E.One et les pharaons

Quand au début de l’année E.One sort son second album en solo, il y prend soin de se définir, lui et les endroits qu’il affectionne. Sorte de frère jumeau de son prédécesseur William Blake, Datura Statera aurait cependant grandi plus loin de la ville que son aîné. Les grands espaces et la soif de voyage ne sont plus seulement intérieurs. Il y a un élargissement des perspectives dans ce disque où le rappeur de Première Ligne manie avec brio un entrelacement de références et de périodes, comme si le voyage dans le temps et l’espace se vivaient tel un kaleïdoscope. Honoré par un tissu boom bap de haute facture, de magnifiques samples pitchés, Datura Statera a des allures de concoction soulfull qui favorisent la quête personnelle et la remise en cause. Il suffit d’écouter le magnifique et tantrique « Équilibre » pour s’en convaincre. Quelques titres font néanmoins figure d’exception dans cette tracklist aux interludes végétales et animistes. Parmi eux ? « Les pharaons. » Produit par Ossama, mettant en scène les nouvelles divinités de la mondialisation pendant que « Zeus et Issa sont nassés comme de vulgaires canassons », E.One y interroge l’ordre mondial. C’est fait sans théorie du complot, sans triangle. Juste une cinglante mise en musique de l’impunité dont certains s’auréolent. « Ils ont tué les dieux, ils ne leur servaient plus à rien » dit le rappeur blanc-menislois désormais installé en Bretagne. Les marchands du temple sont observés, les sarcophages sont prêts, et c’est mis en image par Slob.