Sorti en hiver dernier, SOLSAD a l’étoffe d’une œuvre intemporelle, qui accompagne les saisons de vie, en tout cas celles de Zamdane. L’artiste étonne par son approche poétique tant dans la musicalité que dans l’écriture. Il se plonge dans une introspection saisissante, une traversée des émotions où la mélancolie qui le caractérise et l’espoir se mêlent, sur la ligne d’une narration menée avec précision, presque picturale. Cet opus, construit en deux disques comportant respectivement dix titres, révèle des morceaux d’histoire toujours aussi sincères.
L’ensemble musical est réalisé avec minutie, produit et coordonné principalement par Thug Dance, créant une harmonie quasi-parfaite sur la bonne heure d’écoute des disques. Les premières notes tintent avec « Mouchkila » et les paroles du père de Zamdane en darija marocain, esquissant dès les premières secondes le motif du récit de SOLSAD : mûri mais pas moralisateur. À la manière d’un conte, le personnage principal qu’incarne Zamdane revient sur les péripéties de sa vie comme avec « À ma guise » ou « Audi GT », ainsi que sur les fragments d’espoir avec « Lalalala » ou « Si on s’aimait ». En chemin, il fait appel à huit compagnons qu’il croisera au détour de sa peine pour les morceaux « Alouette » en featuring avec Josman et « Boboalam » avec So La Lune ; des perspectives plus lumineuses pour les morceaux « Youm wara youm » en featuring avec Kekra et « Noum » avec Tif ; de la colère pour les morceaux « Loin d’ici » en featuring avec Niska et « Mélancolie criminelle » composé en partie par Sofiane Pamart ; et enfin de l’apaisement pour les morceaux « Le grand cirque » en featuring avec Pomme et « Si on s’aimait » avec Zaho. Le nombre conséquent d’invités n’évince pas la présence ni l’essence du rappeur et tend même à le sublimer. De quoi en retenir la profondeur.
L’œuvre se distingue également par l’analogie omniprésente de la peinture et la musique. Le marseillais calque l’effervescence de ses émotions sur sa toile avec un rapport aux couleurs profond, notamment sur le morceau « Stylo magique », dans lequel il dresse un tableau vivant empreint de son vague à l’âme reconnaissable. Le tout, adroitement interprété. À travers des textes finement ciselés, c’est également une approche plus mélodique qui ressort, portée par la présence marquée du chant et par des influences allant de la trap à la house en passant par le chaâbi. Loin de se complaire dans une obscurité totale, Zamdane propose ici une fresque complexe et dense, portée par l’intention de comprendre le monde et surtout le sien. SOLSAD, c’est ressentir les coups de pinceau d’une vie où chaque détail compte. – Inès