Bink!
Interview

Bink!

Avec Just Blaze et Kanye West, le producteur Bink! composait la Sainte Trinité qui a défini le son du label Roc-A-Fella à l’aube de la décennie. Pourtant, ni son sens de l’espace, ni ses rythmiques inspirées ne lui ont permis d’atteindre le succès de ses collègues. Il s’en explique dans cette interview rétrospective, qui risque de faire siffler les oreilles d’un certain producteur-star…

Abcdr du Son : Peux-tu te présenter ?

Bink! : Je pense que tu peux m’appeler l’un des meilleurs producteurs en Virginie. Je m’appelle Bink!. Je suis connu pour avoir beaucoup travaillé avec Jay-Z et le label Roc-A-Fella, mais aussi avec Mr Cheeks. J’ai commencé avec Teddy Riley en 1993. Je pense être un vétéran car cela fait plus de 16 ans que je suis dans le milieu. Je me sens vieux.

A : Quelle a été ton éducation musicale ?

B : C’est très simple, c’est la transition entre l’église et la rue. J’ai commencé par jouer des percussions à l’église de 8 à 14 ans. Ensuite, je n’ai plus trouvé très cool d’aller à l’église. Au cours de l’année du collège, je trimballais toujours une petite boîte à rythme. C’est à ce moment-là que c’est devenu bien plus qu’un hobby pour moi. J’ai vraiment commencé à faire de la musique une fois que j’ai reçu mon diplôme.

A : Qu’est-ce qui t’a donné envie d’être producteur plutôt que MC ou DJ ?

B : A l’époque, je rappais aussi. J’étais un vrai fan de hip-hop depuis le début des années 80. Le fait de jouer des percussions à l’église me permettait d’être payé tous les dimanches. C’est avec cet argent que je me suis acheté mon premier disque : ’30 Days’ de Run DMC. C’est ce morceau qui m’a fait aimé cette culture. Nous avions un crew de break dance avec des amis et nous sommes passés de la danse au rap, puis nous nous sommes mis à faire des beats et des cercles au coin de la rue. Je le vivais à fond.

A : As-tu encore des mixtapes sur lesquels on t’entend rapper ?

B: Non… mais tu sais quoi ? Dans le temps, je faisais des mixtapes et je rappais sur l’intro ou des trucs du genre. C’est comme ça que je me suis fait un nom en Virginie. A l’époque, on ne vendait que des mixtapes.

A : A quoi ressemblait la scène locale à cette époque ?

B : Pas mal de gens appellent la Virginie « Little New York » car lorsque le crack est apparu, beaucoup de New Yorkais sont venus s’installer ici. En plus, la Virginie est une région où il y a beaucoup de militaires qui viennent d’un peu partout. Heureusement pour moi, j’ai un cousin qui habite à Brooklyn, il s’appelle Dion. C’est lui qui me ramenait toutes les mixtapes de Chuck Chillout et de Red Alert parce qu’il passait tous les étés chez ma grand-mère. Je m’asseyais et je les écoutais pendant des heures. Les classiques sont différents selon les endroits où tu vas. Je me familiarisais avec beaucoup d’artistes qui ne passaient pas à la radio en Virginie. C’est à New York que tout a commencé et j’ai pu découvrir des morceaux exclusifs de l’underground grâce à ces tapes.

A : Quelles ont été tes influences en terme de production ?

B : Rick Rubin, Teddy Riley, Buckwild, Pete Rock, Lord Finesse, NoID, Dre et beaucoup d’autres. Mon groupe favori reste A Tribe Called Quest. J’étais un gros fan. J’aime encore les productions d’Ali Shaheed et Q-Tip. J’ai beaucoup appris d’eux.

A : Y’a-t-il quelqu’un en Virginie qui t’inspirait beaucoup à cette époque ?

B : Ouais car si tu regardes bien, Missy Elliott et Timbaland sont les premières personnes originaires de Virginie à avoir vraiment percées. C’était très motivant de les voir faire leur truc avec Jodeci à l’époque. Avoir suivi leur évolution m’a donné beaucoup d’espoir de pouvoir vivre mes rêves.

A : Tu disais un peu plus tôt que tu avais travaillé avec Teddy Riley, n’est-ce pas ?

B : Ouais ! Le premier morceau que j’ai produit c’était ‘Don’t Leave’ de Blackstreet en 1993.

A : Comment l’as-tu rencontré ?

B : Teddy Riley avait un studio sur Virginia Beach. Je me trouvais dans un salon de coiffure qui s’appelle Triple Play. Il se faisait couper les cheveux et j’étais dans un studio situé au dessus du salon. J’étais en train de faire du son et il m’a entendu. Il est monté et m’a demandé de lui jouer quelques beats. Je lui ai joué l’instru de ‘Don’t Leave’… et tout le monde connaît la suite.

A : Qu’as-tu appris en travaillant avec lui ?

B : C’est un perfectionniste et l’un des producteurs les plus talentueux que je connaisse. Un vrai virtuose du clavier. Beaucoup de gens ne savent pas qu’à ses débuts, il a produit du hip-hop comme par exemple le morceau de Doug E Fresh ‘The Show’ ou encore les premiers Heavy D. La plupart de ses productions étaient épiques et ambitieuses. Il mixait les morceaux comme personne d’autre.

A : Est-ce parce que tu le considérais comme un « virtuose du clavier » que tu as basé ton style de production sur des samples ?

B : Non, non, non. Les samples font partie de la culture hip-hop. C’est comme ça que tout a commencé. Si tu sais jouer du clavier, ce que Teddy savait faire, tant mieux pour toi mais moi je ne le maîtrisais pas comme lui. Je m’inscrivais donc dans la même veine que des Lord Finesse, D.I.T.C., Buckwild et tous ces gars qui passaient leur temps à fouiller les bacs.

A : Quel genre de musique aimes-tu sampler ?

B : Assurément la musique des années 70. De 1969 à 1977-78, toute cette période d’où nous vient la soul. Une fois les années 80 arrivées, la soul n’a plus vraiment été présente. D’ailleurs beaucoup de producteurs samplent ces années-là en ce moment. Le synthétiseur venait juste d’arriver et beaucoup de gens qui jouaient des instruments les années précédentes ont délaissé leurs instruments pour essayer les synthétiseurs dont je ne suis pas vraiment fan. J’aime le son de gens comme Curtis Mayfield ou Barry White. Tu sais Skull Snaps, The Dramatics et the Escorts. Ça c’est ma came !

A : Quel genre de musique aimes-tu sampler ?

B : Assurément la musique des années 70. De 1969 à 1977-78, toute cette période d’où nous vient la soul. Une fois les années 80 arrivées, la soul n’a plus vraiment été présente. D’ailleurs beaucoup de producteurs samplent ces années-là en ce moment. Le synthétiseur venait juste d’arriver et beaucoup de gens qui jouaient des instruments les années précédentes ont délaissé leurs instruments pour essayer les synthétiseurs dont je ne suis pas vraiment fan. J’aime le son de gens comme Curtis Mayfield ou Barry White. Tu sais Skull Snaps, The Dramatics et the Escorts. Ça c’est ma came !

A : A quelle fréquence vas-tu digger ?

B : Je ne digge plus autant que je le faisais avant. J’essaie juste d’acheter des collections à des particuliers. Pour être honnête avec toi, je squatte pas mal les blogs pour chopper des albums.

A : Est-ce que c’est dur pour quelqu’un comme toi de sampler du MP3 ? 

B : C’est vrai qu’il est beaucoup plus facile de sampler directement d’un vinyle parce que tu peux voir où se situe le groove, le break et tout ça. Ce n’est pas la même chose avec un MP3 : tu dois écouter le morceau entièrement. Tous les producteurs te diront que c’est la partie la plus embêtante de la production : s’asseoir pendant des heures à écouter des disques.

A : Est-ce que les lois sur les déclarations de sample ont affecté ton travail ?

B: Je ne vais pas dire non car elles ont en effet affecté mon travail d’une certaine manière. Dans le monde de la musique, il y a beaucoup de leaders que les gens suivent et essaient de copier. Il n’y a pas beaucoup d’artiste comme OutKast. Eux se foutent de ce qui est à la mode, ils restent fidèles à eux-mêmes. Mais maintenant, vu qu’il y a beaucoup de nouveaux directeurs artistiques, les artistes font encore et toujours la même chose. C’est dur d’entendre et de voir l’industrie prendre une mauvaise tournure. J’ai quand même l’impression que la bonne musique revient sur le devant de la scène. Je gravite beaucoup autour du rock et du R&B plutôt que le hip-hop car le hip-hop ne me plaît pas en ce moment.

A : Quelles sont tes techniques de sampling ?

B : Le sample m’inspire tout autant que la rythmique. Si je trouve de nouvelles caisses, cela peut m’inspirer à commencer par la rythmique, ou alors je peux tout aussi bien commencer avec une boucle. Je ne travaille pas d’une manière particulière. Cela me vient comme ça. Des fois, il m’arrive de regarder la télé et d’entendre une pub alors je cours en bas et me mets à taffer sur une production car cette pub m’a donné une idée.

A : Est-ce que tu sais jouer des instruments ?

B : Je sais jouer de pas mal de choses. Mon instrument principal reste la batterie mais je sais aussi jouer du clavier même si comme je te l’ai dit, je ne suis pas Teddy Riley. Je sais faire le taf d’une certaine manière. Je joue aussi un peu de guitare, tu as pu l’entendre sur quelques morceaux que j’ai produit sans vraiment savoir que c’était moi qui jouais.

A : Est-ce que tu essaies d’en maîtriser un peu plus ?

B: Tu sais quoi ? Je veux retourner à l’école pour étudier le solfège. Je suis entouré de très bons musiciens et j’apprends beaucoup grâce à eux.

A : Comment décrirais-tu ton son ?

B : Je dirais que mon son est agressif, rempli d’émotion et très théâtral. C’est pour ces raisons là qu’il y a plus de quinze films dans ma discographie.

A : Quelle différence fais-tu entre la production de bandes originales de films et celle d’albums de rap ?

B : La plupart du temps, une bande originale de film consiste en une émotion que tu vas ressentir à un moment précis. Tu ne t’attends pas vraiment à ce qu’une voix vienne se poser dessus. Tu peux te permettre d’être très créatif dans ta musique au contraire d’une production que tu ferais pour un artiste. Tu as beaucoup plus de liberté lorsque tu enregistres un morceau pour un film.

A : Ton expérience dans le monde du cinéma t’a t-elle permis d’avoir une approche différente de ton travail dans le monde du hip-hop ?

B : Tu vois, je n’ai justement pas encore eu le plaisir d’être embauché pour réaliser la bande originale d’un film de A à Z. J’ai produit la scène d’ouverture du film « Hard Knock Life » de Jay Z en 1998, qui au final est devenue un morceau de Beanie Sigel.

A : Peux-tu définir ton rôle en tant que producteur ?

B : Un producteur, c’est un peu comme l’entraîneur d’une équipe de football. Tout dépend de toi. Tu mets chaque chose à sa place et tu dois t’assurer que tout reste comme ça du début jusqu’à la fin. Il y a une différence entre les producteurs et les beatmakers. Il y a beaucoup de beatmakers dans le milieu.

A : Justement, comment sépares-tu les deux ?

B : Un beatmaker est une personne qui produit un beat, qui le donne à l’artiste et qui laisse l’artiste faire son truc sans intervenir sur le processus créatif du morceau. La plupart des gens avec qui je travaille respectent mon opinion et nous allons ensemble en studio pour enregistrer un morceau du début jusqu’à la fin.

A : En tant que producteur, que penses-tu de la chute d’un magazine comme Scratch ?

B : Cela ne me choque même pas. Le milieu dans lequel on est évolue est totalement différent de celui que j’ai connu à mes débuts. On va dire ça comme ça : je suis arrivé en 1993. Il y avait tellement de labels dans lesquels tu pouvais essayer de vendre ta musique et maintenant, 16 ans après, ils se sont tous réunis. Cela ressemble trait pour trait au monde réel. Ils fusionnent tous et licencient la moitié de leur staff. Beaucoup de gens n’achètent plus de CD et de magazines comme ils avaient l’habitude de le faire. Je ne suis donc pas choqué que le magazine ait cessé de paraitre. C’est malheureux pour ceux qui y travaillaient mais je ne suis pas surpris.

A : Dirais-tu qu’au jour d’aujourd’hui, tu as plus tendance à faire de la musique pour toi plutôt que pour les gens?

B : J’ai toujours fait de la musique pour moi-même mais il n’y a rien de mieux que d’avoir quelqu’un qui apprécie ton travail. C’est incroyable de voir un artiste sur scène lors d’un concert qui affiche complet et de voir tous ces gens chanter ses chansons et crier son nom. C’est un aspect du milieu que j’aime beaucoup : lorsque les gens te disent qu’ils aiment ce que tu fais et qu’ils sentent que tu fais avancer les choses.

A : J’ai entendu dire qu’à un moment de ta vie tu étais directeur artistique. Qu’as-tu retenu de cette expérience ?

B : J’ai principalement accepté ce job pour pouvoir voir ce qui se passait dans ce microcosme. J’ai toujours voulu savoir quel était le processus de sélection et de signature d’un nouvel artiste. Même ça, ça a changé aujourd’hui ! A l’époque tu pouvais ramener ton artiste dans un label et le faire chanter ou rapper devant les exécutifs. Il pouvait même ressortir de là avec un deal à la clé. Maintenant les labels s’en foutent que tu sois talentueux, il vaut mieux que tu arrives avec le bon morceau qu’ils peuvent vendre tout de suite. Aussi incroyable que tu puisses être, si tu n’as pas le morceau qui le prouve, ils ne feront rien pour toi. C’est une autre époque.

A : Quel était ton sentiment lorsque tu as quitté ce job ?

B: C’était une bonne expérience. J’ai rencontré des personnes intéressantes et j’ai appris beaucoup de choses. C’était une bonne chose de voir comment les labels procédaient.

A : Si c’était à refaire, le ferais-tu aujourd’hui?

B : Je pense, ouais ! Carrément ! Le business de la musique est tellement lent que si quelqu’un est prêt à te payer pour faire quelque chose, tu ferais mieux d’accepter.

A : Pour moi, l’une de tes marques de fabrique repose sur des rythmiques de dingue. Est-ce que c’est dû à ton passé de batteur à l’église ?

B : Absolument ! Ma mère dirigeait la chorale où je jouais de la batterie. Elle m’a vraiment appris l’importance de mon rôle en tant que batteur et je me suis servi de ce qu’elle m’a appris dans mon style de production tout en ajoutant une touche personnelle. Beaucoup de gens ont changé leur façon de programmer depuis que je suis arrivé dans le milieu.

A : Fais-tu attention à la façon dont tes rythmiques sonnent ou est-ce que c’est quelque chose de naturel pour toi ?

B : Ce n’est absolument pas quelque chose que je fais consciencieusement. Ça vient comme ça ! C’est là que se trouve la différence entre ceux qui essaient de copier ce son et moi.

A : En 2000, Jay-Z a sorti The Dynasty qui a vraiment mis ton travail, ainsi que celui de Just Blaze et de Kanye West sous les feux de la rampe. Comment se fait-il que tu n’aie pas été présent sur tous les albums de Jay-Z par la suite?

B : J’ai produit quelques morceaux sur The Blueprint qui est sorti juste après The Dynasty mais je me suis un peu éclipsé du camp Roc-A-Fella car quelqu’un copiait mon son au sein même de l’équipe. Je n’aimais pas du tout ça car je suis de l’ancienne école, du temps où copier le son ou le style de quelqu’un d’autre, ce qu’on appelait « pomper », était quelque chose de très personnel. Pour la nouvelle école, ce n’est pas important de « pomper », l’essentiel c’est d’avoir un chèque. C’est ce que je déteste dans le milieu. Toute la partie créative n’existe plus. Il n’y a plus beaucoup de gens qui te donnent envie de retourner à la maison et d’allumer les machines lorsque tu entends leur musique. Pour beaucoup de ceux que tu entends aujourd’hui, tu as l’impression d’entendre une certaine personne mais c’est quelqu’un d’autre et ce n’est pas bien grave. A l’époque des gens se faisaient tirer dessus et frapper pour des choses pareilles !

A : Qui a « pompé » ton style?

B : Je pense que c’est assez flagrant ! Tu peux facilement me le dire.

A : Je dirais… Just Blaze ?

B : Bien sûr ! Tu fais partie de ces personnes qui font attention aux détails. Le fan ou consommateur lambda se foutent de qui a pris quoi à qui. Ce n’est pas leur problème. Ils veulent juste que le morceau soit bon. Mais si tu es un fan de  musique et que tu as suivi l’évolution du milieu, alors tu sais vraiment qui a apporté quoi et qui m’a piqué des sonorités depuis que je suis arrivé dans le milieu.

Le truc le plus dingue c’est que je m’entendais bien avec lui. Just Blaze et moi étions vraiment sur la même longueur d’onde durant un certain temps pendant l’enregistrement de Dynasty et de Blueprint. Quand on en est arrivé au point où il copiait ce que je faisais, c’est là que ça n’allait plus pour moi. Il a fini par signer avec Gee Roberson et Hip Hop qui étaient directeurs artistiques chez Roc-A-Fella. Une fois que j’ai fait comprendre que la situation ne me plaisait pas, ils m’ont mis de côté et j’ai poursuivi ma carrière ailleurs.

A : Tu ne t’entends donc plus avec Just Blaze ?

B : Disons que nous ne nous parlons plus [rires]. La première fois que je l’ai rencontré, ses beats sonnaient comme des productions de Swizz Beatz ! C’est là toute l’ironie de l’histoire. C’est le seul gars que j’ai entendu dans le milieu piquer à autant de producteurs. Il commence seulement à avoir une patte personnelle mais même maintenant, il sonne comme Dj Toomp ou Drumma Boy. Il fait ce qui est à la mode et c’est cet aspect du milieu avec lequel je ne suis pas d’accord. Je ne vais pas changer mon style de production pour faire ce qui marche. Il est connu pour « emprunter » le style de beaucoup de gens. C’est sa devise. C’est quelqu’un de talentueux, je veux bien lui reconnaître ça, mais il n’a rien apporté de neuf au hip-hop. C’est le seul truc qui lui manque : son propre son !

A : Qu’en est-il de Kanye ? Est-ce que tu es en bons termes avec lui ?

B : Ouais ! Kanye et moi nous entendions vraiment bien. Lorsqu’il est apparu sur la scène, il me demandait beaucoup de conseils. Il m’appelait et me demandait mon avis sur beaucoup de choses. Je suis une des premières personnes devant laquelle il ait rappé et j’étais impressionné parce que c’était la première fois que je voyais un producteur devenir rappeur et en plus de ça il était vraiment doué. Il prenait le bus pour venir chez moi, bien avant qu’il ait tout cet argent et nous faisions ce que l’on appelait des « beat-bars ». On se jouait chacun des beats l’un après l’autre. C’est quelque chose de bien à faire. On aime toujours s’entourer de gens qui sont au moins aussi fort voire meilleurs que soi car c’est la seule façon d’évoluer. Avoir l’opportunité de jouer des beats à Kanye était quelque chose de très motivant car tu ne pouvais pas te permettre de jouer un beat pourri car tu savais qu’il allait jouer un beat incroyable juste après. Il pensait la même chose de moi et cela nous permettait de donner le meilleur de nous-mêmes et de rester toujours au niveau.

A : Que penses-tu de son dernier album 808’s & Heartbreaks ?

B : Je l’adore ! Il est vraiment bien produit. Tu ne peux pas nier la qualité musicale du projet.

A : En parlant d’autres producteurs, que penses-tu de tes camarades issus de Virginie ?



B : Timbaland est l’un de mes producteurs préférés car il ne respecte aucune règle. Il ne s’enferme pas dans un style particulier. Tant que ça sonne bien à ses oreilles, il le fait. Missy et lui forment vraiment un duo détonnant car lorsque les gens les écoutent, ils disent souvent : « Wow ! Où est-ce qu’ils ont été chercher ça ?« . Il y a beaucoup de gens dans le milieu qui ont peur d’innover. Maintenant, tout le monde utilise ce bon vieux 808 [rires]. Le 808 et des handclaps. Timbaland, lui, peut faire un beat à partir de rien du tout.

A : Nottz reste l’un de mes producteurs préférés issus de Virginie. 



B : Bien sûr, Nottz fait partie des meilleurs. Nous sommes arrivés au même moment. Nottz et moi mettions nos beats sur les mêmes cassettes. Darryl Sloan nous manageait tous les deux et il s’occupe toujours de Nottz aujourd’hui. Je suis toujours en contact avec lui. C’est vraiment un producteur impressionnant. Il me rappelle beaucoup J Dilla.

A : Pour moi, Nottz c’est le mixe parfait entre Jay Dee & Dj Scratch.



B: Absolument ! Je vois que tu es vraiment à l’écoute de tout ce qui se fait. J’aime ça ! Ça fait plaisir quand une personne t’interviewe et qu’elle sait de quoi elle parle et je peux te dire que tu sais de quoi tu parles.

A : Il y a cette vidéo sur JoeBudden TV où tu joues des beats à Joe & Royce et il y a cette instru que tu dis être parfaite pour The Blueprint 3. L’as-tu déjà envoyé à Jay-Z ?

B : Mon dieu, si tu savais… Je n’arrive pas à mettre la main sur Jay.

A : Ah bon ?



B : Ouais, c’est difficile de savoir où il est. Il voyage beaucoup au-delà de nos frontières. Je n’ai pas encore eu l’occasion de parler avec lui. Beaucoup de gens me contactent à propos de ce beat. Ils l’aiment vraiment beaucoup.

A : Pratiquement tous les beats que tu jouais dans la vidéo étaient dingues.



B: Merci ! J’apprécie que ces beats t’aient plu. D’ailleurs, il y a un même un beat où je joue de la guitare, de la batterie, de l’orgue et tout le reste dessus. C’est ce que je te disais tout à l’heure. Je joue beaucoup à l’oreille mais je ne peux pas jouer comme les musiciens auxquels je fais appel. Je me débrouille quand même pas mal.

A : J’aime bien celui qui sonne comme de la musique haïtienne.



B: Je vois exactement de quel beat tu parles. As-tu déjà entendu parler d’un site qui s’appelle PMP ? Je suis dessus ! Conrad Dimanche, un bon pote à moi, a lancé ce site. Ce beat est sur ma page. Tu peux aller dessus et l’écouter si tu veux. Tu viens de France, n’est ce pas ?

A : Ouais. 



B : Mon cousin est un jazzman reconnu à Lyon. Il s’appelle Sangoma. Il est incroyable. A chaque fois qu’il vient aux États-Unis, il m’apprend différents grooves, il est à fond dans les percussions africaines et un tas d’autres trucs qu’il a appris en France. J’ai vraiment envie de venir là-bas. Ma sœur, qui est une chanteuse, a enregistré un album avec lui et c’est un très bon disque.

A : Est-ce que Joe Budden et Royce ont gardé un des beats que tu leur a joué ?



B : Non, ils n’ont rien gardé encore. Nous avons commencé un autre morceau avec Joe & Royce mais j’attends que le reste du crew [NDLR : Slaughterhouse] vienne ici pour le terminer.

A : Quels sont tes projets en ce moment ?



B : Je bosse avec deux artistes sur lesquels je me focalise beaucoup : Chris Echols et B.Rossi. Je suis dans une toute autre vibe en ce moment. C’est pour ça que j’ai fais cette vidéo avec Royce & Joe. Je veux juste que les gens sachent que je suis toujours là. Je n’ai pas perdu le niveau ! Tout le monde fait à peu près la même chose. Je fais toujours partie de ces producteurs à part.

A : Est ce que tu as proposé des beats à des artistes en major ces derniers temps ?



B : Tu sais quoi ? Je l’ai fait mais comme je te l’ai dis avant, je ne pense pas que les gens veulent entendre autre chose. C’est pour ça qu’il n’y a rien de mieux que de bosser avec un vrai artiste.

A : J’ai vu une vidéo pour un morceau que tu as produit, je crois que ça s’appelle ‘Spot Rules’. 



B : Ouais c’est mon gars Jae Ski. Il est fort. Il fait parti de ces mecs qui sont des purs produits de la rue. Il ne parle que de ça. ‘Spot Rules’ est un peu notre version des ‘Ten Crack Commandments’. On a fait d’autres morceaux qui sont encore plus dingues ! Des morceaux bien durs auxquels des gars de la rue ou qui ont connu la rue pourront s’identifier directement. Il vient de passer huit ans dans une prison fédérale. Il a beaucoup de choses à raconter.

A : Sa voix est unique. 



B : Il a ce genre de voix qui font que soit tu l’aimes, soit tu le détestes. Il me rappelle beaucoup un artiste comme Nine si tu te souviens de lui.

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