Sidekicks

Des nouvelles de MF Doom, en veux-tu, en voilà. On peut d’abord entendre le rappeur masqué sur « Lil Mufukuz », extrait du nouvel album de Dabrye, Three/Three, qui sort dans quelques jours et sur lequel on trouve d’autres pointures bien connues de nos services, de Ghostface à Jonwayne en passant par Roc Marciano. Ensuite, le duel auquel on ne croyait que moyennement aura bien lieu : Czarface (alias Inspectah Deck + 7L & Esoteric, excusez du peu) affrontera Metal Face. Un premier extrait en guise de preuve est à l’écoute : « Nautical Depth ». L’album comportera 14 titres, avec pour invités – dans deux genres bien différents… – Open Mike Eagle et Vinnie Paz.

On a eu l’occasion d’en dire beaucoup de bien lors de notre bilan de fin d’année : l’album Laila’s Wisdom de Rapsody est une oeuvre léchée, mûrie, autant que légère et souple, portée par la sagesse et la malice de son auteur. La rappeuse de Caroline du Nord vit depuis la sortie de son deuxième long format une période enchantée, après plusieurs années de travail dans l’ombre. Sa récente nomination aux Grammy Awards dans la catégorie album rap en est l’une des preuves, tout comme l’unanimité critique et la validation de ses nombreux pairs, de Busta Rhymes à Cardi B.

Rapsody vient prendre la température dans nos contrées européennes le temps d’une tournée. Elle passera sur Paris le 28 février prochain, à La Bellevilloise, accompagnée par le producteur et patron de son label Jamla Records, 9th Wonder, ancien compositeur du groupe Little Brother. Un concert qui devrait tenir ses promesses aperçues sur ses albums, notamment avec des titres comme « Sassy » ou « Pay Up ». On vous fait gagner 2 x 2 places pour l’occasion. Rendez-vous sur notre page Facebook.

Depuis 2012 et Le Tunnel, Le C.Sen a passé un peu de temps à « rafistoler sa vie. » Sa présence sonore était rare. Quelques graffitis, comme toujours, sur les murs de la capitale, indiquaient pourtant bien que l’anti-héro préféré du dix-huitième arrondissement rodait encore dans les parages, avec cet adage qu’il avait laissé dans l’entretien qu’il nous avait accordé en 2010 : « on veut faire de nous des chiffres, alors je me transforme en tag, je deviens une lettre. » Cet art du contre-pied, C.Sen le manie aussi bien bombe de 400ml en main qu’au micro. Le premier extrait de son album à venir en est la preuve. Encore une fois Pierre Cesseine y découpe le quotidien en petites phrases poétiques et déconstruit la ville lumière avec un calme tranchant. L’album s’appellera Vertiges et son premier extrait est bien nommé tant durant quatre minutes, il condense, lucidité, classe et élégance, jusque dans ses moments d’engagements. Le ton est calme mais le flow y est singulièrement syncopé, avec plusieurs structures rythmiques qui s’imbriquent sur une production de l’inconnu Keno (qui produira tout l’album). Le tout forme une foule de portraits gris argentés, aussi bien celui d’un C.Sen serein que d’un monde désenchanté. De quoi prendre date pour la sortie de ce long format, prévue pour ce printemps, et le concert à la Boule Noire, d’ores et déjà programmé au 3 mai. Cette fois, c’est la bonne. Avec ou sans commentaires, les quatre dernières années d’attente et de projets avortés ne sont désormais qu’affaires classées.

Un jour, L’Abcdr devra partir à la rencontre de DJ Hitch. À la fin des années quatre-vingt-dix et au début des années deux mille, ce dernier donnait des cours dans le magasin DMC basé à Bastille. À condition d’être assidu, chacun de ses élèves est ressorti de ses cours avec un niveau plus élevé. C’est ainsi que Hitch a enseigné les bases techniques du turntablism à quelques  DJs français aujourd’hui très réputés. Parmi eux ? DJ Stresh, qui sera aux platines de L’Étage, ce vendredi 2 février. Et vous pouvez avoir confiance et même relire le long entretien que Stresh avait accordé à L’Abcdr il y a de ça dix-huit mois : entre sa culture du digging confortée par son passage chez T-Maxx, ses performances récentes en championnat de turntablism, son bagage scénique avec des rappeurs tels Youssoupha, A2H ou JP Manova, et surtout son expérience des clubs avec le crew Hello Panam, Stresh, qui partagera l’affiche avec DJ Mas, sera l’homme de la situation pour vous faire passer une bonne soirée. Après-tout, n’est-ce pas lui qui nous disait essayer de cultiver la culture de la Block Party et toujours laisser une place à la spontanéité dans ses sets ? Des places sont à gagner sur notre page Facebook pour cette nouvelle édition des Night School. Rendez-vous vendredi !

Friand de métaphores météorologiques, mais aussi de weed et de photographie, Evidence clôture avec Weather or Not sa série Weatherman. Au vu des extraits dévoilés en amont de cette sortie signée Rhymesayers, l’objet qui sort ce 26 janvier était attendu. « Jim Dean » avait retourné son monde avec la production de Nottz. « 10,000 Hours » a vu un DJ Premier grandement inspiré. Quant à Ev’, il avait tiré le plus pur substrat de son alias de Mr Slow Flow sur ces deux titres. Et c’est peu dire que l’album est à la hauteur. Entouré d’un casting hors norme, avec évidemment ses équipiers de Dilated Peoples que sont Rakaa et Babu, mais aussi Slug, Styles P, Alchemist, Jonwayne ou encore Krondon et Defari (d’ailleurs, la présence de ces deux derniers nous ont faits nous dire que tant qu’on y était, DJ Muggs aurait dû être de la fête), Michael Perretta porte au sommet l’art de la force tranquille. Weather or Not est de ces disques qui résistent aux coups de soleil, aux tempêtes et aux bourrasques que le rap propose. Bref, tout le potentiel pour être intemporel.

Andy Cooper ne cesse de rebondir. En toute discrétion bien sûr, car même si son ancien groupe, Ugly Duckling, avait sa petite réputation, cela restait de l’ordre du succès d’estime. Après un album, Room to Breathe, sorti en 2016, et une collaboration soutenue avec les anglais de The Allergies, Andy C. continue d’asseoir sa trajectoire solo. Ce vendredi 26 janvier sort The Layered Effect, son deuxième LP en son nom propre. Pas de surprises au programme : entre fast flow et grooves à l’ancienne, productions lorgnant vers les boucles chaudes et ne se cachant pas d’influences telles que les Beastie Boys ou même Sugarhill Gang (!), l’ancien Ugly Duckling manie à la perfection les fondamentaux. Et parsème le tout de ses thèmes et attitudes de prédilection : une critique de l’évolution du rap (on ne se refait pas), un côté dégingandé, faussement benêt et nonchalant mis en images, un discret recours à la spiritualité devant les excès du monde et une ode au origines du hip-hop. La preuve avec les clips de « Can’t be Satisfied » et surtout de « Here Comes Another One ». La vidéo, pleine d’autodérision, confronte le Paris romantisé et glamour des années vingt à un Andy Cat qui adore plus que tout se faire passer pour un intrus dans le rap. Il est ici accompagné de BlabberMouf, et c’est l’occasion de découvrir l’extraordinaire Da Flowin Dutchman’ dont l’album est également chaudement recommandé.

Sample !, avec son point d’exclamation qui sonne comme un mot d’ordre, est le titre du premier livre en français exclusivement dédié au sampling dans le hip-hop. Comme c’est généralement le cas dans cette collection, l’auteur, Brice Miclet, débute par une étude générale, abordant divers aspects le long d’un développement chronologique, avant de s’attarder sur 100 exemples, incontournables ou méconnus, qui amènent de Cloud One samplé par/pour Spoonie G (1979) jusqu’à Billy Paul samplé par/pour Kendrick Lamar (1976/2017). Passionnant, comme d’habitude chez Le Mot et le Reste.

Ce 19 janvier est parue la mixtape War for Peace du beatmaker de Corbeil Boudj, annoncée il y a plus d’un an avec les morceaux d’Hugo TSR et de Swift Guad. Dix-huit tracks dont des réussites attendues (Joe Lucazz) et surprenantes : le son de Shétif, inédit parmi une poignée de vidéos YouTube, offre une alliance touchante entre la voix du MC et le sample choisi. A l’image de toutes les productions de la compilation : si le projet ne se caractérise pas par une ligne unificatrice, les instrus collent à souhait non seulement avec l’esprit indé étiqueté Paris Nord, mais aussi avec le style du MC correspondant, signe de l’amplitude de la maîtrise et de la sensibilité musicale de Boudj. Ici, pas de featurings ni de hiérarchie qui tiennent : Hugo, Sëar, Pand’or, Spike la Pioche, les anciens, les jeunes, les connus, les anonymes, ont droit à leur track à eux tous seuls. Salutations à Slob design pour la cover de qualité qui rejoue en images l’antagonisme du titre; à DJ Azer, Rash et DJ S’One pour les scratches. War for Peace oppose à l’union sacrée de « Charlie », plusieurs fois rayé de la liste des invités tout au long du projet, une authentique union de la galère.

Il y a trois ans, Pone, producteur de la Fonky Family, revenait avec nous sur sa carrière, et racontait les débuts de sa vie avec la maladie de Charcot. Depuis, comme on l’a appris dans un émouvant portrait publié dans le journal La Croix, Pone est cloué dans un lit. Grâce à sa famille et sa foi, Guilhem Gallart continue de vivre, quoi qu’il arrive, communiquant grâce à ses yeux, en écrivant sur un clavier virtuel. Sur son compte YouTube, Pone met en ligne des instrumentaux qu’il avait gardé en stock pendant sa quinzaine d’années de créativité. Il y a quelques pépites, comme « BBOY City », un hommage électro-funk qu’il avait composé pour DJ Mehdi. Il a aussi récemment entrepris de classer ses dix titres préférés de la Fonky Family, en racontant sous chaque vidéo des anecdotes sur la création des morceaux. L’occasion de découvrir ou redécouvrir des morceaux rares de la FF, comme « Cherche vraiment pas à comprendre » ou « Envie de croquer le monde », sortis uniquement en maxi.

L’album en commun avec O.C., Perestroïka (très bon, soit-dit en passant), est encore tout chaud. Mais Apathy a déjà délaissé le rideau de fer pour partir à la conquête de l’espace, histoire d’y faire des rencontres extraterrestres, façon Kool Keith (honoré d’un clin d’œil). D’où le single « Alien Weaponry », en écoute ci-dessous.