Chronique

Lewis Parker
Masquerades & Silhouettes

Melankolic - 1998

Les articles pleuvant sur le renouveau du rap anglais au niveau artistique, je ne pouvais être en reste. Il fallait rapidement pondre quelque chose sur le sujet ! Non, plus sérieusement c’est d’abord la qualité de ce disque qui m’a amené à écrire sur cet opus.

Pourtant, à quoi bon chroniquer un 19 Décembre 2000 à 12h38 un album datant de Juillet 1998. Eh bien sachez qu’un magazine (RADIKAL Le Magazine DU Mouvement Hip-Hop) dans un article consacré au hip hop anglais intitulé Le hip-hop en Angleterre : God save the beat a pour en-tête, je cite :  »Avec des artistes comme Roots Manuva, Mark B & Blade, Black Twang, Ty, Unsung Heroes ou encore the Nextmen, le rap anglais vient de trouver un second souffle. Longtemps victime d »un complexe d »infériorité par rapport au grand frère US, le style d’Outre-Manche relève enfin la tête. »

Interpellé par l’oubli de Lewis Parker, je parcours l’article en 5/5 et constate avec effroi qu’on ne mentionne jamais cet artiste essentiel de la scène britannique. Mieux encore, le journaliste écrit : « C’est justement chez Ninja Tune, ou plus précisément sur son sous-label Big Dada que va sortir en 99 un album annoncé comme salvateur pour le Hip-Hop anglais tout entier : le classique « Brand New Second Hand », signé Roots Manuva… » Bon là, c’est trop gros ! Je sais bien que le label Ninja Tune est à la mode en ce moment, qu’il est bon ton d’en parler, mais sans rien enlever à la qualité de l’album de Roots Manuva il me semble que l’on vole le du de l’artiste le plus underrated, du moment Lewis Parker.

Son opus, pas assez médiatisé est composé d’une ambiance organique, froide, de poésie abstraite, de la voix douce et du flow délié de ce MC tout à fait original. Un an avant Roots Manuva, Lewis Parker représentait la somme parfaite de tous les éléments qui nourrissent aujourd’hui l’identité du rap britannique.

Malheureusement, lui n’est pas signé sur un label qui fait vendre et dont tout le monde parle en ce moment. Il en est cependant ainsi dans les magazines spécialisés qui se prétendent représentants DU mouvement Hip-Hop. Encore le culte de la pensée unique ; les mêmes qui nous parlent d’une culture Hip-Hop variée essaient de nous vendre un produit formaté. Ne se contentant plus des artistes reconnus et vendeurs du rap, ils gangrènent et contrôlent de plus en plus son côté obscur, le label Underground est devenu aussi porteur que le Label Bio l’est en matière d’alimentation. Pas besoin d’expliquer je pense que vous voyez où je veux en venir. Au fait un dernier point concernant les labels bio : la moitié sont des arnaques…

Je vais peut-être quand même parler du disque maintenant ? Certains vont se dire enfin (soupir), y commençait sérieusement à me casser les couilles celui la avec ces histoires… Le disque donc : un 8 titres seulement sorti sur le label dirigé par Massive Attack. Cet album devait initialement être que l’introduction d’un album plus volumineux intitulé Final Series. Disque qui aurait du sortir dans le courant 1999…

Malheureusement rien à l’horizon ! Les morceaux quels qu’ils soient sont truffés de métaphores sur le monde du Hip-Hop, sur les états d’âmes des êtres humains donc des artistes de ce milieu : comme le « So many roads to hell, so many deserts to cross » de ‘101 Pianos (I’ve put out the lights)’. Lewis Parker se sert sans arrêt de l’imaginaire pourdécrire la réalité. Il s’imagine alors mené une croisade contre les gens trop terre à terre (‘Crusades’) que l’on pourrait assimiler sans trop d’extrapolations aux rappers et producteurs matérialistes qui gangrènent le marché. On me hurle Puff Daddy à gauche, Master P à droite qui dit mieux ?

Ce MC/Producteur n’hésite pas à s’investir dans ses morceaux et ses productions, son phrasé semblent refléter sa personnalité. Pour cet album, Lewis Parker s’est entouré de Supa-T que l’on entend sur ‘A Thousand Fragments’ et de DJ Bias avec lequel il avait déjà travaillé sur son premier EP B-Boys Antics et Rise en 1996. L’apport de ce DJ n’est pas négligeable puisque sur Masquerades & Sillhouettes, tous les morceaux sont ponctués de scratchtes et parfois de dialogues samplés, par exemple les voix féminines de ‘Eyes Of Dreams’ « I watch a cloud sailing over us, soon the rain and I shall compose some verses on the inconstancy of hapiness… » et de ‘101 Pianos’ « Like the moon in the blue heavens, I am alone in my room, I’ve put out the lights and I am weeping« . Aussi envoûtantes que la voix féminine samplée par The 4th Disciple sur ‘Blood for Blood’ ou encore le sample de Suzanne Vega par Jel sur le Deep Puddle Dynamics.

Conclusion, un album riche, calme, créatif, et surtout poétique que l’on ne peut oublier sans préméditation. Un classique malgré sa brièveté (36min05 seulement) que l’on réécoute sans peine un peu comme le Ilmatic de Nas. En somme j’attends avec une impatience non dissimulée son prochain chef d’œuvre. Quand tu veux bonhomme et comme on dit dans notre bonne campagne : Tape dedans !

Fermer les commentaires

Pas de commentaire

Laisser un commentaire

* Champs obligatoire

*