Mayer Hawthorne
Interview

Mayer Hawthorne

Producteur hip-hop devenu révélation soul de l’année 2009, Mayer Hawthorne est encore tout surpris du plébiscite accordé à son premier album, le classieux « A Strange Arrangement ». De passage à Paris, ce fier représentant de la ville de Detroit nous a raconté son étonnante transformation.

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Abcdr du Son : Avant de te faire appeler Mayer Hawthorne, ton premier nom de scène était paraît-il Haircut. Quel en est l’origine ? 

Mayer Hawthorne : C’était mon surnom. Mayer Hawthorne, c’est quelque chose de très nouveau pour moi, alors qu’on m’a appelé Haircut toute ma vie. A ce jour, mes parents m’appellent encore comme ça. Ça remonte à ma petite enfance. J’avais deux ans, et à chaque fois que mes parents voulaient m’emmener chez le coiffeur, je tapais ma crise. Il n’y avait rien à faire, je détestais me faire couper les cheveux. Pour mes parents, le seul moyen de me faire taire c’était de m’acheter des disques. C’est comme ça que j’ai commencé à les collectionner.

A : Quels ont été les premiers disques qu’on t’a offerts ? 

M : Des 45 tours, ‘Let’s groove’ d’Earth Wind and Fire, The Cars, Blondie, ‘Another one bites the dust’ de Queen, des trucs de la Motown comme les Temptations, les Four Tops… Et puis tous les trucs populaires de l’époque.

A : Au-delà de la soul, tu as aussi une longue histoire avec le hip-hop…

M : Une très longue histoire. Le hip-hop était ma priorité quand je me suis lancé dans le projet Mayer Hawthorne. Faire de la soul n’était qu’un projet annexe. Mais je suis très heureux de ce que je fais aujourd’hui, l’expérience Mayer Hawthorne est incroyable. Je prends mon pied, et d’ailleurs j’écris déjà des chansons pour mon prochain album. Cela dit je reste un mec du hip-hop et je vais continuer à en faire.

A : Peux-tu résumer ta carrière dans le hip-hop ? 

M : J’ai débuté dans un groupe appelé Athletic Mic League. On a sorti trois albums à Detroit. Pour le dernier, Jungle Gym Jungle, on était signé chez Barack Records, le label de Slum Village. Quand le groupe a commencé à ralentir un peu, j’ai rejoint un autre groupe, Now On. On a sorti deux albums. Le plus récent, Tomorrow Already, est sorti l’année dernière. J’en suis extrêmement fier. Avec ce disque, je pense qu’on a vraiment crée un son très particulier, à la fois très hip-hop, très soul, mais nouveau. Moi-même, je n’ai jamais rien entendu de tel, c’est une chose très difficile à accomplir.

A : Et ça sonnait comment ? 

M : Je ne vois pas quelle comparaison je pourrais faire, il faudrait que tu écoutes pour juger sur pièces. C’est très électronique et très mélodieux. J’ai beaucoup chanté sur ce disque, ça m’a beaucoup aidé à faire la transition vers Mayer Hawthorne.

A : Cette transition a-t-elle été naturelle ? 

M : Ce n’est pas facile, vraiment pas. Aujourd’hui je pense avoir mes marques, j’ai trouvé le truc. Je suis le genre de type qui se pose et qui tente des choses. J’enregistre tout chez moi, dans mon appartement à Los Angeles. Je vais jouer et rejouer et rejouer, jusqu’à ce que ça sonne juste. Quand j’enregistrais Mayer Hawthorne, je cherchais encore à comprendre ce que je faisais, il n’y avait pas de formule. Aujourd’hui, je crois que je la tiens.

A : Ce n’est pas un peu frustrant de rencontrer le succès avec un album soul quand on a fait du hip-hop toute sa vie ?

M : D’une certaine façon, ça l’est, car j’ai fait du hip-hop pendant si longtemps, mais c’est ce projet annexe qui attire toute l’attention. Cela dit, je suis aussi fier de mes projets hip-hop que de mon projet soul. Avec un peu de chance, les gens vont pouvoir commencer à chercher ce que j’ai fait avant. En fait ça m’importe peu, à partir du moment où je peux vivre de ma musique. Les choses sont ce qu’elles sont, il faut faire avec. Je continue à faire toute sorte de musique : je bosse sur un album de new wave avec 14KT [NDLR : producteur du Michigan], j’ai aussi un projet avec Jake One. Il y a les nouveaux albums d’AML et Now One. J’ai fait aussi des sons avec Snoop Dogg, Ghostface et Freeway…

A : Tu devrais faire un album entier avec Ghostface, ce serait mortel.

M : On en a justement parlé, c’est ce qu’il a envie de faire.

A : Ce qui est étonnant, c’est que tu dis avoir tout fait à la maison alors que l’album a une densité sonore très forte. Es-tu un fana de matériel audio ? 

M : Je fais toutes mes sessions d’enregistrement et de mix moi-même, mais je ne suis pas un ingénieur de son hyper calé. Je n’ai suivi aucun cours, j’ai tout trouvé par moi-même. Beaucoup de professionnels se marreraient surement en voyant avec quoi je m’enregistre, mais je ne sais pas faire autrement !

A : Tu as la réputation d’être un accroc du vinyle. Tu as une grosse collection ? 

M : Trop grosse ! Je n’ai plus assez de place. Il faut que je me trouve un appartement plus grand car je ne sais plus où ranger mes disques. Je dois en avoir 6000 ou 7000.

A : Y a-t-il une pièce de ta collection à laquelle tu tiens particulièrement ? 

M : L’une de mes préférées, c’est une copie du Love Deluxe de Sade. Ce disque n’a jamais été pressé en vinyle aux États-Unis, je crois que ma version est coréenne. C’est simplement un disque que peu de personnes possèdent en vinyle. J’ai eu du mal à mettre la main dessus. C’est un disque important pour moi, mais chaque disque a sa propre histoire. Pour moi, le prix n’a pas vraiment d’importance, les disques que j’aime le plus sont ceux qui ont une vraie signification pour moi. Je me rappelle, je diggais à Cologne, en Allemagne, avec Peanut Butter Wolf quand je l’ai trouvé. Je m’en souviendrai toujours.

A : Toi qui est un fan de Sade, sais-tu où elle est passée ? [NDLR : L’interview a eu lieu avant l’annonce de la sortie d’un nouvel album]

M : Bonne question, j’aimerais bien pouvoir y répondre ! J’en parlais justement il y a peu. Il y a un vrai vide à la place qu’occupait Sade dans le monde de la musique.

A : Quel est ton point de vue sur le débat « Vinyle contre Serato » ? 

M : J’utilise les deux. Je suis évidemment un amoureux du vinyle, je pense que la musique y sonne bien mieux mais je n’ai pas non plus peur de la technologie. Serato, c’est mortel. Je peux débarquer à Paris avec un simple ordinateur portable et passer du son pendant six heures d’affilée. C’est une chose incroyable ! Mais à choisir, si je ne pouvais passer que des vinyles, je le ferais.

« Beaucoup d’ingénieurs du son se marreraient en voyant avec quoi je m’enregistre, mais je ne sais pas faire autrement ! »

A : On dit que Mayer Hawthorne est ton nom « d’acteur porno »…

M : Quand j’ai commencé à faire des titres soul, il me fallait un alias. Donc j’ai dit « Voilà mon nom d’acteur porno !« . Très honnêtement, je n’ai jamais pensé que ces chansons pourraient sortir sur un label. C’était juste pour le fun. J’ai appelé ça « Mayer Hawthorne » mais je me suis dit que personne ne d’autre que moi ne connaîtrait ce nom. L’accueil réservé à ce projet dépasse très loin tout ce les gens avaient imaginé. Même Peanut Butter Wolf. Quand on a sorti le premier single, on a juste pressé 1000 copies car absolument personne n’avait entendu parler de Mayer Hawthorne. On était incapable de dire si quelqu’un allait aimer. Mais c’est la grande qualité de Stones Throw : ils s’en tapent. Peu importe que ce soit un succès ou pas, ils sortent les disques qu’ils trouvent cools, tout simplement. On a pressé 1000 exemplaires, et ça explosé.

A : Comment as-tu connu PB Wolf ? 

M : Je l’ai rencontré dans une soirée à l’époque où j’ai déménagé à Los Angeles. Une amie commune nous a présenté. Elle avait déjà entendu mes démos mais moi, je ne prévoyais pas de les sortir. Je voulais être un producteur hip-hop et un DJ, c’était ça mon objectif. Quand elle a fait les présentations, elle a dit à PB Wolf : « Il faut que tu écoutes ses chansons ». Je lui ai envoyé sans trop d’espoirs. Six semaines plus tard, il m’a envoyé un mail : « Hey, je viens d’écouter les morceaux, elles sont géniales, c’est quoi ?« . Je lui ai répondu « Ce sont mes chansons soul« . Il n’a pas compris. « Comment ça, tes chansons ? Tu veux dire que tu as les droits pour les rééditer ?« . Il croyait que j’avais retrouvé des vieux disques, il n’arrivait pas à croire que j’en sois l’auteur. Il m’a donc demandé l’autorisation de les sortir sur Stones Throw et j’ai dit oui. Deux morceaux, pas plus. Mais quand il m’a envoyé d’un contrat, il était question d’un album entier. Je l’ai rappelé en lui disant qu’il avait du faire une erreur car je n’avais que deux titres en stock. Il m’a dit « Que dirais-tu de faire tout un album pour nous ?« . Je n’y avais jamais pensé auparavant, mais quand c’est Peanut Butter Wolf qui te fait cette proposition, tu ne peux pas dire non.

A : Qu’est-ce qui t’avait poussé à quitter Detroit pour L.A. ? 

M : Je voulais vivre de ma musique. Malheureusement, c’est une chose quasi-impossible à Detroit car les opportunités sont trop rares. L’industrie du spectacle a disparu. C’était donc soit New York, soit Los Angeles. J’avais déjà vécu à New York pendant un an, c’était cool, mais j’avais besoin de nouveauté.

A : Quel était ton plan ? 

M : Je suis parti avec mon groupe, Now On. On voulait se faire une place sur la scène hip-hop. Et on y est arrivé, tout se passait vraiment bien pour nous. On faisait des gros concerts, les Beat Junkies et tous les gros DJ locaux passaient nos morceaux… Et puis tout à coup, je rencontre PB Wolf, et là changement de programme.

A : Comment les membres du groupe ont réagi ? 

M : Je pense qu’au début, ça a du les inquiéter un peu. Mais ils connaissaient Stones Throw, and ils savaient que c’était une super opportunité pour moi. Ce ne sont pas seulement les membres de mon groupe, ce sont d’abord mes meilleurs amis, donc tout ce qui pouvait m’arriver en bien était bénéfique pour Now On. Ils m’ont beaucoup soutenu. D’ailleurs Jackson, l’un des membres du groupe, est devenu mon manager.

A : Tu as le mal de Detroit ? 

M : A mort. Ma famille me manque énormément. Je n’ai plus beaucoup l’occasion d’aller à Detroit, je suis toujours sur la route. Moi qui suis gourmand, je suis en manque car tous mes plats préférés sont de Detroit.

A : C’est quoi les spécialités locales ? 

M : [d’un air affamé] Les chili dogs ! Là bas on les appelle Coney dogs. Il y a un restaurant dans le centre de Detroit qui s’appelle Lafayette Coney Island, ça doit être le truc de Detroit qui me manque le plus !

A : Tu as grandi dans quel coin ? 

M : J’ai grandi à Ann Harbor. C’est à 40 kilomètres à l’ouest de Detroit, à proximité de l’université de Michigan. L’ambiance n’est pas du tout la même qu’à Detroit mais c’était suffisamment proche pour que j’aille y jouer régulièrement. J’allais digger en ville chaque week-end.

A : Ces dernières années ont été cruelles pour Detroit. On a l’impression que la ville est maudite…

M : C’est vraiment dur en ce moment. L’industrie automobile s’effondre alors qu’elle constitue le cœur même de Detroit. L’économie est au fond du trou, beaucoup trop de gens n’ont plus d’emploi. Il va falloir du temps pour que la ville panse ses plaies. Ça me tue de voir ça car cette ville, c’est mon cœur. Mais ça et là, on avance. On a trop compté sur l’automobile, maintenant il faut trouver autre chose à faire. Cette ville a une grande histoire et les gens ne s’y laissent pas abattre. Je ne crois pas qu’il y ait des gens plus courageux au monde qu’à Detroit. Ils accumulent les tuiles les unes après les autres mais tant pis, ils avancent quand même. Notre équipe de football américain, les Lions, a été la plus nulle de tout le championnat pendant ces vingt dernières années ! De toute mon existence, on n’a pas gagné un seul match de playoffs. Mais le public s’en fout, il va quand même au stade. Chaque année, les gens supportent l’équipe comme jamais, toutes les places sont prises. Il y a du cœur dans cette ville. Les gens ont toujours travaillé dur, alors ils reviendront. Ça va seulement demander beaucoup de temps.

A : La scène hip-hop a aussi perdu pas mal de ses membres emblématiques…

M : C’est désolant. La perte de J-Dilla… Il était le plus grand producteur de tous les temps mais bon, maintenant il faut qu’un nouvel artiste arrive et soit le nouveau J-Dilla. Il faut avancer. Tellement de grands musiciens de Detroit sont morts, pas seulement dans le hip-hop. A chaque fois qu’on apprend qu’un autre artiste est décédé, c’est genre « Oh non, pas encore… ». Mais c’est la vie.

« C’est le truc incroyable de Stones Throw : non seulement ils sortent des projets mortels, mais en plus, humainement, ils sont au top. »

A : Sur une note plus légère, quelles relations as-tu avec les autres artistes du label Stones Throw ? On dit que c’est un peu une petite famille…

M : Nous sommes tous très proches. J’ai beaucoup de respect pour tous ces artistes et j’aime sincèrement leur musique. James Pantz et Dâm Funk font partie de mes artistes préférés en ce moment, et en plus ce sont des gens vraiment biens. C’est le truc incroyable de Stones Throw : non seulement ils sortent des projets mortels, mais en plus, humainement, ils sont au top.

A : Quelle relation as-tu avec Peanut Butter Wolf ? 

M : Il est devenu l’un de mes meilleurs amis, je n’ai même plus l’impression que c’est mon patron. On s’appelle pour parler de tout et de rien. Avoir ton boss pour ami, ça n’arrive pas tous les jours. C’est une expérience incroyable.

A : Pour un artiste comme toi, un label comme Stones Throw, c’est une situation presque idéale…

M : Complètement. On s’est vraiment bien trouvé. Ce qui est cool, c’est que Stones Throw a lancé ma carrière, et désormais j’aide Stones Throw à aller plus loin qu’ils ne sont jamais allés. C’est génial.

A : A l’écoute de l’album, on se demande par moment si tu n’as pas utilisé quelques samples ici et là…

M : Il n’y en a aucun. Mais c’est cool que tu ne puisses pas voir la différence !

A : As-tu appris la musique par le sampling ? 

M : Complètement. J’ai appris beaucoup en creusant des morceaux de Pete Rock, Alchemist, Premier, Madlib ou Dilla. Je voulais connaître l’origine des samples.

A : As-tu pris des cours de solfège ? 

M : Je suis autodidacte. Mon père m’a appris à jouer de la basse quand j’étais petit et lui-même n’avait jamais pris de cours. J’ai suivi des leçons de piano et de batterie mais tout était trop structuré pour moi. Je préfère expérimenter par moi-même, trouver la solution tout seul. D’ailleurs, je ne sais toujours pas écrire la musique sur une partition. J’entends la musique d’une manière limpide dans ma tête, je devine comme la jouer et je la joue. J’entends chaque élément – batterie, basses, harmonies, cordes – et je me le passe en boucle dans ma tête. Ensuite j’isole chaque détail et je les sors un par un sur les pistes audio.

A : En travaillant comme ça, comment fais-tu pour ne pas perdre des chansons en cours de route ? 

M : Il y a de belles chansons que j’ai oubliées et qui ont disparu à jamais. Depuis, j’ai acheté un enregistreur [il montre son iPhone]. J’ai beaucoup de morceaux là-dedans.

A : Y a-t-il un secret à la formule Mayer Hawthorne ? 

M : Le secret, c’est que je n’ai pas de budget. Je n’ai pas les moyens de me payer du bon matos d’enregistrement alors j’utilise les trucs les plus pourris qui existent. La plupart des outils modernes sont trop bons, il n’y a plus aucune aspérité dans la musique. Tout est trop propre. La chaleur de la vieille soul, c’était la poussière, la saleté… Cela dit j’admire Dr Dre. Il est l’un de plus grands mixeurs de l’histoire. Sur un plan purement sonore, sa musique est incroyable. J’aimerais mixer mes sons comme lui. Lui et Dilla font partie des plus grands. Et ce qui fait leur talent, c’est qu’ils comprennent très bien le son. Ils connaissent la façon dont fonctionnent le spectre sonore. Ils savent ce que les humains entendent.

A : Qu’est-ce qui différencie la production d’un titre hip-hop et celle d’une chanson soul ? Fais-tu une différence entre les deux ? 

M : Le hip-hop s’est approprié le terme « producteur » et l’a un peu vidé de son sens. Un producteur de musique est bien différent de l’image que s’en font les producteurs hip-hop. Beaucoup se disent producteurs alors qu’ils ne sont que des beatmakers. Et entre les deux, il y a une grosse différence. J-Dilla était un producteur. Il ne se contentait pas de faire des instrus, il comprenait comment construire un titre autour d’un artiste. C’est ce qui définit le travail d’un producteur.

A : A quel moment penses-tu être passé du stade de beatmaker à celui de producteur ? 

M : En travaillant avec Athletic Mic League, car ils sont vraiment différents. Chacun a un style bien à lui. Ce sont des gens bien élevés et très créatifs. On essaie toujours de repousser les limites et d’aller vers l’inédit. Notre dernier album est sorti en 2004. Si tu le réécoutes, même aujourd’hui, il est encore en avance sur son temps. A l’époque de sa sortie, les gens ne l’ont pas compris, et je ne pense pas que ce soit le cas aujourd’hui. Au départ, quand j’ai commencé à bosser avec AML, j’étais juste un beatmaker. Mais à la fin, nous avions créé une véritable aventure sonore. Nous avons crée la Jungle Gym Jungle. La différence est là.

A : En étant un groupe à toi tout seul sur A strange arrangment, quel était ton instrument fétiche ? 

M : Tous. J’ai joué de la batterie, de la basse, du piano électrique, du synthé, du vibraphone, de la sitar électrique… Tout ce qui me passait sous la main, tout ce qui pouvait apporter un plus aux morceaux, je le testais. J’entendais un son dans ma tête, et sans même savoir de quoi il s’agissait, je devais me débrouiller pour aboutir à ce son avec mes propres outils.

A : Qui sont les musiciens qui t’accompagnent sur scène ? 

M : Je les connais depuis longtemps, j’ai grandi avec la plupart d’entre eux. Quand j’ai eu cette opportunité, j’étais toujours en contact avec eux, certains avaient déménagé à Los Angeles. Avec eux, je suis vraiment gâté. Franchement, j’ai avec moi le meilleur groupe du monde à l’heure actuelle. Si j’avais tout l’argent du monde et que je pouvais choisir n’importe quel musicien, je choisirais quand même ces types-là.

A : On sent un grande influence de Curtis Mayfield sur ta musique…

M : Il est l’un de mes artistes préférés. Quand il chante, tu peux ressentir chaque mot qu’il prononce. Tout est sincère, tout est crédible. Et les arrangements sont magnifiques. Je ne me suis jamais dit « Tiens, je vais faire une chanson comme Curtis Mayfield » mais j’ai écouté sa musique pendant vingt ans. Que ce soit lui ou Leeroy Hudson, Isaac Hayes, Smokey Robinson… Les sons et les sensations de leur musique sont imprimés dans mon cerveau. C’est impossible pour moi de ne pas être influencé par eux. J’espère simplement que je ne fais pas simplement du Curtis Mayfield. J’espère aussi apporter une nouveauté.

A : Comment as-tu réagi à la mort de Michael Jackson ? 

M : Oh mon Dieu, j’étais absolument dévasté. Lui, James Brown, Barry White… Michael Jackson était une immense partie de ma vie. Il faisait partie de notre vie à tous.

A : Quels sont tes premiers souvenirs de lui ? 

M : Thriller est l’un des premiers disques qu’on m’a acheté. Quand j’étais petit, j’enfilais des gants blancs et j’essayais de danser comme lui dans le salon. Je voulais avoir le blouson rouge de ‘Beat it’ ! Michael Jackson m’obsédait. C’est quelqu’un qui n’est pas de ce monde. Vraiment pas. Il y a une partie de moi qui est triste de le savoir parti, mais une autre partie se dit que de toute façon, il n’était même pas terrien au départ. Il est reparti sur sa planète.

A : Quelle est l’importance de l’héritage Motown dans ta musique ? 

M : Énorme. Quand tu grandis près de Detroit, c’est inscrit en toi, tu te sens connecté à cette histoire. Mes meilleurs souvenirs d’enfance, c’est quand mon père m’emmenait en voiture et qu’on écoutait la Motown à la radio. C’est un héritage incroyable, les gens de Detroit en sont extrêmement fiers. D’ailleurs je ne pense pas qu’il existe une communauté qui représente plus sa ville que celle de Detroit. Quand les habitants de Detroit voyagent, ils portent toujours une casquette à l’effigie de la ville ou un sweatshirt Michigan. Ils veulent que tu saches d’où ils viennent, même si aujourd’hui la ville est en ruines. Moi-même, où que j’aille, j’ai une casquette Detroit – même si ce n’est pas le cas aujourd’hui ! [rires] Je suis fier de cet héritage. Pouvoir représenter la soul de Detroit et l’amener vers une nouvelle génération, c’est un grand honneur pour moi.

A : Tu penses que tu portes le flambeau ? 

M : Je l’espère. En tout cas je fais de mon mieux.

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