DJ Sek
Interview

DJ Sek

Statistique de l’institut ABCDR : 97% des producteurs hip-hop sont ignorés, 2% sortent du lot, 1% à peine pondent un véritable classique. Pilier du label Time Bomb, DJ Sek est hors-cadre : de ‘Les Vrais Savent’ à ‘L’enfant seul’, il en a plein sa discographie. Interview-rétrospective en 13 morceaux.

et

Les Little – « Les Vrais » (1992)

DJ Sek : Quand j’ai rencontré Sulee et Ronald, Sulee se faisait aider par le mouvement Authentik. C’était un collectif qui réunissait plein de groupes, tenu par Double P. Il y avait aussi un gars qui s’appelle JMG, maintenant rebaptisé Juan Marco. C’est le producteur de Gensi, et c’est lui qui apprenait à Sulee les rudiments du beatmaking. Au fur et à mesure, comme Sulee était surmotivé, il a fait plein d’instrus. Du coup, on a joué avec ses instrus sur scène avant d’être signé. Au moment de la signature, la logique a fait qu’il a fait 95% de la prod’. Moi, je me suis retrouvé à en faire deux : un qui a été pris, et un autre qui devait servir comme un bonus mais qu’on a joué sur scène.

Abcdr du Son : Tu étais l’apprenti de Sulee à tes débuts ?

S : Non, moi j’étais apprenti avec un autre gars, Dorian. Il bosse maintenant au Gibert Joseph de St Michel à Paris, c’est lui qui représente le rayon rap. C’est grâce à lui que je me suis mis au beatmaking. Il avait le S-950, un Atari 1040, Cubase et un clavier M1. Des platines et des disques, aussi. Ça, c’était en 1988, mais j’ai rencontré Sulee et Ronald en 1989.

A : Avant de te lancer, tu étais déjà collectionneur de disques ?

S : Oui, c’était la base : James Brown, Earth Wind of Fire, The Crusaders, Sam Cooke… J’écoutais du blues, du jazz mais je n’étais pas super pointu. Dès que ça bouncait, je prenais. C’est le contact avec Dorian qui m’a fait réaliser qu’il fallait faire attention aux samples, choper des atmosphères… A l’époque, j’adorais les Meters. Eux, c’étaient des fous. J’adorais la sonorité de leurs drums, d’ailleurs c’est des sons qui ont été repris, notamment par Ultra Magnetics MC’s et Black Milk dans Tronic. Pour l’inspiration « spirituelle », la couleur du jeu, la mélodie, c’était plutôt Crusaders, Joe Sample… Moi, j’adore écouter des disques sans forcément penser à les sampler. J’aime quand il y a une mélancolie, une histoire dont tu t’imprègnes. Quand tu es jeune, ces morceaux peuvent t’évoquer des situations sans même les avoir vécues.

A : Fais-tu partie de ces producteurs qui ont baigné dans un environnement musical très riche ?

S : Non, moi je viens d’une famille cambodgienne traditionnelle. Pour mes parents, il fallait avoir un diplôme et un travail. C’est mon grand frère qui nous a entraînés et influencés. Je le suivais, je le copiais, je voulais savoir ce qu’il écoutait. Lui, en tant que grand frère, il avait un côté « je partage pas trop ». Il ne fallait pas toucher à son patrimoine musical ! Alors j’en profitais quand il était absent : lire les pochettes, découvrir qui produisait quoi, savoir d’où venait le label, ça me passionnait. J’étais autodidacte : il y avait pas Internet, je ne connaissais pas trop les magazines, alors j’ai vécu une grande partie des débuts du mouvement hip-hop dans mon coin. J’ai commencé à m’intéresser au hip-hop en 1984. Le déclencheur, c’est l’émission HIP HOP et les deux films : Break 84 et Beat Street. Là, j’ai pris une gifle. Il fallait passer à la vitesse supérieure. Les week-ends, j’allais à la FNAC de Montparnasse ou de Châtelet. Avec deux ou trois potes du quartier. Il y avait un petit vivier mais c’était des passionnés. Quand tu trouvais un disque, c’était un trésor qu’il fallait vite acheter et cacher. Ou alors tu faisais des mixtapes un peu trafiquées pour ne pas laisser le morceau en entier.

Ni2g Phy – « L‘âme d’un gangster » (1995)

S : J’avais connu EJM en même temps que les Little, en 1989. Une amitié s’était formée entre tous ces gens-là. Venant de Vitry, Ni2g Phy faisait les backs d’EJM, qui a vu en lui un rappeur potentiel et s’est mis à le produire. Ils traînaient ensemble, je crois qu’ils ont fait partie tous les deux du groupe État de Choc. Au moment de chercher des gens pour la compilation Time Bomb, Volume 1, je voulais EJM. Il m’a dit « Tiens, je vais te présenter un autre gars, il s’appelle Ni2g Phy, je le manage ». J’ai écouté, j’ai dit « Vas-y on le prend« . Artistiquement, on n’a pas cherché à ne prendre que des pointures. Il fallait qu’on aille vite, il y avait une telle ambiance qu’on avait envie de foncer. Battre le fer quand il est chaud, comme on dit. J’ai écouté, j’aimais bien, il avait un côté cainri un peu frimeur. Ça sonnait west coast, alors il m’a proposé de bosser le sample ‘More bounce to the ounce’ de Zapp.

A : Qu’est-ce qui vous a poussé à choisir d’aller à New York pour mixer et masteriser la compilation ? 

S : A cette époque-là, les ingés son français étaient mauvais. Ils ne savaient pas comment mixer un pied avec une basse. Nous, petits producteurs qu’on était, quand on entendait n’importe disque east coast ou west coast, on voyait qu’il y avait du gros son. Eux, ils faisaient péter le score. Le pire, c’est qu’on avait le même matos qu’eux, les mêmes références. La seule différence, c’est qu’on rappait en français, c’est tout. Donc avec Mars et Ricky, on s’est dit « Vas-y, on va se faire plaisir, on va à New York« . On aurait pu faire low profile et mixer à Paris, mais non. A l’époque, on ne connaissait pas encore le studio Blackdoor, on l’a découvert fin 1995. On a tout enregistré à Artistic Palace (Boulogne) pendant les grandes vacances de 1995, pour partir mixer en septembre et sortir le disque fin octobre. Mars et moi, on est parti avec les bandes 2 pouces analogiques. D’ailleurs, j’ai fait chier les douaniers, car il fallait faire attention à ne pas démagnétiser les bandes à l’aéroport.

A : A quel endroit s’est fait le mix ? S : Au New Yorker, un grand hôtel tout près de la 42e rue. Je crois que la rédaction du journal du même nom était installée là-bas. On est resté environ trois semaines sur place. David Kennedy, l’ingé ricain, mixait en hauteur, vers le 34e étage. C’était chelou comme situation, mais très entraînant : t’es au cœur de New York, le mec avait bossé pour des Sly & Robbie, Patra avant de se tourner vers le hip-hop. C’est lui qui a mixé The Love Movement de Tribe, Brand Nubian, des albums d’Onyx, Blue Funk de Heavy D… Il avait aussi des connexions avec le Wu-Tang, c’était une petite famille. David Kennedy a donc transféré les bandes sur des ADAT, puis mixé avec une Mackie 24 pistes et plein de petits périphériques. Ses écoutes, c’était que des Tannoy, les PNB6, petites et grosses. On lui faisait confiance. Musicalement, il kiffait ce qu’on faisait. Quand il a découvert le morceau de Ni2g Phy et Accord Parfait, il nous a dit « Moi, ces titres là, j’ai envie de les exploiter sur des compilations en indé« . Mais il n’a pas donné suite.

X-Men – « J’attaque du mike » (1995)

S : La première version du morceau a été enregistrée en 1995 au studio Artistic Place à Boulogne. En sortant la compilation, il y a eu un buzz énorme, mais il y avait des critiques. Des gens nous reprochaient d’être allés mixer à New York mais d’avoir un son qui saturait. C’est vrai qu’on avait été un peu maladroit. On avait fait confiance à l’ingé mais on a reconnu notre erreur : la musique était peut-être trop en avant par rapport aux voix. Ça reste une bonne expérience, et puis les gens qui nous ont fait la réflexion ont kiffé le projet quand même. C’est vraiment ‘J’attaque du mike’ qui a attiré l’attention. Avec Mars et Ricky, on a décidé de le sortir en maxi, en refaisant le mix. A cette époque, on mixait les caisses claires avec des reverbs un peu longues, notre approche était un peu « Mobb-deepienne ». Pour cette deuxième version, on a repris les bandes, on a refait les mixes et les X-Men ont reposé les voix. Mars et moi, on était tout le temps présent en studio lors des enregistrements. On est exigeant : en général, on intervient sur 10-15% des textes, sans être non plus des tortionnaires du studio. Avant de m’occuper des X-Men, j’avais déjà l’expérience des Little. Je les voyais bosser, et quand Sulee coachait des autres groupes de la Mafia Underground, je l’observais. Je me suis inspiré de cette expérience pour guider les rappeurs de Time Bomb. En même temps, ils avaient déjà de super bonnes références. C’était de bons rimeurs à gages donc on les laissait faire, mais quand il y avait des mots inappropriés, on leur disait de faire gaffe. C’était un travail d’équipe.

A : Sur le net, des rumeurs disent que tu ne serais pas à l’origine de la prod’… [NDLR : lorsque l’Abcdr l’avait interviewé en 2003, Hi-Fi avait affirmé avoir produit le morceau]

S : Tout a été fait chez moi, sur mes machines : SP1200, 950 Atari 1040, Cubase. Le sample, c’est Rufus et Chaka Khan. Moi, j’ai des tonnes de DAT sur lesquels j’enregistre les albums de soul, funk ou jazz en entier à défaut de les acheter. Des potes m’ouvraient aussi leur caverne d’Ali Baba. Et j’ai encore les disquettes de ‘J’attaque du mike’. Donc le jour où ils voudront en parler, on en parlera !

A : Avec le temps, est-ce que t’as acquis une « hygiène de vie du producteur » ?

S : Avant, j’étais un peu plus discipliné. Avant ProTools, j’enregistrais tout sur DAT. J’en ai des centaines. Et c’est des DAT de 60 minutes, avec des instrus de deux minutes en moyenne. Donc le calcul est simple. Bon, il y a des ébauches, des work in progress, mais aussi des instrus plus développés. Même si je suis de moins en moins discipliné, je reste méticuleux sur le rangement. J’ai toutes les sources, je note tous les samples que j’utilise, je mets des repères sur les disques. Je range le tout dans une valisette en carton qui contient toutes les références que j’ai samplées ou que je dois sampler. Du coup, des vieilles prods de 2000 que je fais écouter par exemple à Sear Lui-Même, s’il kiffe, il n’y a que le sample qui ne va pas bouger. Et encore. Pour le reste, je vais actualiser le son.

A : Quelle est ta configuration matérielle aujourd’hui ? S : Depuis le premier album d’Oxmo, je bosse avec une MPC 3000, ProTools, un Korg Triton, des expandeurs, notamment le SE1 de Studio Electronics, celui que tout le monde a acheté en apprenant que Dre l’utilisait pour ses basses. A l’époque, j’étais sous contrat d’éditions chez Delabel donc je l’ai pris car c’était à leurs frais. C’était une bonne situation : quand Oxmo a signé, on a fait un package pour que Mars et moi puissions signer en éditions en tant que producteurs. Ça nous a permis de construire un petit home studio sympathique. Il y avait du matos. Moi, à l’époque, je n’achetais pas d’enregistreurs, alors que Mars a eu l’intelligence d’investir dans du matériel pour pouvoir enregistrer chez lui. Moi, j’attendais d’aller chez lui ou d’avoir un plan studio. Aujourd’hui, j’ai mon petit crib dédié entièrement au son, dans la maison de mes parents. C’est le basement [rires].

 Lunatic – « Les vrais savent » (1997)

S : Quand on a officialisé le crew Time Bomb, les mecs venaient chez moi tous les jours de la semaine, sauf le week-end. Ils choisissaient des instrus, je leur faisais écouter des trucs, ils écrivaient… Dès qu’ils partaient, je continuais à bosser. J’étais assez rapide car les work in progress étaient assez proches des versions définitives. L’inspiration était américaine : X-Men et Lunatic étaient très influencés par le Boot Camp, Mobb Deep et alentours. Donc je savais quels sons ils voulaient. J’avais des samples super tristes, c’était assez facile. J’étais tombé sur un CD-démo d’un magazine, genre Keyboard. Tu sais, ils offraient des CD avec des banques de son libres de droits à l’intérieur. J’ai écouté : il n’y avait que des trucs pourris… Mais à un moment, il y avait une montée et une descente de violons. Je ne savais pas si c’était organique ou synthétique, mais je l’ai samplé quand même. Ça ne ressemblait pas encore à ce qu’allait être ‘Les vrais savent’, mais c’était une base. D’ailleurs, ce CD-là, je l’avais volé dans un studio ! [rires] Booba et Ali ont kiffé, mais ils voulaient que la rythmique soit proche d’un morceau précis de Mobb Deep. Booba m’avait appelé, enfin non, à l’époque on utilisait des bippers, donc il m’avait bippé. Je l’avais rappelé, il m’avait dit « Tu vois Mobb Deep, le morceau numéro 12 de Hell on Earth ? On veut un son dans ce genre-là ». C’est le morceau avec Nas, indexé dans les dizaines, qui commence par un bruit d’aéroport. [NDR : ‘Give it up fast’] Le mix de ce morceau était fou. Donc j’y suis allé au culot : j’ai pris la même rythmique, le même pied et je l’ai reprogrammé à l’identique à la SP12. Je n’ai pas samplé directement le morceau, j’en ai retrouvé le breakbeat original : ‘Substitutions’, qui est un vrai musée du rap. Je ne m’en lasse pas, et même mixé bizarrement, je le reconnaîtrais.

Comme pas mal d’autres beatmakers et rappeurs français – notamment Rocca – Lunatic savaient que Mobb Deep avait révolutionné un certain type de mix. Nous, même si on faisait comme les autres, on voulait avoir une exclu sur ce son-là. On a appris que la compilation L432 allait être mixée par Tony Smalios. Un tueur. C’est lui qui avait mixé les albums de Mobb Deep avec Mario Rodriguez. On est donc parti mixer avec lui… et il n’a pas fait péter le son. Pourtant je lui avais dit : « Ma référence, c’est ‘Give it up fast’« . À cette époque, beaucoup de ricains arrivaient sur leurs seules références et avec ça, ils blasaient tout le monde. Ils étaient arrogants. Moi, je n’ai pas aimé cette expérience. J’aime participer, trouver une complicité entre le morceau, l’artiste, le réalisateur et l’ingé. J’ai envie qu’il s’imprègne de l’ambiance et se dise « Putain, ces mecs-là, c’est des passionnés« . Du coup, Tony Smalios n’a pas fait le mix final. J’ai rappelé Sébastien Farran pour lui dire qu’on n’était pas content du mix. C’est lui qui était à la tête du projet, il était DA chez Island. Il nous a donné l’occasion de le refaire avec Jeff Dominguez, qui a bien bossé. Donc big up à Jeff, lui-même il sait.

A : Tu as déjà imaginé comment aurait sonné « Mauvais œil » si ça avait été une réalisation Time Bomb ?

S : Bien sûr. Ça aurait été un autre classique… de chez Time Bomb. L’investissement artistique qu’on a donné pour le premier album d’Oxmo, on l’aurait donné pour Lunatic. En plus, c’est des purs gars. A l’époque où on bossait ensemble, ils étaient ouverts, il y avait une bonne ambiance en studio. Titre par titre, je ne pourrais pas te dire ce que j’aurais fait pour leur album, mais j’aurais peut-être apporté des morceaux plus mélodieux et pêchus sur le plan rythmique. A sa sortie, j’avais survolé Mauvais œil. Ce n’est pas un album que j’écoute. Je t’avouerais que si on avait produit cet album, je l’écouterais comme j’écoute encore un Oxmo, pour me dire qu’on a quand même fait du bon taf. Pour comparer, j’écouterais peut-être un peu plus La Cliqua que Lunatic. Dans La Cliqua, c’était plus riche en termes de sonorités. Dans Mauvais œil, il y a deux, trois titres au-dessus mais le reste, je trouve que c’est trop dark. Pourtant j’aime bien d’habitude. Mais ça reste un album de qualité, par leurs paroles. Ayant vécu une expérience avec eux, j’ai toujours respecté ça.

A : C’est presque une question obligatoire : quel regard portes-tu sur l’évolution de Booba ?

S : C’est normal que Booba évolue. Son public sera toujours là quoiqu’il arrive. Booba a marqué l’histoire à sa façon. Puis il a voulu se différencier. Il est très fortement influencé par les tendances américaines mais moi je trouve ça logique. Je crois qu’il reviendra à des instrus plus classiques, et il fera aussi bien. Moi, je kiffe toujours le rimeur qu’il est, même si parfois ses lyrics sont un peu trop faciles. Mais il a montré ce qu’il valait, maintenant il peut s’amuser. Même si les gens le détestent, s’ils en parlent c’est que, quelque part, ils aiment toujours l’écouter.

Ruddy Lapoz ft. FDy – « Ma rime paie » (2007)

S : L’idée du morceau est venue de moi. Je kiffais tellement cette boucle dont Mars est à l’origine. Mars diggait avec moi, donc on achetait souvent les mêmes disques. En l’occurrence : Gato Barbieri, grand jazzman argentin. Je me testais à reprendre des samples que j’aimais, alors je l’ai retravaillé d’une autre façon : je l’ai redécoupé, rejoué, j’ai rajouté une basse par-dessus, j’ai aussi mis des claps de 808. Je voyais bien des Mobb Deep rapper dessus, alors j’ai fait progresser le son dans ce sens-là. J’ai proposé le son à Ruddy et FDy Phenomen, ils ont capté le délire. C’est extrait de la mixtape Soul Bro Therapy de Ruddy Lapoz, sortie en 2007, mais je le considère un peu comme un inédit, dans la mesure où très peu de monde a pu avoir accès à cette sortie.

A : ‘Le crime paie’ est une production de DJ Mars, mais vos styles sont assez proches. Tu l’as initié à la production ? 

S : Mars et moi, on est vraiment des potes d’enfance, de quartier. Je l’ai connu en 1988, je lui ai appris les rudiments du deejaying à l’époque. De fil en aiguille, comme il fallait aussi qu’il apprenne la musique, je l’ai mis dedans. Quand tu apprends à ton élève les rudiments du beatmaking, il finit par garder l’inspiration de son maître. A une époque, on aurait pu nous confondre mais depuis très longtemps, Mars roule sa bosse et il a sa marque.

X-Men – « Pendez-les, bandez-les, descendez-les » (1997)

S : On a d’abord sorti Time Bomb volume 1 puis le maxi des X-Men. Les médias parlent vite entre eux, et grâce à eux, le buzz est monté. C’est venu aux oreilles de certaines maisons de disque qui recherchaient ce genre de fraîcheur. A l’époque, Delabel Editions étaient consultants pour Hostile – Hostile étant à la base un sous-label à dominante rock de Labels puis de Delabel. Ils faisaient notamment des groupes comme Kickback. Benjamin Chulvanij, le directeur de l’époque, a voulu prendre le risque de sortir une compilation rap de qualité. Marie-Lorette, D.A. chez Delabel Editions, a parlé de nous à Benjamin. Sans vraiment avoir fait un choix entre X-Men et Lunatic, ils nous ont contactés : « Voilà, on prépare une compil’ et on voudrait écouter des projets de chez vous« . Je me rappelle qu’à l’époque, Mars et moi, on voulait imposer Oxmo. Benjamin n’était pas trop chaud, puis il a entendu les rumeurs comme quoi les plus opés, c’étaient X-Men et Lunatic. Oxmo, on ne l’entendait pas encore, même sur les mixtapes, il était confidentiel. Donc du coup, Benjamin a retenu X-men et Lunatic. Il y a eu une première version du ‘Crime paie’ que Benjamin n’a pas aimée, mais la deuxième lui a parlé. De toute façon, Benjamin décidait tout seul mais il n’écoutait pas seul. A l’époque, il avait le final cut mais des gens autour de lui l’aidaient à choisir les bonnes personnes et les bons morceaux. Aujourd’hui, le mec qui voudrait sortir une compilation en prenant des risques artistiques, ce serait un soit un indé, soit un mec avec beaucoup de thunes, prêt à perdre de l’argent. Benjamin, à l’époque, était très soucieux de la qualité et des dépenses. C’est comme ça qu’il a su maîtriser les deux. Et puis il savait aussi qu’il ne devait pas louper ça. Donc c’est normal qu’il ait pris ce risque, c’est comme ça qu’Hostile est devenue une compilation emblématique.

 Oxmo Puccino – « L’enfant seul » (1998)

S : En général, je sais direct que tel son peut aller à tel rappeur. Oxmo et moi, on se ressemble beaucoup, c’est pour ça qu’on a fait trois albums ensemble. Il y avait une complicité humaine en dehors de l’artistique. Quand j’ai pris ce sample-là, je savais qu’il allait le choisir et que ça allait parler aux gens parce que c’est un morceau vraiment intimiste. Moi-même, je suis ému par ce qu’il dit. Mon seul regret, c’est que ‘L’enfant seul’ ne soit pas devenu un vrai single dans le bon sens du terme – pas un truc grillé genre « Ouais, on va danser » – mais un single comme une reconnaissance, au-delà du rap. Oxmo était un auteur qui commençait à faire son nid. Au-delà d’être un bon conteur d’histoire, un bon rimeur en freestyle, c’est un mec qui avait de la profondeur. Ça ne tient qu’à moi, mais ‘L’enfant seul’ est LE morceau qui aurait pu déchirer. Ça aurait pu devenir un titre aussi attachant qu’une chanson de Jacques Brel.

Plus tu écoutes ce morceau, plus tu y trouves de la profondeur. Si un jour, t’es pas bien dans ta peau, tu te reconnais dans ce texte, t’as envie de remercier le mec qui a écrit ça. Tu auras peut-être même envie de remercier le mec qui a fait la musique [rires]. J’aurais espéré que ‘L’enfant seul’ devienne le premier single, mais les gens de Delabel ont pris ‘Mensongeur’. Je pense qu’ils ont été maladroits, eux aussi l’ont reconnu. Ils voulaient arriver avec un truc un peu club. Du coup, ‘L’enfant seul’ est devenu un deuxième single, mais super mal exploité. Je regrette ça.

A : Oxmo qui pose ‘L’enfant seul’, c’est un peu la situation rêvée pour un producteur… Comment tu avais réagi en découvrant son texte ? 

S : Mars et moi, on était heureux d’avoir fait du bon boulot. On était satisfait d’avoir pondu un truc qui nous avait touchés. On ne se disait pas qu’on allait faire pleurer les gens. On ne pensait pas non plus que ça ferait partie des titres classiques du rap français – et il y en a beaucoup. Si tu te projettes en te disant que tu vas faire une tuerie… Nous, on a travaillé humblement, on ne s’est pas dit qu’on allait marquer l’histoire. Au fil du temps, on a vu que l’album commençait à ressembler à quelque chose. On s’est fait plaisir : avec une major qui mettait les moyens, on ne s’est pas privé, c’était à notre niveau à cette époque-là. C’est une belle aventure.

Oxmo Puccino – « Mourir mille fois » (1998)

S : Je kiffe rencontrer des rappeurs qui prennent le risque de choisir des instrus différentes de ce qu’on attend d’eux. Quand je fais mes instrus, c’est strictly hip-hop, mais il faut que je sois un peu décalé dans mes choix de samples ou ma manière de travailler. Alors j’essaie, et si ça devient un titre remarqué, tant mieux, sinon tant pis, je n’ai pas de regrets. Je préfère ça à du boom-bap classique. ‘Mourir mille fois’ est non seulement le dernier morceau indexé sur Opéra Puccino, mais il a été fait en studio, à la fin de l’enregistrement de l’album. On avait fait une descente de matos au studio Polygone à Toulouse, on est resté là-bas pour enregistrer et mixer. Pendant qu’Oxmo enregistrait, j’étais dans une autre salle, toujours à l’affut de bosser sur de nouveaux instrus.

Ce morceau a été fait sur la SP1200, où il n’y pas beaucoup de temps de sampling. J’avais ramené mes DAT de sons. J’ai samplé et détuné le sample de clavecin, je l’ai découpé pour le jouer. Dans la SP, t’as des petites astuces qui font que le sample se répète à la fin ou au début, comme sur la 950 – enfin, pour ceux qui connaissent. J’ai mélangé les sons et ça a donné cette atmosphère assez particulière. Je kiffais parce que ça restait hip-hop, avec cette caisse claire qui n’arrive qu’au refrain et Oxmo qui rappe ses couplets seulement sur le clavecin. Le rire qu’on entend, c’est James Brown, que j’ai détuné. C’était une référence aux cainris, notamment DJ Premier qui aime bien mettre des petites voix dans ses instrus.  Quand on a fini de mixer, Akhenaton était l’un des premiers à écouter une grande partie de l’album. Si mes souvenirs sont bons, il était ému. Et puis l’ambiance était assez particulière : c’était les derniers morceaux, on était pressé… Oxmo était un peu mal luné ce jour-là, alors il a pondu un texte de circonstances. On était quand même un mois loin de Paris. Oxmo avait des choses à faire là-bas, traîner avec ses potes, etc. Là, on était en retrait pour mieux travailler.

Oxmo Puccino – « J’ai mal au mic » (2001)

S : Après le premier album, Oxmo a voulu s’essayer à mémoriser ses paroles pour construire les morceaux. Son bloc-notes serait sa mémoire. Il s’entraînait, il s’entraînait… Sur certains titres il était prêt, sur d’autres il était maladroit. Mais ça se travaillait. Il y avait beaucoup d’obstacles, il était moins préparé que sur le premier album où on lui avait imposé des titres à faire. Il s’est essayé à faire autre chose, ça fait partie de son évolution. En France, tout le monde écrivait dans un cahier, lui a voulu passer à une autre étape. Pour moi aussi, c’était nouveau, donc je l’ai laissé développer ça mais je trouvais qu’il aurait peut-être du tenter cette expérience là plus tard, pas à cette période qui était décisive dans sa carrière. Les gens l’attendaient vraiment.

On aurait peut-être dû passer au-dessus de ça, ce n’était pas le moment. Mais pour moi, ça reste une bonne expérience : à cause ou grâce à cette nouvelle méthode de travail, on a pris beaucoup plus de temps pour travailler.  En plus, quand t’es en maison de disques et qu’il y a un changement de direction, tu n’as plus les mêmes libertés. Sur le premier album, Laurence Touitou, la boss de l’époque, croyait en ce genre d’initiative. Elle nous suivait. Sur le deuxième album, comme j’étais D.A., j’étais pris entre deux feux : je soutenais forcément et fortement mon sauss’ Oxmo, et du coup, de l’autre côté, j’avais des comptes à rendre. Il fallait que je jongle entre les deux. C’était presque un conflit d’intérêt qu’il fallait que je gère. Mais encore une fois, même si peu de gens le savent, cet album m’est aussi cher que le troisième ou le premier. L’album d’Oxmo, c’est aussi l’album de Time Bomb et l’album de DJ Mars.

A : Pourquoi as-tu choisi un remix de ‘J’ai mal au mic’ pour la mixtape « L’homme que l’on nomme » ?

S : J’aurais pu mettre la version originale mais j’ai préféré faire un remix pour des soucis de déclaration de samples. Il y a eu un problème à ce niveau des années après la sortie du disque. Moi, je connais le métier, surtout en tant que musicien qui sample des disques. Je ne peux pas fermer les yeux sur ça donc je fais mes déclarations auprès de la maison d’édition. Comme je te disais, je notais tout, je leur filais une feuille avant la fin de l’album et eux commençaient à faire les demandes pour assurer nos arrières. Un jour, en 2004, Delabel Editions m’appelle et me dit que l’auteur du sample de ‘J’ai mal au mic’ veut qu’on lui rétribue ses droits. Je dis à l’éditeur « Mais non, je vous ai remis les références du disque, j’ai fait mon travail, je ne comprends pas pourquoi c’est bancal ». Je leur laisse régler ce problème mais quelques mois après, on me rappelle pour la même histoire. Ce n’était plus mon affaire : le titre appartient à la maison d’éditions et la maison de production. Moi, je n’avais rien à me reprocher.

A : Oxmo s’est mis à la prod’ sur le deuxième album, tu l’as aidé ? 

S : Oui, j’ai été son coach. Je l’ai aidé à bien caler les sons, retaper certains trucs, changer des caisses claires car les siennes étaient basiques et il ne voulait pas les garder. A l’époque d’Opéra Puccino, il faisait déjà des instrus mais il ne se disait pas qu’il allait s’en servir. Oxmo bricole un peu, il connaît les machines. C’était bien qu’il se lance, ça a été une carte de visite pour lui. Après, il a dû produire pour Rohff, Demon One, ses potes de la Mafia k’1 Fry.

Prodige Namor ft. Kery James – « L’année de tous les dangers » (1998)

S : La connexion avec Namor s’est faite grâce au premier album d’Oxmo et à tout notre background depuis 1995. Namor vient de Marseille, c’était un animateur d’atelier d’écriture à la Friche. Je savais qu’il rappait car je l’avais rencontré à l’époque des Little, quand on faisait des petites tournées partout en France. En 1998, par l’intermédiaire de Marie Audigier, DA du label Crépuscule, on s’est fait une rencontre dans leurs bureaux. Il voulait absolument travailler avec nous. On est venu avec plein d’instrus, il en a choisi trois. Un de Mars featuring les Nubians (‘Retour vers le futur’), et deux instrus de moi, ‘Le complot de la haine’ et ‘L’année de tous les dangers’. On a enregistré les trois titres à Marseille, le mix s’est fait à Plus 30 (Paris). Un super bon gars, de bons souvenirs. Généreux, humain, humble. Moi, j’aime bosser avec des gens qui se sentent concernés, qui ont envie de communiquer. A Marseille, les artistes sont beaucoup plus chaleureux. Ils ont envie d’apprendre, d’échanger, même s’ils ont déjà un niveau non négligeable. A Paris, on est plus sectaire et il y a un phénomène de clans artistiques, même si ça a évolué de ce côté-là.

Oxmo Puccino ft. Ärsenik – « Ghetto superstar » (1999)

S : C’est une coproduction DJ Mars / DJ Sek. Putain, c’est vieux ça… Ha oui, c’était la face B du maxi de ‘Premier suicide’, la première production « officielle » d’Oxmo. Les gens ont été impressionnés. Un titre mixé par Jeff, avec qui j’ai une vraie complicité. On se comprend assez rapidement, il connaît notre façon de travailler, ses petites astuces de mix sont parfaites. On se corrige au fur et à mesure, il est vraiment ouvert, il connaît le son que l’on recherche au détail près. Je lui dois beaucoup de respect parce qu’on a fait partie des premiers à avoir bossé aussi longtemps avec lui. Il nous est resté fidèle. Pour nous, c’était l’officiel ingé. Après, on a développé d’autres connexions, mais c’est le seul qui peut comprendre réellement notre son. Même si on est absent pour le mix, il va assurer.

A : Aujourd’hui, tu mixes tes propres morceaux ? 

S : A défaut, ouais. Vu comme la technologie évolue, avec ProTools, je bosse avec des machines de base – MPC 3000, expandeurs, vinyles, CD. Maintenant, je suis passé à la phase numérique : j’enregistre toutes les pistes, même les voix, sur ProTools et Logic Audio. Ma plateforme, c’est Mac. J’ai une facilité à bosser sous Mac. Si j’enregistre mes gars, par effet boule de neige, je mixe.

A : Quelles astuces de mix as-tu appris ?

S : Au fil du temps, j’ai appris à ne pas trop traiter les sons. Plus tu traites tes sons – un pied, un charley ou une caisse claire – plus tu peux faire perdre de la dynamique ou le grain. En fait, c’est aussi une tendance : il y avait une époque où on aimait mettre beaucoup de reverb sur tout, beaucoup de compression… Je suis sûr que si tu compares une version mixée à une version originale mise à plat, souvent tu préfèreras la mise à plat. Maintenant, quand je mixe mes instrus, à part mettre de la compression sur la basse, grosse caisse et caisse claire, j’essaie de ne pas trop toucher au reste. Je mets des petits effets de ProTools et Logic pour donner de la largeur. Moi, j’aime bien quand ça pète, quand c’est bien stéréo, bien large. Comme le fait Hi-Tek sur ses mixes, par exemple : ça a un côté organique même si tout sort de ProTools. Bon après, ils ont tous des périph’ extérieurs pour réchauffer le son et rappeler le côté machine à bande. Moi, j’ai pas ça mais on peut s’en sortir avec ce que l’on a. Donc moi, je vois à peu près ce que font les Américains, je m’en inspire même si des choses m’échappent.

Maintenant, de plus en plus, il faut mettre les voix bien en avant pour qu’on comprenne. La musique doit être un instrument d’accompagnement, mais on ne le néglige pas. Moi, je fais plusieurs versions que je fais écouter aux artistes. Eux me demandent de mettre la caisse claire en avant, donc je m’adapte. A l’époque du Boot Camp, la musique était vraiment proche des paroles. Mais nous, on ne voyait pas ça : pour nous, il y avait la mélodie et le flow. Comme on ne comprenait pas les paroles, la voix du rappeur était un instrument, et on kiffait. Quand tu fais ça en France, comme on a pu le faire sur ‘J’attaque du mike’ dans Time Bomb Volume 1, la musique était trop compressée, trop en avant par rapport à la voix. C’était à peine audible. Du coup, cette expérience nous a amené à faire attention aux voix. Il faut passer beaucoup de temps de l’enregistrement au mix pour bien comprendre ça. J’ai passé beaucoup de temps à expliquer ça aux artistes car ils confondaient le mix – traiter chaque piste pour que l’auditeur lambda puisse tout entendre – et le mastering – faire en sorte que les morceaux soient homogènes pour les réunir sur un disque.

Au jour d’aujourd’hui, je ne me considère pas comme un ingénieur de ouf, mais grâce aux moyens numériques, si tu fais tout chez toi, le résultat n’est pas trop décevant. Tu testes et écoutes le mix dans un ghetto blaster, dans la voiture, dans un lecteur mp3, et/ou sur scène. Si l’artiste te dit que ça sonne bien et que t’as assuré, ça donne confiance. Quand je mixais pour JL du collectif Mic Pro, par exemple, je ne savais pas où aller, j’utilisais plein d’effets pour élargir le son, même s’il n’était pas mixé, et on jouait avec ça en concert. Depuis, j’ai appris à mixer piste par piste. Et je sais ce que je veux atteindre.

Oxmo Puccino – « Boule de Neige » (2001)

S : ‘Boule de Neige’, c’est l’opération « Plus de musique » d’Opéra Puccino (1998). C’est à dire que pour relancer l’album déjà commercialisé, on y a rajouté ce titre exclu. Dans les maisons de disque, tout le monde fait ça, en fin d’année surtout : tu ressors l’album + un inédit. Soit tu refais des pressages avec le nouveau titre en bonus, soit tu prends l’album sur les retours de disque, tu refais un packaging et tu inclus un CD 1 titre. Le morceau a été fait à Blackdoor, mixé par Jeff Dominguez un peu vite fait mais le son crade était bon. Pour moi, c’était confidentiel, j’avais l’impression que personne ne connaissait ce morceau alors qu’il avait une bonne ambiance.

Quand j’ai proposé ce titre à Oxmo, il m’a dit « Tiens, Capone et Noreaga ont repris la même boucle ». Moi je ne savais pas. J’ai découvert le morceau sur un maxi bootleg que j’ai acheté à New York, mais je n’avais pas souvenir de cette boucle-là dans leur premier album.

En 2001, avec Oxmo, on a décidé de faire mixer par quelqu’un d’autre : Chris Conway, l’ingé de DITC, The Beatnuts, Pete Rock, Big Pun, etc. Quand tu compares le mix original avec celui du ricain, tu vois la différence. Avec la même bande et deux ingénieurs différents, t’en as un qui le fait vraiment langoureux, et l’autre qui te fait bouger la tête comme si c’était un ghetto hit. Moi, ça m’avait choqué. Et Jeff aussi : quand il a écouté cette nouvelle version, il a dit « Putain, comment il a travaillé le mec ?« . Il a voulu me tirer les vers du nez pour savoir mais à l’époque, je ne savais pas quels effets l’ingé utilisait, je ne connaissais pas trop les techniques de mix. Ce titre a été remis dans L’Amour est mort, le deuxième album studio d’Oxmo.

A : Oxmo travaille avec des musiciens live aujourd’hui, quel regard tu portes sur le Oxmo 2009 ? 

S : A l’instar de Booba, Oxmo veut évoluer. Il a préféré prendre une évolution plus organique, plus sobre, plus live. Son style de rap a évolué aussi, mais c’est son choix, je ne peux pas dire qu’il a eu tort de faire ça. Je ne suis pas dans sa tête. Mais c’est bien qu’il ait fait le choix de se tester. Quand il dit qu’on l’appelle le « Black Jacques Brel », pour moi c’est vrai. On peut en rire, mais c’est une bonne référence. Ceux qui veulent entendre Oxmo comme sur le premier ou le deuxième album, je crois qu’ils rêvent. Lui, il est parti dans un développement d’artiste. Lui-même en a conscience : il ne veut plus être catalogué comme un rappeur. Et s’il n’a pas autant de succès qu’avant, c’est parce que les plus jeunes qui consomment du Oxmo maintenant ne connaissent pas sa carrière d’avant Lipopette Bar. Ils ne savent pas que ce mec-là a fait des ghetto anthems, des classiques du rap français. Il a marqué l’histoire, il a brusqué les rappeurs. Donc je lui donne raison sur ce choix-là, il a rempli sa mission. Je vais te donner un exemple : si tu adores Francis Cabrel ou Johnny Hallyday, ils n’évoluent pas. Ils chantent la même chose, ils n’utilisent pas de vocoder ou n’importe quoi. Ça, c’est parce qu’ils ont une assise et un public fidèle, sur la longueur. Oxmo a aussi envie de choisir ce chemin-là, s’imposer comme un auteur, un vrai Artiste, alors que d’autres rappeurs préfèreraient rester « authentiques », représenter « la rue ». Oxmo représente la rue depuis toujours : il vient du 19ème arrondissement, il n’a rien à se reprocher, la musique est devenue son métier, il a cette chance là, pourquoi il la refuserait ?

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