Sidekicks

Il arrive. Tranquillement, Espiiem se prépare à envoyer au pressage un premier disque, Noblesse Oblige. Annoncé pour le 6 novembre prochain, ce long-format inaugural cultive encore le mystère. En mai dernier, on en découvrait un avant goût avec « 777 », dans les rues enneigées de Montréal. Depuis, plus rien. Jusqu’à cette semaine : sur nos murs Facebook, la nouvelle se répand, Espiiem balance un nouvel extrait du fameux disque avec « Suprématie ». Piano mélancolique, guitares lyriques, et paroles de battant : le titre est une très belle surprise. Un mélange de nostalgie et d’ambition, agrémenté d’une très bonne incursion du Toulonnais Deen Burbigo, décidément toujours présent dans les bons coups. Ça respire la maturité, la technique, et l’intelligence. On ne peut que s’incliner.

D’accord, le retour des X-Men est annoncé depuis plusieurs années. Seulement, 2015 semble être la bonne, celle qui verra enfin un nouveau projet de Ill et Cassidy atterrir dans les bacs. Le duo de Ménilmontant compte même faire les choses en grand puisqu’ils sortiront un EP, Modus Operandi, mais également un best-of au mois de novembre. En attendant de les retrouver sur disque, vous pourrez les observer sur scène le 17 octobre à Canal 93 (Bobigny) mais également lors d’une rencontre privée qui aura lieu très prochainement (la date est tenue secrète pour le moment). Rendez-vous sur notre page Facebook afin de gagner des places pour ces deux événements.

J'appuie sur la gachette

Le nouveau suicide de Tuerie Balboa

Après Murder Demo l’an dernier, c’est toujours flingues, gants de boxe et B-Sides pour un Tuerie Balboa cette fois plus libéré. En s’attelant à rapper sur quelques une des productions les plus marquantes de ces derniers mois, sa Kurt Cobain musique s’amuse et s’installe comme un gamin dans un square. « Rico » de Meek Mill et Drake, « U Mad » de Vic Mensa et Kanye West, ou « Finis-les » d’Alonzo, pour ce côté ci de l’Atlantique, voici autant de terrains de jeu loin des détonations qui résonnent dans un garage de Seattle.

Sur ses neuf titres, le Boulonnais entremêle brutalité et sensibilité, celles d’un garçon évoluant visiblement dans un univers violent et empreint de solitude. Il rappe à propos des filles. Il y a son ex et les autres. Mais aussi les cœurs brisés et les nuits de luxure. Il chante la vie de rue, dédicace son « avocat juif », Rihanna, et sa psychologue, dont il dit avoir peur qu’elle « écarte ses cuisses en consultation comme le logo de [ses] VI . »

Temps forts de cette courte mixtape , « Madame va chercher l’argent » ou encore « Chris Brown », textes déposés comme des linceuls sur des faces B de Partynextdoor ou d’un certain Young Thug. Une influence tatouée comme l’empreinte d’un canon sur la tempe chez Tuerie Balboa. À vrai dire, les requiems doivent rarement leur célébrité au hasard. Et encore moins ceux des boxers, dont l’entrée sur le ring se fera cette fois sur un air lancinant de MGK. Avec la Suicide Mixtape, le dernier round est encore loin.

Il y a un peu plus d’une semaine, Drake et Future cassaient Internet avec la sortie (presque) surprise de What A Time To Be Alive. Peu importe que la mixtape ne soit pas complètement à la hauteur des attentes qu’on pouvait légitimement placer en elle, la réunion de deux des hommes forts du premier semestre est déjà un des grands moments de l’année rap 2015. La preuve : depuis sa sortie, les memes n’en finissent plus de pleuvoir, le hashtag #WATTBA est encore un des plus utilisés sur Twitter et « Diamonds Dancing » semble avoir déjà changé l’existence de quelques auditeurs. Mais « Jumpman » est le titre qui a le plus inspiré les internautes. Alors qu’il vous est désormais possible d’écouter Drake répéter le mot Jumpman pendant 43 minutes (pourquoi pas après tout), un jeu inspiré du morceau vient d’apparaître sur la toile. Le concept ? Vous choisissez votre personnage (Drake, Future ou l’honorable Metro Boomin) et vous devez… sauter le plus haut possible. Internet est plein de ressources.

On aime la discrétion de Jazzy Bazz. Un visage que l’on ne voit certes pas tous les quatre jours mais qui sait sortir de sa tanière pour rappeler son approche singulière de la rime dans la jeune stratosphère parisienne. Après avoir annoncé la sortie de son premier disque solo (automne 2015) avec « 3h33 » au début de l’été, le voici de retour avec une gourmandise au groove évident. Rompu aux histoires d’amours difficiles et aux amis perdus de vue, Jazzy Bazz conte sur « Les Chemins » la réalité du quotidien, aidé d’une production nocturne et langoureuse signée Monomite. Les gens se rencontrent, se fréquentent, et parfois se séparent. « Naïf est celui qui ne le sait pas. »

Boom bap ? Pas boom bap ? La réponse est parfois plus difficile à donner qu’il n’y paraît tant l’expression est devenue un terme générique utilisé pour étiqueter des morceaux, projets et artistes très différents. D’autres fois, par contre, pas besoin de réfléchir trois heures pour savoir qu’on se trouve face à une incarnation parfaite du genre. C’est le cas avec ce morceau clipé des Canadiens de First Division, dont on devine dès les premiers scratches qu’il redonnera un peu de patate au moment de s’engouffrer dans le métro les matins d’automne. Le projet dont il est le second extrait, Overworked & Underpaid, vient tout juste de sortir et la liste des producteurs (Marco Polo, DJ Premier, Jake One, Kev Brown et les Doppelgangaz, notamment – pas mal, pour un premier album) laisse supposer que « Pure » ne sera pas le seul titre à tourner en boucle dans le baladeur.

Discret, distant, dispo et visiblement prêt à disparaître, June Marx est un MC et beatmaker qui cultive le mystère. On le sait originaire de Brooklyn, ancien militaire (et très branché « art de la guerre »), membre du duo Twin Perils avec Lone Ninja. Il a également l’habitude de produire intégralement ses solos et est adepte d’un rap que l’on qualifierait volontiers d’épuré, de calme mais déterminé – parfois presque de contemplatif et de « doux » (mais ne le répétez pas). Surtout, June Marx est particulièrement prolifique. En 2014, il abattait deux très belles cartes, l’album Eve of Victory et le EP Veterans Day – à l’écoute, comme ses autres disques, sur sa page Bandcamp. L’autoproclamé « torchbearer » a poursuivi sur sa lancée en 2015, où sont sortis successivement un EP avec le rappeur de Chicago Resolute (Endless Winter), un album (Legendary Tactics) et un « prélude » à son projet de 2012 Seven Trumpets Sound. D’ici peu devraient également paraître Endless Winter : Avalanche Edition LP (annoncé par un premier extrait produit par Giallo Point), ainsi qu’une galette solo/compilation au titre prometteur, Vigilante Vaults Vol.1, Love & War, dont un nouvel extrait, « Coming of Age », a été mis en ligne il y a quelques jours sur YouTube, rejoignant la flopée de « lo-fi leaks » déjà balancée par June Marx.

Avec déjà dix albums au compteur et quasiment au moins autant de mixtapes, Oddisee ne se contente pas de monter régulièrement au charbon. Il a constamment les deux pieds dedans. Toujours ambiancé par les projets rap infusés au jazz, il s’est construit une discographie de pharaon, récemment étoffée de The Good Fight, un nouveau long format consistant au possible. Tête d’affiche à La Bellevilloise le mardi 6 octobre au soir, il jouera à domicile avec son groupe The Good Compny. Une équipe de musiciens étoffée par le chanteur Olivier DaySoul qui devrait donner un peu plus de relief à un medley de morceaux illustrant un parcours hors-format. Si tu t’es fait trouer les poches ce week-end, il te reste une option : notre fil Twitter sur lequel on fait gagner quelques places.

East Side Story de Kid Frost est votre disque de chevet ? Les Princes de la ville votre film culte ? Vous ne sortez jamais sans votre chemise Pendleton avec le col soigneusement boutonné et, chaque 31 mars, vous brûlez un cierge à la mémoire de Selena ? Alors le nouveau clip de The Jack Moves saura réveiller le chicano qui sommeille en vous. Après avoir visité une esthétique pimp égarée entre Blaxploitation et David Lynch, puis un noir et blanc hivernal, le duo de Newark propose cette fois avec « Joyride », comme son nom l’indique, une virée joyeuse aux quatre coins de la Bay Area. Lowriders rutilantes et cholas surmaquillées, tatouages et moustaches, toute l’imagerie et tous les codes de la communauté américano-mexicaine sont scrupuleusement représentés. Une déclaration d’amour bien plus qu’un pastiche moqueur, portée par le falsetto aérien du chanteur Zee Desmondes et les envolées new oldies du compositeur Teddy Powell. Fermez les yeux : le morceau ne dénoterait pas le moins du monde entre « Somebody Please » de The Vanguards et « I’m Sorry » de The Delfonics sur n’importe quelle compilation de old school classics. Il n’y a pas que Lana Del Rey pour remettre au goût du jour une vibe 60’s au charme désuet. Les Charles & Eddie 2015, qu’on vous présentait à la fin de notre rétro R&B, sortiront leur premier album le 30 octobre chez Wax Poetics Records. Orale !

Qui se souvient encore de Push comes to shove, le premier album de MED ? Plus grand monde. Accouché il y a dix ans, le premier essai un peu poussif de l’ex-Medaphoar valait surtout par la qualité de sa production, confiée à Madlib, Jay Dee, Oh No ou Just Blaze. Associé à un autre rappeur col bleu, Blu, notre rappeur au phrasé nonchalant est parti fouiller dans les productions en friche de Madlib pour réaliser Bad Neighbor : un quinze titres avec une belle liste d’invités infusée par la grande famille Stones Throw (Aloe Blacc, MF Doom, Anderson .Paak, Mayer Hawthorne ou Dâm-Funk). « Knock Knock », premier extrait, ne donne pas seulement le ton. Il ressuscite une esthétique empreinte de bricolage lo-fi avec sa boucle tordue et le phrasé rugueux de l’éternel vengeur (et escroc) masqué. Une belle petite sauterie qu’on croirait directement échappée du début des années 2000.