Dans La Rumeur, il y a un métis Arabe-Polonais, un métis marocain, un guadeloupéen, notre attachée de presse est juive…

Je ne veux surtout pas tomber dans l’écueil racial. Il y a des constats objectifs : si tu es noir de peau et même si tu es diplômé, tu auras beaucoup plus de difficultés à trouver un emploi, etc. Mais le fait de racialiser toutes les questions sociales, c’est justement le danger des cinq ans à venir, notamment dans le rap. On se bat contre ça. Les mecs comme Dieudonné, je les laisse dans les poubelles idéologiques du FN… Et c’est ces mecs qu’on va mettre en avant aujourd’hui.

Si on gagne ce procès, si le jugement en Cassation fait jurisprudence, on pourra dire que le ministère de l’Intérieur ne fera pas état des centaines de nos frères abattus sous les balles de la police, sans qu’aucun des assassins n’ait été inquiété. Là, on est vraiment sur le terrain politique pur, pour le coup subversif et dangereux, même si j’aime pas trop cette rhétorique de « l’ordre établi », ou simplement d’une corporation comme la police. On est allés défendre notre cause dans les médias, ça s’est toujours mal passé dans le sens où on restait sur nos positions. Chez Ardisson, on s’est retrouvés devant Malek Boutih, Hamé l’a mouché ; chez Fogiel, impossible d’en placer une, le seul truc qu’il voulait c’est que tu répondes par oui ou par non. On s’en fout, on cherche pas le consensus et on sait que notre point de vue est minoritaire ; on essaie au moins de conforter les gens de la culture hip-hop, ceux qui comprennent nos codes, et si les autres nous rejoignent, tant mieux.

A : Le procès vient du magazine, et vous avez prévu d’en sortir un troisième numéro. Quelles sont vos motivations, et quel contenu est prévu ?

E : Une ébauche est prévue dans le sens où on pense distribuer un tract sérieux, un bel objet pour le concert au Trabendo. Il annoncera un peu le magazine, avec une espèce de charte. Pour cinq ans, on a Sarkozy au pouvoir, les supputations sont terminées. Et ce qui va se passer, c’est grave. C’est pas de l’idéologie de comptoir : c’est le candidat du patronat, ça va être la politique des Dassault, des Lagardère, des Bolloré, des Bouygues. Au niveau des disparités sociales, l’écart entre les riches et les pauvres et la disparition de la classe moyenne vont s’accroître à une vitesse et une violence… Donc pour tenir les gens au calme, il va y avoir de plus en plus de flics, mais la police ça sera aussi, comme dit Hamé, TF1 et son bourrage de crâne idéologique, c’est aussi eux le pouvoir institutionnel. Et les années qui viennent seront américanisées…

A : … Il a déjà fait très fort avec l’enchaînement Fouquet’s et vacances sur le yacht de Bolloré à Malte [NDLR : deux jours et demi dont le tarif normal est évalué à dix-sept ans de SMIC par l’Association de défense des chômeurs et précaires]

E : Même les parrains de la Mafia dans les pires scénarios d’Hollywood n’affichent pas une telle arrogance le jour du sacre. Et finalement tout le rap bling-bling… J’ai même pas envie de rentrer dans la discussion tellement ça me paraît insignifiant… Et là, ça se sent dans les quartiers, c’est tendu. Il y a des mecs qui ont vraiment le sentiment qu’on leur a mis profond.

A : De toute façon, son premier discours annonce le retour à la morale et à l’ordre : pas besoin d’une grande explication pour savoir ce qu’il va faire… Pour revenir à La Rumeur, on a évoqué un aspect imagé, « cinématographique », ça fait partie de l’identité du groupe ?

E : Les gens qui nous écoutent depuis le premier volet savent qu’on a un champ lexical et une façon d’aborder les thèmes stéréotypés, d’avoir une « élasticité » qui fait que tu peux tenir une conversation dans des milieux très différents. Et les images, j’essaie de les choisir et de les interpréter pour qu’elles collent aux facettes de ma personnalité. C’est l’expression de tout à l’heure, « du cinéma pour aveugles »…

Finalement, il y a en gros cinq textes qui sont essentiels dans notre discographie, c’est ‘Blessé dans mon ego’, ‘Le Hors Piste’ (même si personnellement je préfère ‘Le Pire’, un des meilleurs textes d’Hamé), ‘365 cicatrices’, ‘Qui ça étonne encore ?’, couplé avec ‘Premiers sur le rap’, parce que c’est nous aussi. Si tu regardes en profondeur, ça donne différents univers, pas aussi catégoriques que ceux dans lesquels les médias essaient de t’enfermer.

Si aujourd’hui on dit que Du coeur à l’outrage est le meilleur album de La Rumeur, c’est que… Disons qu’après la première trilogie et L’ombre sur la mesure, le côté « rap conscient sur boucles de jazz » était éculé. Je comprends tout à fait que la transition avec Regain de Tension ait pu frustrer. Mais on avait envie de sortir de ça, d’aller vers des choses plus électriques. Et puis sur scène, ça a un autre impact, ça fonctionne tout de suite et on s’éclate sur les morceaux de Regain de Tension. Du coeur à l’outrage, c’est la quintessence, le point culminant de ce qu’on a voulu faire, sans tomber dans la redondance artistique. Si on a sorti en premier ‘Non sous-titré’, c’est parce qu’on savait que c’était pas un morceau facile, qui dérouterait, que certains aimeraient mais qui laisserait d’autres sceptiques. Et c’est sur scène que tu te rends compte de toute l’efficacité d’un morceau comme ça, qui a l’air de rien. Du coeur à l’outrage, c’est un album somme, sans être une synthèse des précédents. Un truc à la fois carré et fort. A la réécoute, on aurait pas fait autrement.

La Rumeur est un groupe qui vend entre 35.000 et 60.000 disques. C’est énorme, compte tenu du fait qu’on passe pas en radio. Pour vendre des disques aujourd’hui, il faut passer à la radio, c’est clair et net ; les beaux discours, c’est pas ce qui fait vendre des disques. Je m’explique pas vraiment comment les deux premiers albums ont vendu autant, même avec le procès et l’actualité médiatique, donc il doit bien y avoir un truc en plus, qui fait qu’un an plus tard on continue à les vendre. On a fait beaucoup de tournées… Je pense qu’au bout d’un moment, l’intégrité est concluante, et l’opportunisme ne paie pas, même si tu as du talent. Et puis le hip-hop c’est une culture complexe, c’est pas un truc d’écervelés.

A : Comment tu expliques la disparition d’une presse hip-hop de qualité ?

E : Même les magazines de merde se cassent la gueule… Le dernier magazine correct c’était « Radikal ». Je l’ai beaucoup critiqué à une époque, mais je dois reconnaître que Cachin et Protche avaient ramené une ligne avec des articles sérieux… Sinon… voilà.

A : Puisqu’il y a toujours un lendemain, quels sont les projets à venir ?

E : Il y a un DVD du live de l’Elysée-Montmartre agrémenté d’autres trucs, et normalement un DVD avec MK2 une fois mis d’accord sur des questions contractuelles. Hamé va à New York pour y faire sa première année de thèse, sur le cinéma. Philippe et moi, on réfléchit à des projets solos pour l’année prochaine.

P : Maintenant on a le label qui nous permet de nous produire, espérons qu’il grossisse pour qu’on puisse, pourquoi pas, avoir d’autres signatures…

E : Avec Casey, on a vraiment envie de faire un album ensemble, mais après c’est une question de temps. Mais il y aura plusieurs albums de type « mix-tape », au moins deux d’ici la fin de l’année. Le site sera une grosse plate-forme. Et puis la rentrée, le procès…

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