Chronique

Redman
Red Gone Wild: Thee album

Def Jam Recordings - 2007

Illustration concrète et moderne du rêve américain, l’ascension de Shawn Carter jusqu’au siège de président de Def Jam est peut-être une belle histoire. Mais elle ne fait pas que des heureux. A commencer par quelques-unes des figures historiques du label (Method Man, LL Cool J, Redman), pas toujours franchement comblées par le soutien très relatif apporté par leur nouveau président. Ou comment d’anciens piliers se retrouvent étiquetés anciens combattants. Pas moins de six années passées depuis son dernier album officiel (le faiblard Malpractice) et après plusieurs faux-départs, voici, enfin, le sixième album de Reggie Noble.

Difficile de porter un regard neutre sur ce Red Gone Wild quand on a saigné la discographie du Funk Doctor dans les grandes largeurs. Des supra-classiques Dare iz a darkside, Muddy Waters voire le séminal Whut? Thee album en passant par les décharges furieuses du Def Squad (El Niño) ou Blackout! avec Method Man, Redman a martyrisé les cervicales des B-Boys depuis une quinzaine d’années. Personnage charismatique et attachant par excellence, Reggie entend prouver aujourd’hui qu’il a encore quelques balles dans le barillet. En tout cas suffisamment pour épater encore un peu la galerie.

Les années se sont écoulées mais rien ne semble avoir changé dans l’univers de Redman. Toujours Brick City, toujours Soopaman Luva, les ondes de WKYA (We Kickin’ Yo Ass Radio Station) et ses auditeurs déchaînés, des tonnes d’herbes et des capotes par paquets de douze. Le tout avec cet humour gras et potache qui le caractérise. Ajoutez à ça la présence d’Erick Sermon prompte à ressusciter quelques souvenirs bien enfouis, notamment les années dorées du Hit Squad, plus quelques gros titres bien ficelés et vous tenez tout l’intérêt de cet album.

Alors, forcément, Red Gone Wild n’atteint pas des sommets d’originalité. Et il ne faudra pas compter sur ‘Blow trees’, énième resucée fumeuse des Blunt Brothers, ou ‘Merry Jane’ à peu près aussi foireux que ce jeu de mot improbable, pour relever le niveau. Mais au-delà des thèmes maintes fois éculés, Reggie parvient à ressusciter par instants cet égotrip fracassant, ces punchlines au premier degré inspirées par Shaq O’Neal plutôt que par Rosa Parks. Du single supra-efficace ‘Put it down’ pondu par l’inévitable Timbaland au chantonnant ‘Wuthoo Gonna Do’ en passant par l’étiqueté Def Squad ‘Walk in Gutta’ Red Gone Wild décolle ponctuellement. Il y a bien ces séries d’interludes toujours aussi décalées et quelques morceaux bien foutus mais pas de quoi déclencher l’hystérie. Et ce ne sont pas les sixièmes couteaux de la meute Gilla House qui amélioreront cet état de fait.

Promis à un CDD franchement précaire sur nos platines, Red Gone Wild comporte son lot de bons moments, mais tout élan nostalgique mis à part, il rappelle surtout combien il est toujours préférable de s’arrêter au sommet.

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