Sidekicks

Récemment, on vous a (un petit peu) parlé du label Awful Records. D’abord en revenant sur Father lorsque nous présentions nos révélations 2015. Ensuite lors de notre rétrospective autour du premier semestre de R&B. Enfin, dans notre report du festival SXSW au cours duquel Abra a fait forte impression. Honte sur nous : nous n’avons pas encore pris le temps de mentionner Tommy Genesis et l’excellent album World Vision sorti au mois de juillet. Réalisé par Tommy elle-même, le clip de « Hair Like Water Wavy Like The Sea », morceau hypnotique à souhait, est l’occasion de nous rattraper et, accessoirement, d’imaginer un spin-off long format de la vidéo qui verrait Tommy et Abra en Thelma et Louise modernes. Laissez-nous rêver.

Il y a un peu plus d’un an sortait Mafioso Psalms de $ha Hef, une très bonne mixtape confirmant les espoirs suscités par le rappeur new-yorkais depuis son couplet sur cette merveille de rap planant. Il revient aujourd’hui avec un nouveau projet, Super Villain (sa quatrième tape, si nos comptes sont bons), disponible gratuitement depuis quelques jours. L’occasion de constater que Hunnit Round Hef continue de progresser sur sa sombre voie et n’est toujours pas décidé à chanter l’amour et le printemps. De ce mélange hétérogène mais d’une égale noirceur émergent deux perles glaciales et hypnotiques : « Predicate Felon », single hivernal dont le clip a été mis en ligne début juillet, et l’obsédant « No Safety », sur deux productions signées H.N.I.C – également à l’origine de plusieurs beats du dernier projet de RetcH, le très recommandable Finesse the World.

2015 est-elle l’année de Compton ? Entre Kendrick Lamar, Dr. Dre, OT Genasis, le retour imminent de YG, le Documentary 2 de The Game et le film autour de NWA, on en a énormément entendu parler ces derniers mois. Derrière ce casting quatre étoiles, le rappeur AD a également essayé de se faire une place en soleil en sortant la mixtape Blue : 89 en avril dernier. De très bonne facture, elle mélange résurgences post-Mustard (« Get Out My Way » avec OT Genasis justement), déclarations de guerre (« Blew it ») et collaborations soignées (Skeme, Lil Durk, Gillie Da Kid et Dave East sont présents sur le projet). Surtout, Blue : 89 contient « Juice », véritable hit en puissance qui pourrait permettre à AD de passer à la vitesse supérieure.

Il est difficile de définir Jorrdee uniquement comme rappeur. Il est immergé dans son époque, celle de Drake, The Weeknd ou PartyNextDoor. Les étiquettes n’existent plus et la fine limite entre rap, RnB et pop est complètement annihilée. Cette vision plus globale de la musique lui permet d’explorer sans limites, mélangeant les repères 666 de Memphis, les compositions électroniques aériennes et une écriture proche de la chanson française, une poésie par ellipse.

Il intègre sa voix atypique à l’intérieur d’un univers très riche qu’on retrouve dans le visuel de son « Rolling Stone » : froid, dérangé et cosmique. Le jeune Lyonnais tient là son titre le plus abouti, au potentiel grandissant. Un spleen d’époque, codé et référencé, rempli d’amour violent et insolent.

Pour continuer sur ce rythme, il présente La 25ème heure, une mixtape à la production ciselée, aux nappes prenantes et expérimentations en tout genre. La complexité de l’ensemble est en décalage avec la facilité apparente de réalisation. En quelques mois, Jorrdee n’a cessé de surprendre avec des projets nombreux et aboutis. Une future tête d’affiche de la scène française.

Avec la sortie imminente dans les salles françaises du film autour de N.W.A, il est de bon ton de revenir sur l’histoire du groupe mythique. Interprété par Paul Giamatti dans le long-métrage de F. Gary Gray, Jerry Heller, le fameux associé d’Eazy-E, a joué un rôle déterminant dans la carrière des auteurs de Straight Outta Compton. Lors d’une interview accordée un peu plus tôt dans l’année, tonton Jerry a retracé toute l’histoire du groupe, de son amitié indéfectible avec Eazy à la jalousie maladive d’Ice Cube en passant par la scission survenue lorsque D.O.C a ramené Suge Knight dans l’équation. Passionnant.

Future a sorti un des albums importants de l’année avec Dirty Sprite 2. Toute son énergie se déploie dans une noirceur décomplexée et implacable, le retour du roi à Atlanta après avoir perdu à Waterlo(h)ollywood. Parmi les éclats, une ritournelle avec Drake qui ne s’arrête jamais : « Where You At ». Un format qui se veut presque anti-pop, une répétition sans fin, sans but, un refrain infernal sur 3 minutes qui devient la norme de la musique rap en 2015. Future a réussi ce tour de force, ce changement de jeu qui lui permet d’avoir un tube (qui n’en est pas un) avec la plus grosse star actuelle. Comme si la rupture, la fin n’était que le point de départ (Coucou Ciara). La vidéo achève les derniers récalcitrants, Metro Boomin et Dj Esco volant la vedette avec des pas de danse lunaires sur un rooftop de Toronto. La dernière touche pour rendre le tout culte.  Apprécie !

Si l’on devait se fier uniquement à son nom, on imaginerait plus volontiers Sadistik en train d’énumérer ses meurtres imaginaires sur des beats de death rap que de concocter un projet avec Kno. C’est pourtant bien avec le producteur-orfèvre de CunninLynguists que s’est allié le temps d’un EP intitulé Phantom Limbs (Dirty Decibel Records) le ténébreux MC originaire de Seattle, plus adepte des textes psychologiques et complexes que d’horrorcore. L’osmose entre le rappeur et le compositeur y semble parfaite – Sadistik et Kno avaient déjà travaillé ensemble à plusieurs reprises (sur Strange Journey Volume Three ou encore sur Flowers for my Father). Durant les six titres (+ un interlude) qui composent ce très beau projet, Sadistik traîne son espèce de nonchalance triste et torturée, ponctuée de montées d’adrénaline, le long des productions fantomatiques de Kno. De l’obscurité totale du premier morceau jusqu’au « Paradis » trouvé auprès de la Lady in the Radiator de David Lynch sur « In Heaven », l’ambiance est plus nocturne qu’estivale. Mais « Everything is pretty in the dark », et ce Phantom Limbs constitue en outre une bonne porte d’entrée sur le travail de Sadistik, qui enchaîne depuis 2008 les albums de qualité et a notamment brillé l’an passé avec l’excellent Ultraviolet.

Une carrière peut se jouer sur un coup de dés. Littéralement. Même quand on s’appelle Christopher Wallace et qu’on n’est pas encore couronné King of New-York. C’est l’anecdote extraordinaire ramenée par le duo Gasface et racontée par Bonz Malone, plume historique pour The Source et Vibe, co-auteur du film Slam et directeur artistique notamment pour Island Records. D’Island Records à Bad Boy Records, de Bonz à Puffy, le début de carrière de Biggie s’est (aussi) joué sur le toit d’un immeuble.

Une foule surexcitée reprenant à tue-tête les dures paroles d’un jeune de 17 ans dans un club bondé. Voici comment ouvrir de la meilleure des façons. Kodak Black vient de Floride et il est peut être l’héritier parfait de Lil Boosie. Comme lui, il mélange habilement feu et glace, une pure tradition sudiste. Un passé de criminel juvénile, un présent de charbon et un futur brillant. Sa dernière mixtape, Heart of The Projects, est une démonstration de force, une parfaite mise à jour des recettes poisseuses de nos rappeurs préférés, de Bâton Rouge à Memphis. Et tout ça avant la majorité. C’est le moment de te convertir. Apprécie !

Tory Lanez était le grand absent de notre mix spécial Toronto. Omniprésent depuis plusieurs années, ce jeune artiste de 22 ans oscille entre rap et chant, proche de Drake bien sûr mais aussi de Travis $cott pour qui il a déjà écrit (coucou Meek Mill). Alors que sa côte de popularité ne cesse d’augmenter, il vient en France présenter son dernier EP, Cruel Intentions, composé avec les grands pontes de la (défunte) scène Trap : RL Grime, Baauer (oui oui Harlem Shake) ou encore Shlohmo, regroupés sous la bannière WEDIDIT. Le résultat est vraiment réussi et nous donne envie de le voir le samedi 29 août sur la scène cosy de la Maroquinerie, meilleur endroit de Paris pour découvrir une star en devenir (plus d’infos ici). En plus, on retrouvera 8TM en warm up pour un set forcément classe et précis. Pour cette belle occasion, nous avons deux places à gagner, rendez-vous sur facebook.