Bulle d'air indépendante Declaime – The Last Stand

Présent sur disque depuis 1995 et une apparition sur le Coast II Coast de Tha Alkaholiks, Declaime fait partie de cette scène boom-bap de la côte ouest souvent appelée Left Coast : à gauche sur la carte des États-Unis et délaissée, par rapport au rutilant et mercantile gangsta rap de Death Row et au talent indéniable d’un certain Dr. Dre. Et bien rien n’a changé depuis la fin des années 90 pour Declaime. Il agit toujours dans une certaine confidentialité, brouille les pistes dans les années 2000 en sortant des disques sous son vrai nom Dudley Perkins sur le label Stones Throw, et fonde en 2008 le label SomeOthaShip Connect avec Georgia Ann Muldrow, sa compagne d’alors et mère de ses enfants. Aujourd’hui séparés, l’ancien couple a travaillé toutefois ensemble sur le dernier album de Declaime The Last Stand. Un album qui arrive quelques mois après In The Beginning vol. 1, album recueil de titres enregistrés avec Madlib entre 1993 et 1996. Voisins dans leur jeunesse au sein de la ville d’Oxnard, les deux artistes feront leurs classes ensemble. Declaime apparaît sur le premier album de Lootpack, Madlib produit une bonne partie de Andsoitisaid et la totalité de A Lil Light. Les deux auront leur propre chemin, avec plus de lumière pour Madlib, mais à eux deux ils créent un boom-bap poussiéreux californien prolongeant l’héritage de Pharcyde, Souls Of Mischief ou Hieroglyphics. Un héritage que l’on retrouve en 2021 sur le label de Declaime avec deux EP d’une dizaine de titres, celui de Hiero (Soil) et celui de Bread of Kaliwild (A breath of fresh air auquel participe Nottz sur trois titres), et surtout deux disques de son fondateur : In the Beginning vol. 1 donc, et The Last Stand.

Déclaime et Madlib ont créé à eux-deux un boom-bap poussiéreux californien prolongeant l’héritage de Pharcyde, Souls Of Mischief ou Hieroglyphics.

Si le premier a valeur d’archives, le deuxième est exempt de poussière. Le mix y est clean. La soul, le jazz, le « fonk » et des expérimentations en terres électroniques s’y mélangent. Et c’est peut-être là où le bât blesse pour Declaime. Avec l’économie de trois titres pénibles, il aurait pu faire de The Last Stand une pièce parfaite au son chaleureux et organique. Les aventures synthétiques de « Lions & Gorillas », un trop long « Chewin' » et le très mal agencé « Killer B » entre deux grands morceaux soulful que sont « Forgotten Roads » et « Sunshine & Rain » gâchent légèrement l’écoute de son dernier opus. Trois fausses notes pour quatorze autres élégantes où Declaime navigue dans une quête spirituelle et parle de famille, de Dieu, de guerre spirituelle et de transmission. Dans le calendrier effréné de sorties que les plateformes de streaming nous servent depuis quelques années, entre les zumbas drillesques et les mélodies noires façon Griselda, The Last Stand est un refuge, une œuvre perfectible, mais dont la substance principale est délicieuse. Un rempart mystique d’où l’on peut observer, tranquille, la multitude qui grouille sous la pression d’un monde qui veut toujours aller plus vite. – JuldelaVirgule