Lucio Bukowski sort Oderunt Poetas

« Je n’attends pas mon heure, j’établis juste mon propre fuseau horaire. » Avec ce qui doit être son vingtième disque ou presque depuis mars 2010, Lucio Bukowski est parfois perçu comme un stakhanoviste (CF notre bilan de l’an dernier), et il le sait. C’est peut-être pour cela qu’il rétorque ces quelques mots sur Oderunt Poetas, son dernier album en date, sorti en ce mois de juin. Comme pour bien dire qu’il s’adressera autant de fois qu’il lui semblera nécessaire à ceux qui haïssent les poètes. Ici, c’est treize pistes durant, réalisées avec le pilier de L’Animalerie, le beatmaker Oster Lapwass. Et dans un habituel empilement de références, préférant les tapis persans et le single malt aux ambiances merdiques des clubs (l’excellent « Kejserens Nye Klaeder »), épaulé par Nikkfurie et rappant au milieu des oeuvres de Yoann Merienne, Lucio Bukowski continue de travailler son art raffiné, définitivement acide et toujours un tant soit peu misanthrope. Notamment celui dédié à un monde peuplé d’ecchymoses et qui se spécialise dans les comportements anesthésiants. Peut-être pour cela que le clip d’ « Eau en poudre » convoque John Carpenter et les messages subliminaux d’Invasion Los Angeles. Et si la productivité du rappeur de L’Animalerie force autant le respect qu’elle peut le rendre difficile à suivre, une chose est sûre : elle est l’une des meilleures paires de lunettes de vue du rap actuel.