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Considérez qu’il s’agit d’une invasion. Après avoir déjà bouclé pas moins de six compilations dédiées aux producteurs les plus inspirées de ces quinze dernières années, un disque sur Oxnard et un autre dédié à ?uestlove et sa bande, Ameldabee continue à multiplier les sorties sur un rythme absolument frénétique. Le second volume d’Original samples vs Hip-Hop Beats à peine installé sur les étagères des magasins spécialisés, le DJ parisien poursuit son interminable quête des samples et donc de ces disques, parfois obscurs, judicieusement réutilisés. Entièrement consacré à New York et ses quartiers, ce nouvel épisode fait figure de vaste mosaïque, complètement démesurée puisque composée de pas moins de 250 disques. Un véritable manifeste rappelant que l’échantillonnage est loin d’être mort, contrairement à ce qui avait été prématurément répété. A vrai dire il n’est même pas back dans les bacs tout simplement parce qu’il n’est jamais parti. L’introduction composée d’extraits d’interviews de Diamond D, Lord Finesse ou Evil Dee le rappelle justement, tout en plaçant le DITC au cœur de l’histoire du crate-digging.
Débuté par une série d’inspirations du bien-nommé DJ Premier, Original samples vs Hip-Hop Beats 3, fait la part belle aux classiques, des envolées de Guru, Jeru The Damaja, Das EFX et autres KRS-One, aux rimes de l’ex-King de New York Notorious B.I.G, (‘Ten crack commandments’) précédé par un des héritiers de la couronne…un certain Jay-Z (‘Friend or Foe’, ‘A million and one questions’). Judicieusement et finement entremêlés aux morceaux passés dans le sampler de Primo, ces bangers prennent un sens nouveau, s’enchaînant avec une étonnante fluidité jusqu’à une nouvelle série de titres extraits cette fois de la discographie du DITC. Toujours en quête de nouvelles boucles explosives, Lord Finesse et Diamond D occupent une place de choix dans cette sélection prompte à faire résonner les ghetto blasters du monde entier. Les rimes de Fat Joe ou O.C. croisent ainsi les inspirations de Syl Johnson, Bobby Humphrey, Isaac Hayes et autres Meynard Ferguson. Après un bref passage du coté de Mount Vernon (banlieue de New York) pour revisiter quelques perles échappées du sampler du Soul Brother Number One Pete Rock, notre barque rejoint les rives de Queensbridge. Arrivé à hauteur des tours bétonnés de cet autre quartier New-Yorkais, partagé entre fascination et effroi, on se délecte des récits de Prodigy, Nas, Kool G Rap et consorts. Perdus entre légendes urbaines et froide réalité ces portraits du quotidien prompts à vous glacer le sang (‘Temperature’s rising’, ‘Usual suspects’, ‘Streets of New York’), côtoient différents morceaux plus légers (‘Yeah you got props’, ‘On the mic’) pour un mélange détonant entre égotrips et passages plus festifs. Adossée aux morceaux échantillonés, cette sélection conforte un peu plus les mythes urbains de QB, tout en s’écoulant simplement et tranquillement. Et à vrai dire peu importe si certains morceaux sont passés depuis à la prospérité, les classiques ne connaissent aucune date de péremption.
Encore un cran au-dessus de ses deux prédécesseurs, parfaitement indispensable pour tous les crate-diggers en herbes et confirmés, ce nouvel épisode d’Original Samples vs Hip-Hop Beats s’affirme comme une compilation de choix et une référence en la matière. A glisser dans les manuels scolaires des jeunes Hip-Hop headz.
Déjà auteur avec DJ Skandal de cinq mixtapes mettant virtuellement en opposition une sélection de choix des producteurs d’outre-Atlantique (avec notamment Pete Rock, Erick Sermon, Large Professor, Jay Dee ou Madlib), une autre compilation menée avec Lefto et consacrée à la prolifique scène d’Oxnard (Lootpack, Medaphoar, Madlib,…) et une dernière au groupe autoproclamé légendaire The Roots, l’abeille Ameldabee continue à multiplier les projets. Cette nouvelle sortie intitulée Original samples vs. Hip-Hop beats vol.1 s’inscrit, une nouvelle fois, dans une perspective historique, mêlant une sélection de morceaux produits par le DITC, Pete Rock et Jay Dee avec les morceaux d’origines passés par les samplers de ce trio inspiré et historique.
Ce beau travail de cratedigger (et de collectionneur puisque chacun des morceaux figurant sur cet album provient de disques vinyles) s’avère très proprement mixé, sans séries de passe-passe inutiles, mais au contraire particulièrement fluide. Les morceaux originaux, pour la plupart restés dans l’anonymat le plus complet et extraits de bacs à disques poussiéreux, se mêlent avec harmonie aux productions de Lord Finesse et consorts, s’enchaînant ainsi sans discontinuer. On passe ainsi des classiques ‘Fuck what you heard’ (Diamond), ‘Catchin’ Wreck’ (Showbiz & AG) à ‘Time’s up’ (OC) ou encore le ‘Put it on’ de Big L, hymne (avec ‘MVP’) de son excellent premier album solo Lifestylez Ov Da Poor and Dangerous pour le DITC.
Après une indispensable série de classiques signés par le duo Pete Rock & C.L. Smooth (à l’époque où ils ne réglaient pas encore leurs comptes par interviews interposées) avec notamment ‘They Reminisce Over You’ (et son sample de ‘When she made me promise’ de Funky Nassau en introduction, puis sa boucle de ‘Today’ (Tom Scott)), ‘Carmel city’ (reprenant ‘Dizzy’ de Hugo Montenegro dont les sonorités électroniques atypiques ont comblé plus d’un producteur), on se délecte de ‘Fakin Jax’ et ‘What you say’. Le Soul Brother Number One y œuvre avec son petit frère Grap Luva, Rob-O, Ras G et Marco Polo, au sein du collectif INI, dont l’album « Center of attention », finalisé en 1995 mais sorti sept ans plus tard s’avère une incontestable réussite artistique (à défaut d’avoir connu un véritable succès commercial.) Après cette sélection de choix, complétée par une version studio inédite de ‘The game’ prouvant si nécessaire que le « one drop » est un concept au moins aussi désuet que la maturité dans le rap, on se (re)plonge dans la discographie de Jay Dee, au travers de son travail en solo (le récent ‘Fuck the police’) ou avec Slum Village (‘Get dis money’, ‘Hold tight’) et Madlib (l’excellent ‘Official’).
Au final, Original samples vs Hip-Hop beats vol.1 constitue un bon album propre à satisfaire non seulement les collectionneurs et autres back-packers agaillardis par les années passées, mais aussi les curieux avides de découvertes musicales et autres Hip-Hop headz.