Veust de retour en forme avec Alley Oop

Sur Alley Oop, le OG originaire de Vallauris continue d’asseoir son retour en force. Il y a du Memphis dans les charleys, du New York dans les flows, mais la voix rocailleuse et l’attitude de taulier au regard froid derrière ses verres teintés sont le pur produit du 06. Est-il encore nécessaire de rappeler que la côte est l’une des terres de rap les plus importantes du pays depuis au moins l’époque de l’école Napalm ? Il suffit de prêter l’oreille une seconde à l’assurance qu’un Veust sûr de son statut déploie sur  les dix titres d’un disque percutant comme une patate de daron dans l’estomac pour se convaincre que non.

La saison de Veust s’est avérée aussi longue et chargée de moments d’héroïsme qu’un hiver à Westeros, mais cet album, qui devait initialement s’intituler Veust Do It, est enfin arrivé. Pour l’occasion,  il a rassemblé une équipe de petits jeunes derrière lui – ça a d’ailleurs toujours été sa démarche ces dernières années. Entre sa proximité avec Don Dada et les travaux menés depuis une bonne décennie avec l’équipe DBF, il a conforté petit à petit sa place de tonton, et les neveux Ratu$ et Alpha Wann sont descendus croiser le faire avec lui.

Réussir à trouver l’équilibre entre la virtuosité technique et la densité du vécu qu’il dévoile a toujours été une des forces de Veust (« Vécu c’est aussi important que les punchs et le flow »). Avec vingt ans de rap dans les dorsaux, la formule est désormais rodée : le MC livre un album en forme d’inspection des lieux, de tour de piste juste histoire de mettre un coup de pression et rappeler à tout le monde qui il est.

Pour autant, le rimeur du 06 ne se contente pas de se reposer sur ses acquis : Alley Oop poursuit le processus d’ouverture entamé dans la série d’EPs sortis entre 2018 et 2019, où il s’autorisait déjà quelques passages chantonnés. Certains titres, et notamment « Repeat » avec Siloh, laissent deviner un autre visage du rappeur tant sur la forme, plus mélodique, que sur le fond, plus sentimental. Mais l’ADN reste inchangé : c’est celui d’un artiste sûr de son fait, capable d’alterner entre les envolées de gangster mystique (Un seul dieu, deux livres saints / Trois n****s dans le 4 litres 5 / 6 bullets dans le calibre zin / Sept cieux, faut pas finir au sous-sol) et les punchlines graveleuses (D’où j’viens on apprend pas à bibi sur une manuelle / Carré d’as mais derrière les lunettes c’est pas Bruel / C’est pas une sainte mais elle manie le manche / Donc la sœur est manuelle), proférées de sa voix caverneuse sans la moindre once de pression.