Chronique

Reks
R.E.K.S. (Rhythmatic Eternal King Supreme)

Showoff Records - 2011

Début 2010, on vous parlait de In Between the Lines, mixtape de Reks censée annoncer la sortie imminente d’un album au titre pompeux, R.E.K.S. (Rhythmatic Eternal King Supreme). Finalement, c’est en mars 2011 que l’opus a fini par arriver. Le Bostonien a même eu l’occasion, entre temps, de sortir un second volume de In Between the Lines. Alors, cette longue attente s’est-elle avérée bénéfique ? L’enjeu est en tout cas simple pour Reks : sortir un troisième album solide en quatre ans après Grey Hairs (2008) et More Grey Hairs (2009), et s’imposer un peu plus comme une valeur sûre du rap de la côte est.

A la vue du tracklisting, on constate d’emblée que le MC s’est donné les moyens de ses ambitions. Pour les beats, aux côtés de Statik Selektah, on trouve notamment DJ Premier, Pete Rock, Hi-Tek ou Alchemist. Un casting glorieux s’il en est. Au micro ce n’est pas mal non plus, avec comme invités Styles P, Lil’ Fame et Termanology. Voilà pour le contexte. Et on rentre très vite dans le vif du sujet, avec « 25th Hour », premier morceau de l’album, produit par Primo. La prod est sèche et solennelle, et Reks apparaît décidé et agressif, histoire de bien nous faire comprendre qu’il n’est pas revenu pour rire. Le titre suivant, « Thin Line » enfonce un peu plus le clou, avec un instru menaçant du Soul Brother #1. Un bon one-two punch Chris Martin/Peter Phillips, même en 2011, ça s’avère diablement efficace. Et R.E.K.S. commence fort, très fort. Peut-être trop. Dur d’enchaîner après ça sans baisse de régime.

Et du coup, ce qui suit parait un peu fade. « Limelight », « Kill’em » et « This or That » manquent quelque peu d’impact pour prolonger ces débuts tonitruants. « Why Cry » met fin à ce petit passage à vide, grâce notamment à la prod vertigineuse d’Alchemist et à la prestation du toujours convaincant Styles P. Malheureusement, c’est une nouvelle légère baisse de niveau qui arrive après, avec des titres toujours convenables, mais auxquels il manque une certaine dimension pour constituer réellement un apport à l’ensemble (« Face Off », « The Wonder Years », « This Is Me »).

Le dernier tiers de l’album est en revanche d’un autre acabit. Le ton se fait plus personnel, l’ambiance plus laid-back et intimiste. Et cela convient visiblement mieux à Reks. Il trouve ici le cadre idéal pour s’illustrer dans son registre, le rap avec les tripes (« The Underdog », « Mascara (The Ugly Truth) »). Le dernier morceau et le bonus track (« Like a Star » et « Self Titled ») offrent une conclusion remarquable, optimiste et lumineuse à l’opus. Et confirment si nécessaire que Statik Selektah peut s’avérer un redoutable beatmaker par moment.

Inévitablement, il y a toujours des temps plus forts que d’autres dans un projet. L’essentiel est de savoir où les placer afin de les mettre en valeur, ainsi que de ne pas regrouper les instants les plus faibles, pour ne pas que l’auditeur ne décroche. De ce point de vue-là, la structure de R.E.K.S. semble ne pas avoir été assez réfléchie. Un départ en boulet de canon, une fin étincelante, et pas grand chose à proposer entre les deux. Alors, certes, en cette époque de dématérialisation de l’industrie du disque, l’album offre d’excellents morceaux, à récupérer pour se faire une version plus concise et homogène de l’opus. C’est peut-être le plus important à l’heure actuelle, et ce qui permettra à Reks de conserver intacte sa réputation de taulier de la scène de Beantown. Mais même si ces titres auront une durée de vie certaine, on ne peut s’empêcher d’être un peu déçu quant à la qualité globale de R.E.K.S.

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