Chronique

Pilooski
System Piloo

Indestructible - 2002

Rares sont les sorties éditées au format 45 tours, principalement lorsqu’il s’agit de nouveautés hip hop. Les quelques exceptions à s’y être aventurés sont tous des artistes jouissant d’un statut atypique dans leur démarche artistique : Mr Flash, Kabal avec ‘Le dormeur du val’ (extrait d’États d’âmes) avec Underground society. Bref, davantage des pièces de collections que de sorties à part entière. Il semble cependant que cela soit un peu différent pour ce System Piloo. En effet si Mr Flash ou Kabal pouvait se permettre de se faire plaisir, à eux-mêmes et à leur public, le but de ce projet/concept toulousain est en cela différente que leurs auteurs sont quasi inconnus. Cependant, une fois le contenu de ce sept pouces écouté, tout cela semble d’une logique quasi implacable…

Cédric, en plus d’être le concepteur sonore qui se cache derrière le concept Pilooski, appartient à un collectif multimédia basé à Toulouse. Il a également crée IND.REC en 2000 (qui deviendra Indestructible), le label sur lequel est édité System piloo. Initialement son attention était concentrée sur des reéditions format de titres issus de la black music (funk, jazz, soul) assez méconnus. S’en est suivi une compilation de soul/funk avec Keb Darge, puis une autre de morceaux soul/jazz/funk (« Canadian Racer »). Voilà pour l’historique, qui dépeint assez bien un univers musical très varié. En ce qui concerne plus exactement le projet Pilooski, Cédric l’avait inauguré en produisant quelques sons malheureusement non diffusés faute de distributeur. Ce 45 tours est donc l’occasion de mettre à jour quatre de ces productions avec, selon ses propres termes, l’ambition de proposer un ‘hip hop ludique, sans prétention, et au format approprié’.

Et le résultat est pour le moins étonnant. Le seul titre rappé, ‘Beatshopper’, en featuring avec le rappeur Trinidad (et DJ Uneasy pour les scratches), est un véritable hymne au crate-digging. « Les disquaires se négligent, et c’que j’exige ils l’ont pas, ils vendent que des rééditions, et moi c’prix là j’paie pas, j’ai de la poussière sous les ongles des conventions aux marchés, en tête des listes longues, comme les années qu’on passe à chercher un break de cinq secondes ». Et pour allier la forme avec le fond, quoi de plus logique alors que de presser un 45 tours en édition limité (460 exemplaires dont la majorité à destination du Japon et des Etats-Unis). Ainsi seul le public visé par le morceau sera touché. Côté sons, les quatre productions possèdent des rythmes assez lents, entre interludes jazzy avec quelques sons disséminés (‘Soup Broze #1’) et boucles aux grains sales et au rythme destructuré (‘Bretzel People’ avec DJ Fabe), trouvant ainsi un son très particulier. ‘Bretzel Party skit’ vient clore en quelques mesures ce joyeux patchwork sonore avec des petits sons aux influences électro.

Pilooski est donc une excellente surprise, survenue sans qu’on l’espère vraiment, une petite bouffée d’air frais d’une dizaine de minutes qui nous fait oublier un instant l’asepsie et le formatage dans lequel se complaisent la majorité des productions actuelles. Concernant l’avenir, plusieurs sorties sont dores et déjà prévues, dont la suite « (A peu près Pilooski) » sur le label Diamond Traxx, ainsi que d’autres exploitants les diverses envies de Pilooski : instrumentaux, lives, remixs, électro, mixtape de breaks… bref de l’envie, de l’expérimentation, de la passion non calculée : tout ce qui manque en somme dans un hip hop se montrant de plus en plus intéressé… « J‘te parle ni d’or ni de platine, mais de pressage d’origine « …

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