Djimi Finger
Interview

Djimi Finger

Homme de l’ombre brillant, Djimi Finger a été l’une des figures majeures de la production rap made in France, depuis Quelques Gouttes Suffisent jusqu’à Paradis Assassiné. Retour avec l’intéressé sur son parcours, d’Ärsenik à Diam’s, du rap à ses nouvelles ambitions.

Abcdr Du Son : Comment est-ce que tu es venu à la production ?

Djimi Finger : Tu écoutes d’abord, tu kiffes ensuite, l’envie de participer vient d’elle-même. Tu achètes un peu de matos, et tu essaies des trucs. J’ai commencé le son vers 16 ans, en achetant un Atari ST 1040… C’est indescriptible aujourd’hui [Sourire]. Tu mets ça à côté d’un Apple dernier cri, c’est la préhistoire ! Après j’ai acheté un petit Mac à la con, ceux avec un petit écran et lecteur de disquette intégré. J’ai beaucoup changé de matériel au fil des années : boîte à rythmes, E-MU, MPC, toutes !

A : Quelles étaient tes premières productions sorties sur un projet ?

D : Mon premier titre sorti, bizarrement, c’était Faudel [l’album Baïda, sorti en 1997, ndlr]. Et ensuite c’était Ärsenik.

A : Comment as-tu rencontré les deux frangins ?

D : Je suis de Saint-Germain-en-Laye, mais ma sœur habitait à Villiers-le-Bel. Je bossais avec deux mecs, Pitchou et J.P., on avait un groupe. On était parti chez Monsieur DJ Desh, à Sarcelles. A l’époque il travaillait sur L’Art d’Utiliser son Savoir, que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître [Sourire]. Là-bas, on avait écouté beaucoup de sons, et j’ai fait la connaissance des deux. Quelques temps plus tard, alors que j’étais au studio Alésia, dans le 14e, j’ai reçu un coup de fil de Calbo. « Allo, est-ce que je pourrais parler à Djimi ? » « Oui c’est moi. » [Imitant la grosse voix caverneuse de Calbo] « Ouiiiii [Rires], t’es où ? » « Au studio, bouge pas j’arrive. » Et voilà, c’était parti.

A : Suite à ça vous avez commencé à bosser immédiatement ?

D : Oui, c’était très rapide, on a vite essayé des choses. Quelques mois après ils commençaient un album, ils cherchaient des sons. Et là c’était parti : on a fait un, puis deux, puis trois morceaux. J’avais de la matière, des instrus déjà prêts, et d’autres qui sont venus pendant la création de l’album. J’étais très jeune à ce moment, à peine 20 ans. Je n’avais pas vraiment conscience qu’on faisait un album en fait, on faisait juste de la musique, des titres. Le morceau « Chrysanthèmes », par exemple, est né suite à un accident de voiture qu’ont eu Calbo et Lino, avec deux autres personnes dans la caisse, si je me rappelle bien. Ils en sont ressortis vivants… et là, « ça tient à rien la vie. » On faisait tout comme ça venait. Il n’y avait pas ce système où tu fais un projet bien défini. Enfin pour moi non, mais de leur côté si, parce que leurs cerveaux étaient déjà en marche, ce sont des gens très créatifs. Gaëlino avait déjà une vision d’ensemble, c’est quelqu’un qui structure beaucoup. En fait, moi, pendant l’enregistrement de cet album, j’apprends. Je fais mon stage en entreprise, avec un contrat à la clé, mais ça, je ne le sais pas. Mon état d’esprit, c’était que je faisais de la musique, et qui vivra verra.

A : Mais tu avais déjà une discipline de travail de producteur à cette époque ?

D : Oui, exactement. Tu fais du son parce que tu kiffes faire ça, et que tu n’as que ça à faire je dirais même. En gros, à cette époque, il y a ceux qui trainent, ceux qui font du sport, et ceux qui font du son, mais on est très minoritaire. C’est un truc un peu obscur encore à cette époque là.

A : Tu devais être plongé dans les bacs à disques à cette époque, parce qu’il y a des samples de soul, de variété, de musiques de films…

D : Oui il y a de tout. Tu bouffes quoi, tout le temps. Et ce qui te parle, quand tu as le sentiment que tu peux faire un truc, tu prends.

A : Combien de temps ça a pris pour faire cet album ?

D : En terme de semaines ou de mois, ça devient compliqué de se souvenir. Mais ça a été très vite. Comme ils avaient une vision, ils savaient où ça allait.

A : Et toi, en tant que producteur, tu participais à la conception complète des morceaux ? Ou tu te contentais de simplement livrer des sons ?

D : Non non. Aujourd’hui, clairement, tu peux ne pas être en studio, mais avant c’était impensable. Tu travailles, tu arranges, tu structures ton son à mesure que le travail avec les deux rappeurs avance. Après, je ne m’immisçais pas dans les choses des grands [Rires]. Les lyrics, tout ça, je n’allais pas sur ce terrain. Comme je t’ai dit j’étais en stage, en apprentissage.

A : Tout le délire sur le film The Killer dans l’album, ça venait de qui ?

D : Lino. Il est un peu fou [Sourire]. Mais tous, on était de l’école Wu-Tang, Cuban Linx, 36 Chambers, tout ça.

A : C’est des albums qui t’ont inspiré à cette époque ?

D : Oui, entre autres choses. OutKast, ça tournait déjà, j’étais à fond dans leur délire che-lou [Sourire]. Après ça ne m’a pas forcément inspiré, mais tout ce que tu écoutes en général, tu avales, et ça a forcément une incidence sur ce que tu fais.

A : Avec le recul, en 2011, quel regard tu portes sur ces productions ?

D : Je t’avoue que je ne sais pas du tout, je n’écoute pas ce que je fais. Je ne suis pas nostalgique. Un jour il faudrait que je me fasse une session, si j’ai le temps [Sourire].

A : Et les retours des autres alors à l’époque ?

D : Il n’y a pas de retours spécifiques sur mon travail à moi. Le mot qui revient dans la bouche des gens c’est « classique ». C’est un album qui a touché pas mal de gens, qui a eu un bon succès commercial aussi.

A : Au moment où vous enregistrez, tu te dis quand même que quelque chose est en train de se passer ?

D : Je me dis : « Ces mecs sont fous. Dans quelle matrice ils sont ? » Je crois qu’ils font partie de ces gens qui ont du talent, Lino en particulier. Je crois qu’ils l’ont démontré à ce moment là. Les types n’étaient pas beaucoup plus vieux que moi en plus : Calbo, 24 ou 25 ans, Lino 23.

A : Après l’album d’Ärsenik, tu as participé au premier volet des compilations Première Classe. Comment tu t’es retrouvé à bosser dessus ?

D : C’est une affaire de famille [Sourire]. Des affinités se sont créées pendant l’enregistrement de l’album d’Ärsenik.

A : Sur cet album il y avait le premier single « On Fait Les Choses », qui a eu un gros succès. Tu te souviens de sa naissance ?

D : A l’origine de Première Classe, il y avait cinq gars : Patou, Stéphane, Pit, Jacky et Ben-J. Ils avaient décidé de faire un morceau sur lequel ils réunissaient plusieurs rappeurs. Mais à la base, ce n’était pas moi qui devait le produire. L’enregistrement était pendant une séance nocturne, et ils n’arrivaient pas à joindre le producteur. Ce qu’il faut savoir, c’est que les mecs n’avaient pas énormément d’oseille à l’époque. Le studio était déjà booké, et la pendule tournait. Vers 9h du matin, j’ai reçu un coup de fil. « Djimi, on a besoin de toi. Est-ce que t’as du son ? On vient te chercher. » J’avais déjà cet instru, ils l’ont choisi, et ont enregistré le morceau. Et suite à ça, ils ont décidé de créer la compilation.

A : C’est donc logiquement que tu as participé à d’autres titres de l’album.

D : Voilà. « Atmosphère Suspecte », avec Lino, Choa et Le Rat s’est fait un peu dans les mêmes conditions. C’était au studio Blackdoor, une séance de nuit, avec tout ce que ça peut comporter [Sourire]. On était tous un peu fonce-dés, le temps passe, ils trouvent un concept et écrivent. Mais il s’avère que Lino et Le Rat se sont endormis [Rires]. Quoi qu’il en soit, le thème du morceau a bien inspiré Choa, il était d’attaque, il a posé le troisième couplet et c’était dans la boîte.

A : C’est plutôt surprenant, il y a quand même une grosse alchimie entre leurs couplets.

D : C’est ça le pire ! Mais c’était beaucoup plus spontané que ce qui se fait aujourd’hui. Il fallait qu’ils tuent ça tout de suite : le temps tournait, ils ne pouvaient pas reposer trois ou quatre fois.

A : La même année sort l’album de Pit Baccardi, sur lequel tu avais quatre prods.

D : Avec Pit, c’est pareil, ça a été une question d’affinités. Il y a eu de bonnes vibes entre nous, il a choisi les instrus qui lui parlaient assez simplement. Une très bonne expérience de studios, même si je n’ai pas de souvenirs en particulier. Plus les à-côtés : on était des gamins, et on vivait de notre musique [Sourire]. Ha si quand même, « Trop peu pour qui ça paie » avec IAM ! Akh, selon moi, c’était le king, niveau rap comme niveau prod ! Il avait des putains d’idées en tant que producteurs. C’est ce genre d’expériences, à cette époque, que je savoure avec des yeux d’enfants. Je ne sais pas si les jeunes aujourd’hui savourent ces choses là de la même façon. Mais là je vais passer pour un vieux con avec mes 32 ans [Rires].

A : Tu as aussi participé à l’album Racines de Bisso Na Bisso. C’était une démarche différente pour toi de mélanger musique africaine et rap ?

D : Pour les lecteurs qui ne m’ont jamais vu : je suis noir [Rires]. Comme les mecs du Bisso, je suis d’origine congolaise, mais de l’autre côté de la rive [République démocratique du Congo, le « Congo-Kinshasa », ndlr]. J’ai fait ça en écoutant les musiques du bled, mais c’était la même démarche, seule la source était différente. Le titre éponyme a été super spontané. On arrive au studio, les mecs choisissent cet instru, et là Mystik commence à enchainer avec D.O.C. ou G-Kill, ou peut-être les deux en même temps, vu qu’ils sont doubles [Sourire]. Et ils balancent : « Bisso, Bisso, Bisso na Bisso« , et ça jump. Et voilà, le morceau est parti de ce délire. C’est un des rares morceaux que je connais où on a commencé par le refrain.

A : Cet album, c’était une initiative assez originale, plus festive que ce qui se faisait à l’époque.

D : Passi était à l’origine de tout ça. Quelque part, ça nous permettait de ne pas se prendre trop au sérieux. Et puis je me mets à la place des rappeurs : fin des années 90, tu dis aux membres de ta famille que tu fais du rap. Tu fais écouter, « oui, c’est bien », mais les réactions ne sont pas super enthousiastes. Maintenant, tu leur fais écouter un truc qui peut plus leur parler, un support avec lequel ils ont un repère, ils s’y retrouvent plus. C’est même un projet de rap africain plus qu’un album de rap français. C’était kiffant, ça nous a permis de sortir de ce qu’on faisait au quotidien. J’ai toujours aimé les expériences, je n’ai pas de charte de non-agression par rapport à la musique.

A : Justement, tu as aussi fait un peu de R’n’B en bossant avec Assia.

D : Super expérience aussi. Calbo a écrit certains textes pour Assia, donc forcément, il m’a demandé des titres, ça l’a inspiré, et c’était parti. Je ne calculais pas : on essayait, et on voyait ce qu’il en ressortait.

A : Sur la période entre 1999 et 2001, tu es apparu sur pas mal d’albums : Du Rire Aux Larmes de Sniper, La Vie Avant la Mort de Rohff, Tout Saigne de La Clinique… Comment ça se passait : c’est toi qui leur proposait de bosser avec eux ? Ils te sollicitaient ?>

D : En général, ce sont eux qui sont venus me chercher. A cette époque, c’était rare que les producteurs aillent vers l’artiste, comme ça peut se faire aujourd’hui. On évoluait avec son clan, mais je ne me levais pas le matin en me disant : « Je ne vais bosser qu’avec untel. » Dès qu’on me proposait, je voyais ça comme une expérience à prendre. Si Richard Anconina (sic) m’avait demandé un titre, je lui aurais donné [Rires]. C’était mon boulot. Un mec qui construit des maisons, il le fait. Là en plus je fais de la musique, c’est mon kif, et j’en vis. Je me souviens particulièrement du morceau « Le Même Quartier » de Rohff, parce qu’il a rappé assis, sur un tabouret, pour avoir une voix plus posée. J’ai trouvé ça fort et original, c’était la première fois qu’un mec me faisait ce coup là.

A : Il y avait aussi eu la compilation Secteur Ä All Stars avec le morceau d’Ärsenik et RZA.

D : C’était un bon kif ça aussi ! Si je me souviens bien, Kenzy avait profité du passage de certains mecs du Wu à Paris, dont ODB et RZA. A l’époque le Wu était au top, limousine et tout [Sourire]. Bref, la connexion se fait, on me demande une prod. Et là, ça tombe bien, j’avais un instru un peu dans un délire Shaolin. Mais franchement de savoir que RZA allait poser, c’était la grosse pression ! Alors j’ai pris soigneusement la DAT, je l’ai mise dans la machine, et j’ai soufflé un gros coup [Rires]. Ils n’avaient plus qu’à faire leur taf !

A : En 2001 sort Première Classe 2, tu avais quatre prods dessus. Quels souvenirs tu en gardes ?

D : De bons moments aussi. « L’Oeil du Tigre », ça a été la confirmation du talent de deux plumes. Rohff a eu une belle carrière, Lino est super respecté. Et « Tueurs Nés » [avec L’Skadrille et K.Ommado Toxik, ndlr], les types avaient faim, ils étaient… bruyants [Rires], agités, mais bon esprit, toujours bon esprit.

[Passi, qui bosse sur un morceau de zouk, sort du studio d’enregistrement à côté]

Passi : Hé les gars, vous voulez zouker ou quoi ? [rire général]

Djimi : Non, non, attends, je suis en discussion là… Il me fait sortir les dossiers ! Un peu trop même [Rires].

Passi : Si ça t’emmerde c’est qu’il fait son taf. Faut l’emmerder ! [Rires]

A : Sur cette compilation on sent que ton son commence à changer, il y a un mélange de samples et de composition.

D : Oui, j’évolue. C’est comme toi : avant les mecs arrivaient avec un calpin et un stylo. Là t’as posé un dictaphone numérique ! C’est un changement naturel, je suis mon envie d’essayer les nouvelles méthodes.

A : Parmi tes collaborateurs récurrents, on n’a pas encore parlé de Kazkami, qu’on retrouve aussi sur cette compilation. Tu l’avais rencontré comment ?

D : Par Harry, un mec avec qui je bossais. On a vite sympathisé. Quelques temps plus tard je l’ai mis en connexion avec Swan, un rappeur que je connaissais. Ce qui est marrant c’est qu’ils se sont rencontrés le jour où on a fait le morceau « Premières Traces » pour Première Classe 1.

A : J’ai toujours pensé que c’était un duo à la base, vu qu’ils ont fait d’autres morceaux à cette époque.

D : Non même pas ! Ils ont fait quelques maquettes et tout à l’époque, mais Swan finalement a arrêté assez rapidement et est passé à autre chose.

A : L’année d’après est sorti le deuxième album d’Ärsenik, Quelque chose a survécu. Le Blueprint de Jay-Z a dû pas mal vous inspirer pour cet album.

D : Complètement. Cette tendance me faisait kiffer, j’ai suivi le truc. C’était partagé, eux aussi aimaient, donc on a fait ce choix. On a repris la même façon de bosser que pour le premier album. Peut-être plus en immersion, plus concentrés. J’ai aussi plus participé sur la finalisation du projet… Mais bon, l’album n’a pas eu le même succès commercial que le premier.

A : C’est dû à quoi tu penses ? L’écart d’années entre leur premier album et celui-là ?

D : Non je ne pense pas. Le groupe a été pas mal investi sur plein de projets, entre les compilations Première Classe, Bisso… Et je ne te parle même pas des featurings ici et là ! C’est difficile de dire que l’album est arrivé trop tard. Soit au bout d’un moment tu arrêtes de collaborer, soit tu continues à bosser, même si c’est pas sur ton propre travail. Si tu n’as pas forcément les idées pour un album, ça ne sert à rien. Il n’y a pas de plan de carrière. A un moment, spontanément, on s’est mis à bosser pour cet album, ils ont appuyé sur le bouton et j’ai suivi.
A : Vers 2002, on entendait aussi parlé d’un album solo de ta part, Ghetto Superstars. Un maxi deux titres avec Kazkami, K.Ommando Toxik et Armagueddon était même sorti.

D : Pour faire court, je l’ai commencé, j’avais sept ou huit titres, avec entre autres Rohff, Baccardi, Futuristiq, et les deux morceaux que t’as cité. Puis j’ai eu des problèmes personnels qui ont fait que j’ai laissé tomber.

A : Ça a été une déception de pas pouvoir le sortir ?

D : Non pas plus que ça finalement, dans le sens où je suis passé à autre chose.

A : L’année suivante tu produis « Madame Qui ? », sur Brut de Femmes de Diam’s. C’était plutôt original comme démarche ce morceau.

D : Elle nous avait sollicité pour que je produise et que Lino écrive. Il a posé sa voix, comme une sorte de brouillon. Elle ensuite y a apporté son énergie, son interprétation, son style.

A : Ca s’entend quand même dans sa manière de poser que Lino n’y est pas étranger.

D : C’est le but. Obispo qui écrit pour Natasha St Pier, ça s’entend bien que c’est Obispo qui l’a fait ! Moi j’avais kiffé la démarche de Diam’s, c’était novateur. Je sais pas si ça s’est refait depuis dans le rap, parce que l’égo des rappeurs… [Sourire] Dans le rap, faut écrire son propre texte, même s’il est pourri ! [Rires] Je suis carrément pour ce genre d’initiatives. Il y a des artistes, quelle que soit la musique, qui sont des voix, qui sont faits pour interpréter, et à l’inverse d’autres qui écrivent bien mais qui n’ont pas la voix pour interpréter. Les ricains le font sans problème. « Still D.R.E. », c’est Jay-Z qui l’a écrit si je ne m’abuse. Et le truc découpe !

A : En 2004, « Mic Machette » d’Ärsenik commençait à tourner. C’était toi qui le produisait ? C’était supposé être pour l’hypothétique troisième album, Quelques doutes subsistent ?

D : Non non, c’était pas pour Quelques doutes subsistent. Je l’ai cet album, il est dans le four. Il est plus ou moins en préparation, disons qu’il y a des titres. Par contre oui c’est bien moi qui le produit. Mais je ne sais plus pour quelles raisons il est sorti ce son.

A : A partir de là tu passes à la composition pure. Sur l’album solo de Lino et sur l’album du Noyau Dur par exemple, c’est flagrant.

D : Oui j’étais complètement dans un autre délire. Sur ces projets je suis moins investi. A titre personnel en fait, je passais à autre chose.

A : A quoi ?

D : Je suis passé doucement à l’électro. A cette époque, je commençais à expérimenter, à prendre de nouvelles directions. Le rap commençait à m’ennuyer un peu. Alors certains vont se dire que c’est pour des raisons d’oseille, mais non. J’ai toujours écouté plein de trucs. Surtout que j’ai commencé dans le son avec deux mecs qui faisaient de la house, qui venaient aussi du hip-hop. J’ai eu la même évolution qu’eux mais quelques années plus tard. A un moment, les choses ne te parlent plus. C’est triste à dire, mais le rap français d’aujourd’hui ne me parle pas. Il n’y a qu’une minorité de choses que j’aime bien : Booba, Kery, … Je trouve qu’il y a moins de talents dans le rap français aujourd’hui. C’est mon opinion personnelle, mais avant les mecs étaient plus originaux, ils écrivaient mieux. Tu pouvais pas prétendre poser ne serait-ce que six mesures si tu découpais pas du début à la fin. Je pense que c’est du fait que tout est devenu beaucoup plus accessible. C’est devenu banal : on connaît tous un mec qui fait du son, qui rappe à peu près correctement ou qui a déjà mis les pieds dans un studio pour X raison. Je ne dis pas que c’est pas bien, attention. Je constate simplement. Et je ne suis pas un nostalgique de nature, il y a quand même plein de trucs actuels que je kiffe : Rick Ross, Ryan Leslie, Gucci Mane, Kanye West… Mais si j’apprécie en tant qu’auditeur, en tant qu’artiste je suis passé à autre chose.

A : Et sur ton projet électro, tu penses pouvoir être justement original ?

D : C’est difficile à dire de mon point de vue, mais en tout cas, j’essaie. Je mélange le clubbing et l’afro, j’essaie de créer du son avec de l’énergie, de la patate. Ce n’est pas un coup en tout cas, c’est quelque chose qui a pris le temps de mûrir. Tu sens dans certains sons que c’est un peu hip-hop, je sample toujours, il y a de l’instrumental, des parties chantées… Je fais ça sérieusement, comme tout ce que j’ai toujours fait dans le passé. J’ai peut-être tout faux, je me trompe peut-être, mais je pense que c’est différent de ce qui se fait.

A : C’est risqué pour toi de prendre ce nouveau départ artistique ?

D : Oui et non, parce que j’ai toujours la planque de produire du rap. Je continue de bosser avec la famille, Passi, les Neg’Marrons, Ärsenik, Pit que j’ai eu au téléphone il y a quelques jours… J’ai même un peu bossé avec Keny Arkana. Mais en tout cas si j’arrive à sortir ce projet électro, les gens seront surpris.

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