Rap canaille historique Marc Nammour et Loïc Lantoine – Fiers et tremblants

Fiers et tremblants. Sans faux semblants surtout. Et laissant souvent des frissons. Deux voix, un unisson. Marc Nammour, rappeur au phrasé limpide, aux engagements de canaille et aux milles et une vie de sans-voix tracées par une plume dans la paume de sa main. Loïc Lantoine, autoproclamé chanteur de « chanson non chantée ». Gouailleur, timbre de fort en gueule à la Bohringer, allure hirsute à la causticité façon Tom Waits. Les deux hommes lancés dans des récits de vie et des façons d’être, dignement discrètes, farouchement tremblantes. Deux voix qui s’accordent pour chanter les doutes, narrer les joutes d’existences anonymes dans un monde de vainqueurs. C’est sensible, touchant, riche en mots au point qu’il est difficile de trouver les bons pour en parler autrement que par une écoute. Silencieuse évidemment, dans ce tissu instrumental fait d’un fin tapis électronique, aux charlestons rapides mais délicats, aux nappes sonores dont le tissu n’est pas outrageusement synthétique et où les rêves fébriles prennent parfois l’allure de libérations cartoonesques (« Fantaisie »). Une œuvre musicale qui a la tendresse d’une certaine bande dessinée. Celle qui ne fait pas des naïfs les dindons de la farce. Calvin & Hobbes quelque part à Dunkerque. Larcenet quelque part à Montreuil. Les trois anciens des Vieux Fourneaux catapultés dans une rêverie sous les étoiles. Il y a du rap dans ces quelques vers bien remplis, dans ces mélopées accompagnant anonymes et invisibles, et dans ces associations d’idées fleuries qui repoussent le chemin de la tombe. Fiers, tremblants, mais surtout intensément vivants. – zo.