Interview

JR Ewing

Figure du graffiti, co-fondateur du label Arsenal Records et de Chronowax, DJ reconnu pour ses séries de mixtapes chargées en hémoglobine, JR Ewing est aussi un enfant du rock devenu un des pères du hip-hop à la sauce hexagonale. Rencontre riche en anecdotes et portrait des vingt dernières années, de Sidney au poulet-oeuf de Crenshaw Boulevard en passant par des seaux de bouteilles, des chambres d’hôtel ravagées, Guillaume Canet et Mobb Deep.

, et Avec la participation de Somnoleur 140

Abcdr Du Son : Quels ont été tes premiers contacts avec la culture hip-hop ?

JR Ewing : [immédiatement] Tout a commencé avec Sidney, tout simplement. J’avais la chance d’avoir des parents qui écoutaient du rock, celui des Stones, des Stooges et compagnie. Vu que c’était l’âge, il a bien fallu que je fasse ma crise d’adolescence. Elle s’est exprimée avec le rap. [Rires] Quand le hip-hop est arrivé, entre autre à la télé, forcément… On est tous un peu passé par là, même des gens comme Joey. Et puis… en fait, non. Mon premier contact avec le Hip-Hop ce n’est même pas Sidney. C’est un livre d’histoire géo’ que toute notre génération, les 35-40 ans, s’est coltinée en classe. A la page New York, il y avait en guise d’illustration une photo avec un métro graffité. Et ça je l’ai vu avant que Sydney débarque. D’ailleurs, ce livre est souvent revenu dans des discussions durant de longues nuits alcoolisées entre amis : « Non ?! T’avais le même bouquin d’histoire géo ?! Moi aussi !« . On ne savait même pas ce que c’était mais ça nous a touchés.

A : C’est plus que jamais générationnel en fait.

JR : Oui, c’était très générationnel.

A : Après, tu as touché à plein de choses différentes, du graffiti à la production en passant par la radio. Qu’est-ce que t’as préféré, si t’as préféré certains trucs à d’autres ?

JR : Je n’ai pas préféré. Je vis. Je n’ai pas choisi les trucs qui me sont tombés dessus. J’ai eu la chance d’éviter les conneries des carrières de bureau de merde ou d’ouvrier. Je viens d’un milieu où il n’y avait pas spécialement beaucoup d’argent. Finalement, parmi les trucs qui me sont tombés dessus certains m’ont rapporté, d’autres pas. En tout cas, je ne fais que ce dont j’ai envie. J’fais jamais ce qui m’emmerde. Si je fais tomber quelque chose par terre et que je n’ai pas envie de le ramasser, alors je ne le ramasse pas. Je trouverais bien quelqu’un que ça gênera et qui le ramassera [Rires]. C’est aussi simple que ça.

A : Chaque truc que tu as fait s’est donc fait au fil de l’eau, au gré des rencontres ?

JR : Ouais, c’est du hasard. Ça s’est passé comme ça mais il faut quand même savoir saisir les opportunités et se démmerder, surtout quand y’a du zeille-o. Si un jour j’ai des gosses je leur souhaite ça : saisir les opportunités pour faire des trucs qui leur plaisent.

A : Rapper, ça t’a tenté ?

JR : En fait, j’ai commencé par ça. Enfin, j’ai d’abord essayé le break mais je crois que je faisais de la tecktonik avant l’heure [il sourit]. Je n’étais pas très doué en danse, malgré le prisme de Sidney. J’ai écrit mes premiers textes en 1985/86. On parlait de la dépouille, de nos problèmes de l’époque. Mais je crois que j’ai bien fait d’arrêter. Vu que j’écoutais vachement de rap, que Dee Nasty et Nova sont arrivés, ça m’a verrouillé.
Moi, je vivais dans le 77, près de Melun, dans un quartier où c’était dur niveau caillera. Il y’avait les grosses équipes de Black Dragons et compagnie, et je n’ai jamais été un gros balèze. Alors imagine à l’époque, quand tu es un jeune petit blanc au milieu de toute cette racaillitude, il fallait exister. Ça passait par conserver son blouson, vendre ceux des autres, etc. [Rires]. Bref, finalement, je me suis engouffré dans le tag. J’ai cherché à m’y faire un nom et je crois que je n’ai pas eu complètement tort.

A : Peux-tu nous décrire l’atmosphère de cette époque, entre autre de cette fièvre du graffiti ? Comment ça se passait, quelle était l’ambiance ?

JR : Ca n’avait rien à voir avec aujourd’hui. Quand on parle d’insécurité aujourd’hui ça me fait doucement rire. C’était très très dur. Je me rappellerai toujours quand j’ai rencontré Crazy JM des IZB en 86, ou peut-être 87. Il y avait encore une première classe dans le métro. Quand tu croisais un b-boy dans un wagon ce n’était jamais anodin. Tu ne pouvais pas faire semblant de ne pas avoir vu l’autre. Ca commençait toujours par de l’intimidation, des trucs du genre baston de regard. Il fallait se jauger avant de se parler. On n’était pas beaucoup en plus.
Et puis globalement, l’ambiance de l’époque était violente. Tout marchait en équipe, surtout la dépouille. Sur les Champs, les bourgeois paniquaient en sortant de chez Weston. Ils y allaient pourtant avec leurs parents, mais parfois même les parents se faisaient taper. C’était la même devant chez Marithé et Françoise Girbaud à Etienne Marcel. Bref, c’était pas partout la fête, alors aujourd’hui, en comparaison, il se passe pas grand-chose. Même les vols de portables, souvent ce sont des conneries à raconter aux assurances. Nous, c’était pas ça. Tu achetais une crêpe à la sortie du Palace…. il fallait voir les équipes. Même ici. [NDLR : l’interview a lieu à Odéon] Il y a dix ans on appelait ça Crenshaw Boulevard. Le snack que tu vois là, derrière nous, c’était celui qui faisait les meilleurs poulets-œufs. Et il était ouvert toute la nuit. Quand tu débarquais vers 4 heures du matin ici, c’était devant des rangées de BMW squattées par des cailleras en Lunettes Cartier et Tacchini de la tête aux pieds. Maintenant, regarde comment c’est cool. On est là, on fait notre petite interview tranquille, et je peux même poser mon iPhone sur la table, il va rien se passer ! [Il rigole]. Alors qu’il y a dix ans, au même endroit, à certaines heures ça pouvait vraiment être tendu.

A : Paris a de toute manière beaucoup changé…

JR : Complètement. Moi, étant affilié Black Dragons, il y a dix ans, je ne pouvais pas mettre les pieds aux Halles. C’était le territoire des Requins. Le nôtre c’était Gare de Lyon et La Défense. Le seul quartier neutre était celui des cinémas, Opéra,  parce qu’on y allait le week-end voir des films avec nos meufs. Mais sinon c’était tendu. Je connaissais des Black Dragons – et Dieu sait que je les respecte – qui allaient aux Halles habillés en boubou et en famille, parce que la famille ça ne se touche pas. Aujourd’hui, c’est pareil sauf que c’est la tecktonik ! [Rires]

« Moi, étant affilié Black Dragons, il y a dix ans, je ne pouvais pas mettre les pieds aux Halles. C’était le territoire des Requins. »

A : A propos du Graff, toi qui a vécu l’épisode de la station du Louvre et les suites judiciaires qui sont allées avec, comment tu perçois la prise de risque aujourd’hui ?

JR : Aujourd’hui c’est puissant. Il y a deux-trois mois, je me suis permis de me faire un métro, pour le fun. Ça faisait quinze ans que je n’avais pas fait ça. J’étais avec les gens qu’il faut, en l’occurrence les UV TPK. Les gars, je dois dire qu’ils sont bien puissants quand même. Après je ne connais pas leurs motivations. La mienne c’était voir les trains rouler, voir les gens halluciner devant ton métro en se demandant si tout ça n’est pas légal tellement c’est abusé.
Aujourd’hui, j’ai du respect pour ces gars, parce que tout ça n’existe plus, et les mecs font quand même tout ça seulement pour une photo. Et en plus ils sont sur des quantités terribles. Moi je suis devenu une star après 100 métros vraiment peints, alors que de nos jours, des types comme Tran comptent les leurs par centaines. Et en plus dans le monde entier. Ça c’est respect.

A: Et par rapport à la prison ?

JR : Ils s’en battent les couilles les gars, ils font leurs allers-retours au placard et c’est tout. Moi, j’ai pas envie d’y retourner en prison mais c’est pas pour ça que je n’ai pas recommencé en sortant. Ce qui m’a fait arrêter, ce n’est pas la police mais c’est de ne plus voir mes trains rouler. Sans ça il n’y avait plus la motivation. On était là pour la sensation, mais aussi pour voir nos trucs. On n’avait ni bagnoles, ni caméras ni appareils photos. Alors ne plus voir tes graffs, tes tags…
En sortant de taule, après New York, je me suis installé à Amsterdam et là-bas, j’ai eu un métro qui a roulé quatre ans et demie. Quand j’y retournais, je n’avais aucune raison de prendre les transports, j’étais essentiellement dans le Quartier Rouge. Mais je les prenais quand même, simplement pour voir rouler les trains que j’avais peints un, deux, voire trois ans plus tôt. Ouais, c’était une autre époque. Je peux pas te dire si c’est mieux aujourd’hui, je peux même pas juger. Je trouve ça juste bien qu’il y ait encore des petits cons qui ravagent.

A : Tu n’as pas l’impression que c’est devenu un délire d’initiés ?

JR : Ah si ! C’est pour les initiés ! De mon temps, quand tu venais ici, à Crenshaw Boulevard, il y avait des Oeno partout. Quand j’allais au Bobino, j’étais une star, même auprès des gens qui n’en avaient rien à foutre du graffiti. Ils me connaissaient simplement parce qu’ils voyaient mon nom partout dans Paris. A l’époque, on le faisait vraiment entre initiés. Avec le Louvre, j’ai été dans les premiers à montrer qu’il pouvait y avoir une médiatisation. Et c’est ce que les gars cherchent aujourd’hui en prenant des photos et en les envoyant aux magazines. Le business est comme ça de toute manière puisque les engins ne roulent plus et que ça nettoie sec. La donne n’est plus la même. Ils le vivent d’une manière, moi je l’ai vécu autrement. Chacun sa période mais tant que ça continue, je suis content.

A : Avec Chimiste, tu avais monté Arsenal Records, qui a donné naissance à quelques albums majeurs comme Conçu pour durer, Le Combat continue, Le Vrai Hip-Hop. Quels souvenirs gardes-tu de cette aventure ?

JR : Quels souvenirs ? L’oseille, les putes et les chambres d’hôtels qu’on détruisait.

A : Rockstar !

JR : Ouais, Rockstar. Rockstar parce qu’on a bien pris des thunes et que ça a bien baisé. J’ai un souvenir d’une destruction de chambre d’hôtel dans un palace de Montreux après le festival du jazz. C’était les Lords of the Underground qui faisaient notre première partie alors que nous, quand on était jeunes, on les écoutait et on les voyait comme des stars. Bref, vu qu’ils ouvraient pour nous, ils avaient les meufs en deuxième main. Elles  redescendaient des chambres tagguées à l’onyx sur les nibards et sur le cul. Après j’allais chercher dans la boîte de nuit de l’aftershow des bouteilles de champagne. J’y voyais Lord Jazz et Doitall qui avaient les meufs déjà tagguées et un peu ouvertes [rires]. Mais après, pas con hein, vu que j’étais avec ma femme, la chambre d’hôtel que j’ai détruite c’était celle de mon ingé’ son. Je voulais garder la mienne propre [il éclate de rire]. Ça nous a coûté cher même si je n’ai jamais payé. En tout cas, je crois qu’on n’est pas prêt de refaire le festival du jazz de Montreux [il rit].
Cette période c’était de la bombe : tu es jeune, tout ça te tombe dessus, les meufs pleuvent de partout, on te donne des centaines de milliers de francs, tu fais des concerts en France, en Suisse, à New York, en Allemagne, que demande le peuple ?!

« Quels souvenirs ? L’oseille, les putes et les chambres d’hôtels qu’on détruisait. »

A : J’imagine que monter un label en partant de pas grand-chose, ça devait un peu…

JR : [il coupe] Non parce qu’on ne s’est même pas rendu compte que l’on montait un label. Au début on a voulu faire un vinyle. Il s’est un peu vendu, il a eu un peu de buzz et des propositions sont venues. Alors on a essayé d’avoir le maximum, et tout s’est enchaîné assez naturellement. Sur le moment on le vivait, on n’était jamais dans le calcul. C’est plutôt à posteriori que tu réalises que t’as fait quelque chose. Un gars comme Joey pourra te le dire, on a un peu le même parcours sur ces trucs là : ça nous tombait simplement dessus et on en profitait.

Aujourd’hui c’est plus pareil. Il y a le téléchargement. Par exemple, je donnais entre vingt et vingt-cinq patates à un artiste par album. Non remboursable, je précise. Désormais, demande aux artistes rap l’avance qu’ils touchent sur un disque. S’ils empochent 80 000 balles ils sont contents. Et on était indépendants en plus. Même si on avait une major derrière nous, ça partait d’un bon sentiment.  Alors imagine ce qu’on touchait en amont [Rires].

A : Tu es toujours en contact avec les mecs de La Cliqua ?

JR : Oui. On reforme le groupe.

A : Justement on voulait en parler…

JR : Je me doute. [Rires]

A : Vous reformez le groupe au complet ?

JR : Ouais.

A : Juste pour de la scène ou il y a plus derrière ?

JR : Pour le moment on ne sait pas. C’est comme au foot : match par match. Pour l’instant c’est le 11 Avril à Lyon. Après on verra bien pour la suite, selon comment ça se passe.

A : Vous avez dû négocier entre vous ou l’envie est revenue sans trop se retourner sur le passé ?

JR : Il a fallu négocier. [Rires]

A : Les rancœurs étaient tenaces quand même, non ? 

JR : Bien sûr. C’est normal, c’est comme ça. Même si tu es marié vingt ans avec la même femme, c’est pas rose tous les jours. Il y a des petits trucs qui traînent, je ne vais pas dire le contraire. D’ailleurs, c’est toujours compliqué. J’ai booké l’ingénieur du son ce matin en direct de Toronto. Il était 8 heures du mat’ et j’étais ivre mort. Tout est compliqué. Des trucs restent entre certaines personnes, mais c’est la vie.
Par contre pour le coup, par rapport à NTM, sans leur manquer de respect, ce n’est pas financier. On ne remplit pas un Zénith. Je pense qu’il y a quand même une envie. Avec les trucs comme les Myspace, on a tous été bombardés de messages. Sans être démago, il y a un moment où on sent que ça peut faire kiffer du monde, et ça c’est vraiment intéressant. Donc si ça rebondit, on verra bien… Si ça se passe comme on l’espère, on sait qu’on peut faire une bonne Madeleine de Proust, un bon kiff. Je connais des gens qui bougent de Paris exprès pour l’occasion… Et à mon avis ils n’ont pas tort, je pense que ça va bien le faire.

A : Tu évoquais NTM. Que t’inspire leur reformation ?

JR : Personnellement je kiffe. Joey c’est vraiment mon pote. Bien sûr il y a de l’argent en jeu, mais je le connais suffisamment bien pour savoir qu’il n’y a pas que ça. Tu marches dans la rue, qu’est ce que tu préfères ? Qu’on t’envoie des fleurs où qu’on te mette des patates ? Tu préfères les fleurs ! Eux-mêmes savent que NTM représente quelque chose de culte. Si Joey n’a pas tué sa femme, NTM ça reste quand même un peu les Noir Désir du rap français. C’est agréable d’être aimé, et il y a une part de ça dans leur retour.

A : Mais tu ne penses pas qu’il y a un pêché de nostalgie, de mélancolie ?

JR : Si peut-être et alors ? Ce sont nos plus belles années. Qui va nous jeter la pierre ? Pas les gens dans la salle en tout cas. Et tout le monde sera dans la salle. Pourquoi se priver ? Ça fait plaisir à tout le monde, c’est déjà complet même si c’était cher. Pourquoi se priver ?

A : Le côté Canal +, Grand journal, Denisot… ?

JR : [il coupe] Moi j’adore Denisot. Je le connais personnellement et c’est un vrai gars. Il n y a pas de souci. Je préfère que ça se reforme chez Denisot au Grand Journal, sur la plage horaire de Nulle Part Ailleurs, qui est la famille, plutôt que chez Cauet.

A : Tu as aussi participé à la création de Chronowax, société concentrée sur la distribution de disques mais qui a aussi œuvré dans la production et la promotion d’un paquet de rappeurs en France (Rocé, Karlito, Mehdi,…). Comment s’est présenté ce créneau ?

JR : Quand j’ai signé mon label deal chez Barclay, dès la sortie de Le Vrai Hip-Hop, je me suis rendu compte que la major était plus que larguée sur la distribution des vinyles. C’était avant Serato, Internet et compagnie. Avec Texaco on avait beau faire pas mal d’envois promo en direction des DJs, il en restait beaucoup qui n’étaient pas sur nos listings et qui ne demandaient qu’à acheter et jouer nos vinyles. J’étais harcelé par des mecs qui se plaignaient de trouver nos productions uniquement en CD dans pas mal de magasins. Polygram s’en sortait pas sur la distribution des vinyles. A la base, on n’a pas fait ça pour les thunes, mais juste pour que les vinyles arrivent bien dans les petits magasins. On savait même pas que quelques années plus tard on signerait en direct avec Richard Branson.
Il faut aussi savoir un truc, c’est qu’à l’époque, pour qu’un magasin vende les disques de majors, il fallait que le shop ait un compte avec plusieurs briques de caution. Mais tu crois que les petits magasins -de skate par exemple- intéressés par quelques vinyles d’un catalogue allaient ouvrir un compte chez Polygram pour ça ? Leur vocation ce n’est pas de vendre des disques. Et nous, on voulait pourtant que nos vinyles arrivent dans ces petits magasins. J’ai donc été voir Pascal Nègre, Olivier Caillard et d’autres, et j’ai réussi à sortir les vinyles de mon contrat pour organiser ma propre distribution. Mais vu qu’il me fallait un back-catalogue et que ma société ne pouvait pas être viable en se reposant seulement sur mes productions, j’ai fait en sorte de  mettre la main sur tout le catalogue vinyle de Polygram.
Derrière j’ai appelé De Buretel chez Virgin en étant sûr qu’il avait le même problème. Et là boum, rebelote. J’ai aussi récupéré leur catalogue. Cette démarche est montée en puissance, et finalement, on est devenu le distributeur officiel de Blue Note, on a fait les rééditions de tous les vinyles de Def Jam pour le monde entier. Une fois de plus, tout s’est fait petit à petit, en partant de la distribution de Le Vrai Hip-Hop puis des productions d’Arsenal Records.

A : Tu veux dire que tu ne calculais jamais à long terme l’impact de tes initiatives ?

JR : Si, au bout d’un moment, quand ça commence à vraiment marcher, tu es calculateur. C’est obligatoire. Mais sur le coup, non je ne l’étais pas. C’est seulement une fois que les choses prennent des proportions importantes que je commence à anticiper. Par exemple, je t’avouerais quand je suis arrivé chez Virgin pour Conçu pour durer, j’ai demandé un million, tout simplement parce que j’avais peur de pas demander assez. Dans ce cas, tu te dis qu’il vaut mieux placer la barre trop haut ; d’autant plus qu’il y avait des rumeurs qui disaient que c’était ce qu’avait touché Raggasonic. Ça nous a rendus un peu parano. C’est un milieu de requin, et si au bout d’un moment tu ne te mets pas à devenir calculateur tu te fais bouffer. Par contre, sur les initiatives, non, je n’ai jamais été du genre à tout prévoir et planifier.

A : Le public te connaît avant tout grâce à tes mixtapes. Un vaste sujet. Quelles sont tes influences à ce niveau ?

JR : Thug Music ! Ce que j’aime, c’est un certain type de son. Ceux qui connaissent mes mixtapes savent. C’est assez racailleux, mais après c’est tout un truc, qui est d’ailleurs celui qui manque peut-être à une grande part du rap français. A New York beaucoup de gars ne rigolent pas du tout. Tu vois aujourd’hui là-bas les gars dans leurs textes disent que si tu prends pas de ke-co t’es un bouffon. Je ne sais même pas si ça arriverait en France. Dans le rap français, au mieux un mec te dira « j’en vends« . Wouah ! Quel exploit baby ! Ça me fait rigoler. Si t’en prends pas mais que tu en vends, tu vends surement de la merde. Et comment tu fais pour la goûter ? Tu prends ton petit ustensile comme dans Les Experts, et si ça devient bleu elle est bonne ?
Attention hein, je ne dis pas que pour autant il n’y a pas de bouffons à New York. Mais il y a surtout des gros gars, qui ont un énorme vécu qui alimente forcément leurs textes. Les mecs ont grandi dans des univers de folie, dans des ghettos de dingue où ils ont appris la culture des armes. Automatiquement, au niveau de leur lyrics, ça leur ouvre un champ qu’il n y a pas ici. C’est ça que j’aime, ce côté très lyrique, où les gars en même temps se lâchent. Et vu qu’en ce moment ils sont tous sous coke, à 5 heures du mat, quand ils écrivent leurs textes, ils ont une petite montée et ils s’emportent bien. Ils finissent par lâcher des trucs qu’ils ne devraient pas dire. D’ailleurs, même les gars qui ont du buzz et qui ont pris des avances ils continuent à racailler. 50 Cent a été un bon exemple. Il a pris sa première avance et est allé acheter du crack. Ça a été l’un des premiers comme ça. Puis il s’est pris neuf bastos, tu vois ce que je veux dire ? C’est ça que j’aime et ce que je veux mettre dans mes mixtapes.
Le grand malheur, c’est que l’Éducation Nationale fait mal son boulot et que la plupart des français comprennent mal l’anglais. Bien comprendre l’anglais, c’est mieux comprendre mes mixtapes. Je cherche une cohérence entre les morceaux au niveau du propos. Tu m’entendras pas enchaîner un morceau sur un braquage avec un autre où un type explique que sa meuf est relou. Bon, de toute manière, généralement, les morceaux qui parlent de meufs relous, ils n’arrivent jamais sur mes mixtapes [Rires]. Mais admettons… Je cherche à amener les choses, à les rendre cohérentes. Je ne  suis pas du genre à faire du scratch et des passe-passe. Je table tout sur le mix, d’ailleurs quand tu entends des morceaux qui sont passés dans mes tapes, après ton cerveau est conditionné pour entendre l’enchaînement. C’est un compliment que l’on me fait. Et il y a aussi ce travail sur les lyrics, afin que les titres se répondent et se fassent écho. Mais ça, peu de gens s’en rendent compte…

A : Pour toi, les américains n’en font jamais trop…

JR : Non, les cainris ils n’en font jamais trop. Attention, je ne dis pas qu’ici ils essaient d’en faire trop non plus. Il y a aussi des calibres en France. Mais il y a une pudeur. Je me rappellerais toujours quand j’ai fait le clip de ‘Hardcore’ d’Ideal J avec toute la Mafia K’1 Fry. Quand je l’ai diffusé à Arsenal dans mes bureaux, ils m’ont fait « comment on va montrer ça à nos parents ? ». Ça m’a choqué, vraiment choqué. Après j’adore la Mafia K’1 Fry, c’est ma famille, mais… ça m’a choqué dans le sens où en 69 les Rolling Stones faisaient « Sympathy for the devil » dans une autre époque, dans un autre truc. Mais c’est ça ici, il y a une espèce de pudeur.

A New York ce n’est pas ça, les gars mettent leur vie sur la table et maman est contente ou non. Ici, on est dans le rap, genre il faut respecter les mères, mais j’en ai rien foutre des mères moi. Si ta mère elle t’a fait des crasses, qu’elle t’a mal élevé, qu’elle était toxico, qu’est ce qu’il y a ? T’as le droit d’avoir des problèmes. Mais ici non. Avoir des difficultés avec sa mère, ça fait partie de la vraie vie. Plein de gens en ont. Ce n’est pas pour ça qu’ils vont la mettre dans un coffre de voiture. Mais ils ne vont pas non plus bouffer tous les dimanches avec en disant : « Oh maman » etc. A New York, tu crois que les mecs quand ils écrivent un texte en descente de coke ils finissent par se demander si leur mère va écouter leur disque et ce qu’elle va en penser ? Non. En France, c’est un peu le problème.

A : Il y a peut-être une question de culture et de contexte ?

JR : Bien sûr que le contexte est différent, mais il faut aussi savoir mettre ses couilles sur la table, non ?
A : Il paraît que tu fais tes mixtapes en live.

JR : Oui c’est vrai.

A : Tu as tes sélections en tête, et un beau jour tu te poses devant tes platines et tac, c’est parti ?

JR : Ouais, je fous rien. Tu sais quoi ? Là ça fait plus de cinq ans que je n’ai pas mixé en dehors d’une soirée ou pour mes mixtapes. Je les fais en live, en général, j’arrive, j’ai fait ma sélection mais je n’ai rien préparé et je mixe live le plus possible. C’est-à-dire que j’essaie de faire quasiment tout d’une traite.

A : One Shot ?

JR : Quasiment.

A : Parce que tu préfères le côté plus spontané du truc ?

JR : Parce que je ne sais pas faire autrement. Parce que j’arrive, je suis ivre mort, l’ingénieur du son est saoulé : « Ah, il est quinze heures il est déjà bourré ! » [il rit]. Je ne sais pas faire autrement et puis j’aime bien la spontanéité. C’est vrai que ça me fait chier de préparer les trucs. J’ai dit plusieurs fois à des potes DJs qui préparent tout que j’ai l’impression d’entendre des medleys, que j’ai le sentiment d’écouter un truc de Boney M chez Drucker. C’est trop propre ! Ca m’est arrivé sur certaines de mes mixtapes qu’il y ait un petit pet’, mais je veux rester en live, alors je garde ce petit accroc. Je ne vais pas recommencer depuis le début.

Après, je ne vais pas non plus cacher que ça m’est arrivé sur certaines mixtapes, spécialement quand je suis ivre mort, de faire un gros pet’. Alors là, on reprend, surtout si je sens que tout le mix était parti pour être mortel. Si je foire tout en fin de session, là je repars avec l’ingé’ du son. Mais je ne triche pas beaucoup. Et à une époque, sur les premières mixtapes, on faisait même les drops en live, sauf ceux des rappeurs qu’on rajoutait. Mais sinon, Armeni Blanco était à côté de moi, et faisait tout en même temps en rigolant sur son synthé. Et j’en ai fait plusieurs d’une seule traite.

A : Justement en parlant d’Armeni Blanco, tu as eu pendant longtemps un très bon show avec lui et Lenny Bar sur Générations. Il y avait toujours l’ambiance qui vous caractérise. Quel était le concept général ?

JR : Hum… [il souffle] Toujours le même concept, on se drogue, on se bourre la gueule, on voit les potes et on met du son. De temps en temps les filles passaient nous voir et voilà, pas de concept. C’était spontané… après moi, je veux des sous. C’est pour ça que je mixe plus à Paris. Y’a cinq piges je prenais un bâton cinq par soirée. Aujourd’hui, on me propose 150 euros. J’adore les putes à frange et tout ça mais j’ai passé l’âge. Donc aujourd’hui je mixe en Suisse ou en Allemagne où on continue à me proposer ces prix là.

Là, je vais partir mixer à Bogota où je crois pas que le pouvoir d’achat là-bas soit plus incroyablement plus fort qu’ici. C’est même plutôt le contraire. Et j’y vais, à ce que je sache je suis pas chargé d’une mission secrète pour libérer Ingrid Betancourt. Je me suis renseigné, je sais qu’on va pas me kidnapper. Ce sont plutôt les mecs qui kidnappent les autres gens qui me font venir [Rires]. Après, les mecs savent que j’ai mes exigences spéciales. Alors pour m’huiler, ils m’amènent des gros seaux avec plein de bouteilles dedans. C’est malin, du coup, quand je suis aux platines je fais n’importe quoi. Bravo ! [Rires] Et après les mecs sont encore déçus, ils se disent encore plus que je ne vaux pas le coup. Je ne mixe plus en France.

« A New York, tu crois que quand les mecs écrivent un texte en descente de coke, ils se demandent si leur mère va écouter leur disque ? Non. En France, c’est un peu le problème. »

A : Pas mal de gars ont choisi de s’expatrier vers les Etats-Unis (Get Large, Grim Team, Sebb, etc.). Peut-on, à tes yeux, parler d’une communauté à part dans le hip-hop français ?

JR : Ah non. Moi quand je suis à New-York, les autres français, ils habitent tous quasiment dans la même zone, et ils sortent plus. J’en connais un paquet qui ont essayé de se réinventer une autre vie là-bas. Ca les saoule quand j’arrive avec mes mallettes avec tous les dossiers rangés sur leurs vies. Moi, j’ai pas de casseroles. Je te colle au mur direct, dès le premier soir en plein Brooklyn et après je suis avec tous les gros leur-dea qui font trois mètres sur quatre. Et là après pendant quinze jours les gars on les voit plus. Je les croise juste le matin chez le barbier ou à manger des œufs, ils se font livrer des paquets de pâtes et vivent en autarcie. [Rires]
Non, y’a beaucoup de bouffons. Ce qu’ils ont pas compris, c’est que tu vas pas à New York pour te réinventer une vie et oublier les casseroles que t’avais sur Paris. A New York, faut que tu sois quelqu’un et t’as intérêt à faire gaffe. Moi quand j’emménage à New York, j’vais pas ouvrir une boutique de déco. Tu rentres dans le game avec les vrais gars qui sont calibrés et bien vénères alors si tu viens pour travailler dans le rap t’as intérêt à être quelqu’un. Sinon tu seras juste un petit blanc français de merde.
Les négros là-bas ils rigolent pas du tout, ce sont des animaux et c’est la jungle là-bas. Alors si t’arrives avec ta bouche enfarinée pour faire du rap, ça va mal se passer. Faut pas croire, y’a beaucoup de français qui payent les gens juste pour les fréquenter, placer des sons. C’est pas notre cas, mais ça existe. Moi, je mange pas de ce pain là, j’arrive juste avec mon charisme, ma verve et mon caractère.

A: J’imagine que tu as eu la possibilité de rencontrer pas mal de mecs intéressants, quels sont ceux qui t’ont le plus surpris, où tu t’es dit que l’image qu’ils pouvaient donner ne correspondait pas du tout à la réalité?

JR : Peut-être Guru parce qu’on s’est foutu sur la gueule [Rires]. J’étais son garde du corps sur Paris. Le gars il était ingérable et vu qu’il respecte ses chansons [NDLR : JR fait référence au morceau « Suckas need bodyguards » que Guru a fait avec Premier sur Hard to earn] je me suis retrouvé à être son garde du corps officieux payé par la maison de disques et à l’emmener dans des soirées. Y’a eu un malentendu une fois avec une meuf, enfin ça s’est arrangé depuis.

A : Tu as un petit rôle en gangster dans le film Ne le dis à personne de Guillaume Canet, tu tires même dans un parterre de fleurs pour faire diversion et sors une réplique sur la qualité de la moquette en jouant à la console. Comment tu t’es retrouvé là ?

JR : [très surpris et enthousiaste] Ah oui ! Ça s’est présenté parce qu’à la base,  ceux qui ont fait ça, ce sont mes amis. Quand Guillaume adaptait le truc, il savait comment je vivais, il m’a demandé de rectifier certaines parties du scénario. Il voulait vraiment que ce soit crédible, particulièrement aux yeux des gens qui sont dans le game. J’ai donc rectifié certaines parties du scénar’ et après ils m’ont proposé de faire une petite apparition à la Hitchcock, en se doutant que ça allait me faire plaisir. Surtout que pour les assurances il fallait que je fasse une séance d’une semaine de tir à balles réelles. Ouais, donc c’était mortel.

A : Vis-tu aujourd’hui de ton activité autour de la musique ?

JR : Mouais… moins qu’avant, la musique c’est un vrai secteur sinistré aujourd’hui. Je suis obligé d’être d’accord avec les boss des majors sur le coup. Et pourtant ça n’a pas été souvent le cas. La France c’est le pays où les gens téléchargent le plus. En Angleterre ou en Allemagne y’a encore une vraie consommation de disques, ici c’est dur. Alors en même temps ici ça n’a jamais acheté beaucoup de disques. Même sur les magazines, ici y’en a pas des masses qui font 400 000. Der Spiegel en Allemagne ils font ça tous les jours.
Avec l’impact qu’Internet peut avoir, il y a beaucoup de choses à réinventer au niveau de la musique. A ce titre, l’exemple de Radiohead est super intéressant. Ils ont fait quelque chose comme un million de téléchargements en deux semaines tout ça sans passer par les majors. Il faut savoir que 60% des téléchargements qui ont été effectués l’ont été gratuitement. Sur les 40% qui restaient, ils ont récupéré 8 millions d’euros. S’ils étaient passés par une major ils auraient récupéré un truc comme 2,2 millions. Pour le moment, on est vraiment à un stade de transition, plus personne ne sait où on en est. Cette période est vraiment très dure, pour tout le monde, mais j’ai malgré tout bon espoir pour la suite.
Avant j’attendais tous les mardi soir les imports de New-York, à 18h00 j’avais une vingtaine de galettes, là-dessus y’avait deux-trois bombes. Aujourd’hui, je me prends vingt chefs d’œuvre par jour et je reçois 150 morceaux. Et ça c’est aussi parce qu’il n’y a plus de support physique. Après, tout ça va changer dans quelques années.

« C’est simple, tu me proposes tout le rap ou juste l’intégrale de Mobb Deep, je prends l’intégrale de Mobb Deep. »

A : On voit que le prix des galettes d’un certain nombre de mecs au départ inconnus s’est s’envolé sur E-Bay après avoir figuré sur tes mixtapes. Comment expliques-tu ce phénomène?

JR : Ouais, c’était surtout le cas pour des indépendants entre 1995 et 1999. Je sais que des gars comme Sparrow ils se sont achetés des BMW grâce à moi. Ils leur restaient un petit stock de vinyles dans le cave, et d’un seul coup les vinyles arrivent à 300, 400, dans certains cas 1 500 euros. Les japonais, ils bombardent, ils veulent tout. Très bien, moi ça me fait monter mon buzz et eux ça remplit leur compte en banque. Si y’a des gens pour dépenser autant de thunes sur un vinyle, c’est qu’ils peuvent se le permettre.
Pour moi, ça fait partie d’une forme de reconnaissance. Certains de mes potes qui sont à fond dans le vinyle me récupèrent gratuitement certaines galettes que j’ai perdues depuis mon incendie et attendent que je les mette sur un Pure Premium. Ça parce qu’ils en ont un petit stock et savent qu’une fois sur un Pure Premium la côté va s’envoler sur E-Bay. Ca arrange tout le monde au final. Moi j’aime bien les business winner-winner.

A : Si tu devais choisir un seul artiste, hip-hop ou non ? Un seul disque ?

JR : Mobb Deep, « Godfather part III ». C’est simple, tu me proposes tout le rap ou juste l’intégrale de Mobb Deep depuis le début, je prends l’intégrale de Mobb Deep. Ces mecs sont mes Elvis. Pour moi y’a Mobb Deep et le rap. J’suis bête et méchant sur ce coup, juge et partie mais pour moi Mobb Deep n’a jamais fait de merdes. Prodigy c’est le bruit de mon cerveau. Le gars met des mots sur des sensations que j’avais même pas totalement analysé. Moi c’est Mobb Deep. Point.

A : Prodigy et Havoc ?

JR : J’ai une petite préférence pour Prodigy mais à la base c’est Mobb Deep. Et pourtant j’suis pas fan. Je sais pas être fan. J’ai souvent été avec lui et je lui ai jamais demandé d’autographes. J’ai même parfois été dur avec lui. [Rires]

A : Quels sont très prochains projets ? Le DVD Metro Veteran ?

JR : Depuis le temps que j’en parle de ce projet, Métro Vétéran, je suis pas sûr que je vais le faire. [Rires] Tu sais des fois j’ai une grande bouche. Franchement, j’ai pas de projets. Là, j’ai ma mixtape The Future qui arrive et dont je suis assez fier. C’est même pas la nouvelle garde, là je suis monté super en amont, sur des artistes new-yorkais que personne connait. La plupart de ces mecs je pense qu’ils vont mourir ou finir en taule, ils pèteront jamais. C’est The Future ou mon interprétation du futur… mais qui constitue aujourd’hui mon présent [Rires]. Après, je vis au jour le jour donc je fais jamais de projets…

A : T’as aussi prévu de rééditer tes anciennes mixtapes au format CD ?

JR : Ouais, ça je vais le faire… après, je suis pas le pro’ du réchauffé moi. Ca va se faire, ça arrivera. Après je sais que c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures confitures, mais bon… En vérité c’est de l’argent facile mais je suis tellement dans le son, tous les jours… je suis pris par le temps et c’est pas ce que j’ai envie de faire au quotidien. J’essaie surtout d’aller le plus vite possible sur la nouveauté et d’en faire un maximum.
Pour moi le son, c’est le partage. Je me rappelle quand j’étais jeune et que j’avais une galette de dingue, je la mettais sur mes platines et je disais à mes potes « putain, t’as vu ?! Non mais t’as vu ça ?! » et je remettais en arrière quitte à casser les couilles. [Rires]

A : Tu veux ajouter un truc ?

JR : Euhh…. ouais, allez vous faire enculer. Avec tout mon amour. [Rires]

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