Fitzroy sort Lucifer

Retour en 2005. Sur la compilation À L’instinct, menée par le Grenoblois Shaolin, deux titres en (quasi) ouverture du disque mettaient une sacré claque. Les MCs auteurs de cet aller-retour d’une main désinvolte et sonore vers le visage de l’auditeur ? Taipan et son « C’est triste »,  à l’époque où il officiait encore strictement en binôme avec Chi. Et Fitrzoy. Son titre s’appelait « Gardien du temple » et était mené d’une voie âpre, puissante et passée au crépi. Le Toulonnais, qui n’en était pas à son coup d’essai, envoyait ses idées bien arrêtées, entre clairvoyance, rigueur et sarcasmes rappés avec le torse bombé. Depuis ? Un album en 2008 aux allures de semi-bootleg et puis plus grand chose à l’exception de quelques apparitions sporadiques. Et est finalement arrivé 2017 avec d’abord un titre sorti sur le (très bon) album de Corrado, puis un EP sorti en toute discrétion. Fitzroy y rappe désabusé, dans une atmosphère électrique, toujours avec cette voix singulière, puissante et inégalable. Démontant les idoles qu’elles soient commerciales ou religieuses, touchant du doigt une spiritualité qui ne porte pas de nom et poussant ses paroles et son flow avec lenteur au bord du bout du vide, celui qui s’était autoproclamé « Gardien du Temple » malmène en un quart d’heure le monde moderne et ses édifices. L’irrévérence est rauque, triste, et elle tient en quatre titres à écouter au calme. Pour mieux mesurer à quel point l’usure s’est désormais substituée l’urgence.