Chronique

Antimc
It’s free, but it’s not cheap

Mush - 2006

Matthew Alsberg, plus connu sous le pseudonyme d’Antimc, est un producteur multi-instrumentiste (guitare, piano, basse, trombone…) de Los Angeles maniant synthés, samplers et boîtes à rythmes depuis maintenant un peu plus d’une dizaine d’années.

It’s Free, But It’s Not Cheap est son premier album solo, mais Antimc a su au cours de cette décennie se tailler une solide réputation au sein de la foisonnante scène indépendante de L.A.. Compagnon de route du Shapeshifter Radioinactive le temps d’un Free Kamal (2004) intéressant à défaut d’être inoubliable, il a également fait partie de la formation Log Cabin (Murs, Scarub, Eligh…) et a accompagné sur scène Busdriver, Boom Bip, Alias ou encore cLOUDDEAD. Sa première véritable trace discographique solo est le maxi Run, sorti en 2003 sur le label Mush.

Bichonnant son synthé pour en tirer mélodies entêtantes et basses à la limite de la saturation, Antimc bâtit un édifice sonore à la fois chaotique et harmonieux – dans tous les cas constamment maîtrisé. Car, outre son talent, ce que le producteur de la cité des anges démontre avec brio sur chacun des neuf titres composant It’s Free, But It’s Not Cheap, c’est son imposante polyvalence. Prenons quelques exemples.

Le morceau d’ouverture, ‘Ten Days Out’, démarre, avec son bouillonnement électronique et sa rythmique puissante et saccadée, comme un titre d’électro-rap classique. Mais il dérive peu à peu vers le rock ; pour s’achever finalement dans un génial dégueulis de guitares électriques – fusion quasi-parfaite de ces deux univers, ce premier titre durant près de sept minutes est l’un des temps forts du disque. Punk, crunk et électro se mélangent ensuite avec bonheur dans ‘Cesspool City’ dont les paroles, scandées par un Anthony Anzalone vraisemblablement chargé, sont d’une débilité réjouissante : « We’re fuckin’ up! We’re fuckin’ up again! All dicks are lined up hard and ready to fuck! Tell the fuckin’ whore to piss on your chest! No thoughts, no rights, fuckin’ slaves and fist fights!« . Plus loin, ‘The Nogoodnick’ est un titre pop-folk rappelant le remarquable travail de Why? sur « Elephant Eyelash », et construit autour de quelques notes de guitare, d’un xylophone et de cloches. ‘Single Life’ évolue dans un registre franchement ambient/lounge (avec batterie discrète, percus africaines et compo atmosphérique) et Antimc clôt son « It’s Free, But It’s Not Cheap » par une expérimentation pop-psychédélique-planante réussie, ‘…Or I May Just Dream (My Life Away)’.

Contrairement à ce que pourrait laisser supposer cette large palette de styles, l’album est tout sauf incohérent ; et les trois titres rappés, habilement disposés de manière à jalonner l’écoute, servent de fil d’Ariane à l’auditeur qui se retrouverait déboussolé dans ce labyrinthe musical. Excellents, les trois MC’s invités – les californiens Busdriver et Saafir, le Canadien Cadence Weapon – viennent parfaire l’ensemble en s’adaptant impeccablement aux instrumentaux d’Antimc.

Alternant titres instrumentaux en soliste et morceaux en compagnie d’invités provenant d’horizons différents, Antimc parvient ici à définir son univers : un monde très électronique, sans barrières, dans lequel se côtoient rap, pop, folk, rock et punk sans jamais sombrer dans l’anarchie inécoutable. D’une polyvalence bluffante, il ne lasse à aucun moment – la courte durée de l’album n’y étant bien entendu pas pour rien. Riche, inspiré et maîtrisé, It’s Free, But It’s Not Cheap s’écoute en boucle.

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