Événement

Parution du premier numéro de Groove

L’année débute avec un nouveau venu dans la presse spécialisée. Le premier numéro de Groove sort, avec Lauryn Hill en couverture et Skyrock comme partenaire. Sa particularité ? Un CD sampler de dix titres baptisé Into the Groove qui accompagne le magazine et permet chaque mois de retrouver les morceaux qui cartonnent en radio, mais aussi les œuvres d’artistes moins exposés. La galette inaugurale réunira ainsi Lauryn Hill, bien sûr, Nas, DJ Krush et le chanteur de reggae Luciano. Au fur et à mesure de l’existence du titre, les disques samplers s’allongeront, accueillant même des clips, et s’orienteront davantage sur le rap français, comme le contenu écrit de Groove. À sa création, la magazine cible essentiellement les 15-25 ans et sa ligne éditoriale se veut éclectique, portant sur ce qu’on appellerait les « musiques urbaines » aujourd’hui. L’aventure durera dix ans et 114 numéros. Lancé par les éditions Freeway, qui seront absorbées par IXO Publishing en 2000, le magazine connaîtra des premiers remous en 2004 après le dépôt de bilan de la société. Le glas sonnera en 2007, quand l’éditeur qui avait repris Groove, Cyberpress Publishing, mettra à son tour la clé sous la porte.

Frank Frejnik

(secrétaire de rédaction et journaliste à Groove en 1997)

« L’idée de base était de créer un magazine sur la black music. Elle a été développée dans les grandes lignes et quand elle a reçu le feu vert financier de l’éditeur, tout s’est décanté très rapidement. En deux ou trois mois, le premier numéro était bouclé. Les éditions Freeway avaient pour habitude de réagir rapidement en créant de petites équipes autonomes pouvant s’appuyer à la fois sur les autres rédactions existantes de l’éditeur et sur la structure administrative de l’entreprise. Rock Sound, sorti par Freeway également, existait depuis plusieurs années et possédait un carnet conséquent de pigistes et de contacts professionnels. Pour lancer Groove, il n’y a eu qu’à puiser dedans et à faire jouer les relations. C’est souvent les ventes des deux ou trois premiers numéros qui décident de la pérennité et de la légitimité d’un magazine. Mais pour Groove, ça a tout de suite fonctionné. Il y avait un avantage certain : le CD sampler offert.  À l’époque, ce n’était pas chose courante. Les CD du commerce coûtaient cher, alors avoir un CD de dix titres ou plus gratuit dans un magazine était un sacré bonus. C’était une pratique qui se faisait déjà dans le milieu rock underground et que Freeway finira par étendre à tous ses magazines musicaux. Ce « plus produit » avait pratiquement fait doubler les ventes de Rock Sound quelques mois auparavant. Avec Groove, ça a tout aussi bien marché. C’est vite devenu un média important dans le milieu, notamment parce que les labels ou les artistes pouvaient diffuser un titre en avant-première et à grande échelle (le CD était pressé à 50 000 exemplaires) et faire le buzz presque immédiatement. Au départ, la ligne éditoriale de Groove portait donc sur la black music en général et se voulait plus proche de L’Affiche que de Rakidal ou de RER. Le Hip-Hop a pris de plus en plus de place, notamment le rap français car c’est définitivement en 1997 que tout a explosé : la diffusion sur les ondes nationales, les énormes ventes, l’explosion des labels indépendants, les signatures en majors, etc. Groove était un magazine d’actualité, il devait suivre cette éclosion. Le positionnement sur le rap a été définitif lorsque d’autres journalistes ont été recrutés, notamment Arnaud Fraisse — qui deviendra plus tard rédacteur en chef du magazine — et Eglée de Bure, des gens qui, contrairement à moi, naviguaient dans le milieu Hip-Hop depuis longtemps. Avoir une équipe résolument « crédible » a été la meilleure chose qui soit arrivée à Groove. » (Témoignage recueilli par L’Abcdr du Son, décembre 2017)

Précédent Suivant