Chronique

Lewis Parker
The Big Game

King Underground Records - 2011

Fouiller dans les recoins de l’Abcdr du Son permet de dénicher pas mal de trucs bien sympathiques. Par exemple ce Masquerades & Silhouettes sorti en 1998, premier album d’un rappeur anglais qu’on jugeait déjà injustement méconnu à l’époque, et qui ne semble pas avoir spécialement percé depuis. Lewis Parker a pourtant continué son bonhomme de chemin musical. En 2010, huit ans après le remarqué It’s All Happening Now, il faisait même coup double avec d’une part le EP The Unseen Trap et, de l’autre, un album commun avec John Robinson, International Summers.

Installé depuis une bonne décennie aux États-Unis, il s’est lancé ces dernières années dans une série intitulée The Puzzle, dont The Big Game – d’abord sorti en vinyle en 2011, et qui vient de ressortir en CD dans une série limitée (collector en vue !) – est le premier épisode. Un épisode entièrement produit par ses soins, mais qui convie plusieurs collègues au micro, dont Steele de la Boot Camp Clik et le Floridien Dynas, nettement moins connu mais tout aussi prenant, sur « Man Up ! ». Des comparses bien choisis pour épauler un protagoniste qui s’est ici taillé une bande-son à sa mesure.

Comme l’annonce la pochette, très réussie dans son genre, de même que l’introduction dans laquelle on reconnaît la voix de Rod Serling, le maître de cérémonie de la série du début des années 1960 The Twilight Zone, The Puzzle: The Big Game joue à fond la carte cinématographique. Elle s’exprime dans des extraits vocaux tirés de films, parfois scratchés, mais aussi dans divers bruitages (voiture qui dérape ou avion qui décolle sur « International Takeover », tintement d’horloge sur « Man Up ! », etc.). Lewis Parker propose un thriller autour du thème du jeu en général (pas moins de quatre titres sur douze, dont un interlude, contiennent le mot « game »), le jeu de mot du « puzzle » renvoyant aussi à l’énigme, au mystère.

On retrouve ici ce qui faisait déjà la saveur du premier coup d’essai de celui qui aime à se dénommer, sans excès de modestie, « The Man with the Golden Sound » : un travail de sampling aussi soigné qu’inspiré (le clavier de « Snakes & Ladders », la flûte de « L Plays it Cool » ou celle de « Dirty Money »…) et, plus généralement, un savoir-faire qui s’empare d’une recette éprouvée en y mettant une touche personnelle. Basses lourdes de suspense, cuivres pleins d’intensité dramatique, drums imposants : l’ambiance de film noir tient en haleine pendant trois-quarts d’heure, que ce soit dans un registre discrètement inquiétant (« The Big Game ») ou sur un tempo plus énergique (« Heavy Action »). Les refrains sont bien négociés et le rappeur/producteur ne s’interdit pas quelques variations bienvenues, comme sur la dernière partie de l’ultime morceau, « A Deadly Game », qui clôt la projection en beauté.

La bonne nouvelle, c’est que The Puzzle a déjà connu une suite en 2013, intitulée The Glass Ceiling, et que, bien que copieusement garni, ce deuxième épisode est au moins aussi bon que son prédécesseur. On attend donc la suite, tout en gardant un œil sur une sortie imminente à l’inspiration proche : un album commun avec Eastkoast intitulé MK Ultra (Operation Hypnosis), en référence à un programme secret de la CIA…

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