Chronique

Piloophaz
Hymne à la folie

Skyzominus Prod - 2001

Alternant sorties en solitaire (démo « Pile ou face », album « Noyau dur ») et expérience de groupe au sein de la Cinquième Kolonne (mixtapes « Mikrophage », album-démo « Etat de lieux »), Piloophaz présente en 2001 un maxi 6 titres.

« La Cinquième Kolonne me permet de ne pas complètement me complaire dans la déprime. Ce que je fais tout seul, c’est bien plus glauque ». Caractères gothiques blancs sur fond noir, dessin moyenâgeux représentant une ronde du diable, photos de cadavres ensanglantés, CD pressé à 666 exemplaires : l’artwork savamment travaillé d' »Hymne à la folie » annonce en effet un univers morbide.

Dès l »Intro’, un voile sombre et un air vicié envahissent les tympans, pour ne plus les quitter jusqu’à la fin du maxi. Une ambiance cohérente de bout en bout pour un puzzle de mots rappés, samplés et criés. Déclinée jusque dans les thèmes choisis et les termes employés, la noirceur prend forme humaine, celle de Piloophaz. Toutefois, cette figure ne fait qu’apparaître et disparaître, laissant place à des extraits de films. Les intervention de Piloophaz (intégralement retranscrites) se font rares et d’autant plus percutantes.

On finit donc par ne plus très bien savoir si Piloophaz se cache derrière les extraits de dialogues cinématographiques ou si les passages visiblement autobiographiques ne comportent pas une part d’emphase. Puis, devant l’émotion ressentie, on se rend compte que l’important n’est pas là. Car les collages bruts effectués semblent s’assembler pour ne plus constituer qu’un tout. Un tout définitivement oppressant et impudique. Impudique, et pourtant touchant. Oppressant, et pourtant fascinant.

Point d’orgue de ce maxi, ‘L’enfant du rasoir’ illustre magistralement l’intensité insufflée. Abordant un thème facilement racoleur, Piloophaz se contente d’un bref couplet rageur, l’intercalant entre deux voix féminines, l’une s’épanchant à en pleurer, l’autre énonçant un constat statistique glacial.

Seule légère ombre au tableau, l’invitation de son acolyte de l’époque, Fisto, sur ‘Skyzophrenia’. Reposant sur un retournement de situation final, le morceau s’auto-sabote de par son titre trop explicite. Reste donc un Piloophaz à son aise dans un rôle malsain et un Fisto moins convaincant, forçant à outrance le trait paranoïaque et angoissé. Dommage. Pour le reste, difficile d’y trouver à redire. Le timbre grave de Mö sur les deux premiers titres, les ambiances créées par Piloophaz, la basse électrique jouée sur ‘Rupture’ : l’ensemble s’accorde naturellement.

Son brut, propos cru : Piloophaz réussit là où il avait échoué sur ses précédents projets solos, à savoir créer un univers personnel, tout en le rendant perméable à l’auditeur. « Hymne à la folie » est décidément trop court.

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