Chinese Man : avant le troisième épisode
Interview

Chinese Man : avant le troisième épisode

Trio installé dans le sud de la France, Chinese Man envoie depuis des années des rafales de gros beats cadencés. Riche de ses influences éparses, Sly, Zé Matéo et High Ku cultivent un certain mystère épaissi dans une imagerie asiatique franchement chiadée. La sortie du EP Miss Chang – prélude à l’album Racing with the sun annoncé pour la mi-avril – était une raison supplémentaire d’en savoir d’avantage. Séance de rattrapage où il est question de la libération de DJ Shadow, de collaborations festives, de pastis et de negro spiritual.


Abcdr : Quels rapports vous entretenez avec la scène marseillaise ? Je pense notamment aux parrains IAM.

Chinese Man : On a eu l’occasion de croiser IAM il y a deux ans au festival de Bourges. On a filé un disque à Akhenaton qui a déclaré « Franchemenghh c’est adorable » avec son doux accent qui sent les cigales. À part cet instant qui restera gravé dans notre cœur étant donné que certains d’entre nous ont été des gros fans, on a peu l’occasion de croiser la scène rap marseillaise vu que depuis quelque temps on a pas mal bougé et que le label a toujours eu la volonté de ne pas se cantonner à la scène régionale. Il faut aussi savoir qu’à la base le label était basé sur Aix-en-Provence même si on a rapidement migré vers Marseille où on a installé nos locaux. En tout cas on espère qu’on tapera la pétanque autour d’un pastis avec quelques amis phocéens lors de la tournée à venir !

A : « I’ve got that tune » repris par Mercedes pour une campagne promo’, ça représente quoi comme pour vous ? Une anecdote ? Un aboutissement ?

C : Ça a été un tournant important dans l’histoire du label car ça nous a offert une visibilité inaccessible pour un label indépendant sans grandes ressources. Ensuite, ça nous a permis d’avoir les fonds nécessaires pour produire la première compilation du label les Groove Sessions vol.1. Au final ça nous a permis de développer le projet sans faire appel à une maison de disque ou à un tourneur et si aujourd’hui le label gère la plupart de ses activités de manière indépendante, c’est sans doute en partie dû à cette campagne promo. Maintenant, le plus important était de savoir comment profiter de cette opportunité pour développer au mieux notre projet en gardant le contrôle de nos productions et quelques années après, avec du recul, on se rend compte qu’on s’en est plutôt bien sorti.

A : En juillet dernier, vous faisiez la première partie de DJ Shadow ? Quels souvenirs gardez-vous de cet évènement ?

C : Il y avait des champs, il faisait beau et DJ Shadow était là nu dans les prés… Un souvenir ému quoi… [Rires] Plus sérieusement, dans le genre c’était un peu un aboutissement de jouer avec un mec qui a été ton idole pendant des années, après ça été un peu frustrant parce qu’on a pu juste le croiser. Il est assez dur à approcher en grande partie à cause de son staff qui pour le coup se la joue vraiment garde du corps dans un délire parano. En fait on a eu un peu de peine pour lui, il était tout seul mais bon ça reste peut être le plus grand fouineur de samples que le Hip-Hop ait connu… ou pas… Allez Joshy la prochaine fois qu’on se croise tu passes taper le carton dans nos loges ! [Rires] Free DJ Shadow !!!

« On a eu l’approche d’un groupe qui veut faire un vrai premier album tel qu’on le concevait au temps du 33 tours, avec une histoire, un son, un début, une fin. »

A : Vous sortez un nouvel album en avril prochain, Racing with the sun. Quelle a été votre approche pour cet album ?

C : On a eu l’approche d’un groupe qui veut faire un vrai premier album tel qu’on le concevait au temps du 33 tours, avec une histoire, un son, un début, une fin… C’était la première fois qu’on pouvait concevoir un long format car avant on faisait des maxis qu’on compilait.

Pour Racing with the Sun l’idée était de développer un projet qui intégrerait dès sa conception une partie vidéo et une partie graphique. On a donc fait des bases de morceaux qu’on a ensuite donnés à notre formidable équipe – Big up Ouikid and Los Muflonitos ! – et chacun a pu construire une partie de l’univers final de cet album.

Concernant le son, on avait vraiment envie de passer un cap au niveau du mixage, on a eu la chance de bosser avec Sodi qui est le producteur de Femi Kuti et qui a travaillé avec Fela par le passé – il a aussi bossé sur l’album d’IAM De la planète Mars… C’est étrange la vie des fois… Au niveau des compos l’idée était de garder une base samplée. Le travail de clearance a été long mais on a eu de la chance car les artistes samplés ont adhéré au projet ce qui nous a vraiment touché parce qu’au final, l’avis qui compte le plus pour nous reste celui des artistes qu’on sample. Et là pour le coup on vraiment eu de belles surprises… Par exemple, le morceau « Racing with the Sun » est construit à partir d’un negro spiritual d’Ella Jenkins qui est maintenant une dame d’un certain âge : le fait qu’elle accepte qu’on reprenne ses paroles pour en faire une version dub super nerveuse et qu’elle nous envoie un mail pour nous dire qu’elle aimait le morceau, c’était la plus belle des récompenses.

A : On retrouve quelques collaborations surprenantes sur cet album. Je pense notamment à General Elektriks. Comment ces opportunités se sont présentées ?

C : Tous les gens qui sont intervenus sur cet album sont des personnes qu’on a rencontrées au fil de nos voyages et de nos tournées. Le côté humain est pour nous indispensable et notre style de musique nécessite une réelle complicité avec les artistes que l’on fait intervenir. On avait croisé General Elektriks à Bourges où on a eu l’occasion de pas mal discuter et comme on est des gros fans de ses claviers vintage, on s’est rapidement décidé à l’inviter sur l’album. Pareil pour Scratch Bandits Crew avec qui on a commencé à faire la fête avant de parler boulot. Pour les MCs, on a fait appel à nos habitués, qu’ils viennent d’Indonésie ou de Oakland l’important c’est des gens qu’on avait rencontrés depuis pas mal de temps…

Les autres collaborations, notamment les musiciens qu’on a enregistrés pour enrichir les morceaux, ça s’est fait de la même façon. En plus on a eu la chance d’aller en Indonésie chez nos amis de Dubyouth pour rester une semaine dans leur studio et profiter pour échanger et enregistrer avec les musiciens qu’on rencontrait sur place. Plutôt que de se payer un studio super classe où on n’aurait pas eu le temps de faire ça tranquillement, on a préféré les galères d’un studio à la roots où on a pu prendre notre temps.

A : Les illustrations de vos disques sont toujours super chiadées. Comment vous procédez à ce niveau ?

C : Comme avec l’ensemble des personnes avec qui on travaille, on laisse toujours une entière liberté, après comme on le disait auparavant l’idée c’est de construire ensemble, de partager pour créer. Pour Racing with the Sun on a fait à nouveau appel à Julien Lois – A.K.A Ouikid – et on a réfléchi ensemble pour créer un vrai univers graphique que l’on puisse décliner à la fois sur le CD mais aussi sur les maxis vinyles, les affiches et bien sûr des cadeaux pour les gens qui aiment le label… On a pensé à pas mal de conneries pour la tournée à venir, la première fois on avait filé des lunettes 3D et là vu qu’il n’y a pas de 3D dans le show on a trouvé un truc qui devrait séduire les grands et les petits… [Rires]

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