Chronique

Promoe
The Long Distance Runner

David VS Goliath - 2004

« It’s 2004 : last year Tony and George started the war of thewhores. Same year and the year before, plus the year before that, me and theTroop were on constant tours. »

Voilà de quoi planter ledécor. En 2004, Promoe, membre le plus en vue de Looptroop (groupe suédoisrappant en anglais), donne suite au très bon « Government Music » : « The Long DistanceRunner », métaphore de son goût pour les tournées interminableset de sa conception du rôle du emcee – un porte-voix doublé d’unmarathonien.

Les premières écoutes sont plutôt désarçonnantes, carsi l’on sentait une très nette influence reggae chez Promoe, on nes’attendait pour autant pas à ce qu’il explore cette voie de manièreapprofondie. Partiellement enregistré en Jamaïque, « The Long Distance Runner » baignedans cette atmosphère, des lyrics à la rythmique, des gimmicks à la listedes invités – le crew Ward 21, Bushman et Anthony B notamment. En dehors dela surprise que suscitent certains titres, tous ces éléments concourent àassurer à Promoe la sympathie de l’auditeur : le MC suit ses enviesartistiques, étonne, intrigue, développe une identité forte ; pas de doute,nous tenons là un artiste qui prend des risques. Certes, tout n’est pasréussi : ‘In The Jungle’ lasse rapidement, de même que ‘Fast Food World’et ‘Mah Grrrl’, malgré un excellent premier couplet ; mais l’intention estlà et c’est, dans ce cas, l’essentiel. Ayant clairement décidé de se faireplaisir, le MC suédois va jusqu’à s’offrir le luxe de reprendre le mythique’Fit You Haffe Fit’ de Black Uhuru. Bien qu’en deçà de l’original, lerésultat est d’une efficacité redoutable.

Orientation artistiqueoblige, Embee (le beatmaker de Looptroop) est moins présent qu’àl’accoutumée. Mais s’il ne signe que trois instrus, ceux-ci sontreconnaissables dès les premières notes : enchevêtrements de samples courts,travail particulier sur les voix, kicks rebondissants comme des ballons debasket ou comme les balles de ping-pong de ‘DM-87′ ; hormis le décevant’Calm Down’, il fait mouche à chaque coup.

Outre l’habituel hymneaux graffiti-artists auquel Promoe nous a habitués (‘These Walls Don’tLie’, « palapapapapaaa »), les textessont globalement contestataires, avec des tendances altermondialistesmarquées : dénonciation José Bovesque de l’industrie alimentaire (‘FastFood World’), de la guerre en Irak (‘KKKampain’, déboulonnant la »novlangue » de la Maison Blanche), protest-songs et constats larges(‘Justice’, ‘Dog Day Afternoon’, ‘Constant Consumption’). On pourrareprocher au MC l’angle d’attaque parfois trop généralisant voire presquenaïf, mais ses qualités d’écriture et son flow énergique font passer cesremarques au second plan. Les morceaux plus légers, comme ‘A Likkle SupmSupm’, sont autant de réussites.

Œuvre d’un artiste suivant sesenvies et profitant de ses escapades solo pour « tenter des choses », « The Long DistanceRunner » est un très bon disque. Promoe mêle avec bonheurreggae et rap, toaste, change de flows (voir son terrible couplet sur ‘DogDay Afternoon’ pour s’en convaincre), s’affranchit de son style habituelet prend ainsi l’auditeur à contre-pied – bref, il évolue. Surprenant puisconvaincant, l’album se révèle au fil des écoutes être une francheréussite, quelques titres imparables (‘These Walls Don’t Lie’, ‘A LikkleSupm Supm’, ‘Fit You Haffe Fit’, ‘Long Distance Runner’) et beaucoup debons morceaux effaçant aisément les quelques déceptions.

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