Demain c’est ouin
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Demain c’est ouin

Grand-parental advisory : toute ressemblance avec une oeuvre existante ou ayant existé est purement volontaire. Clin d’oeil appuyé à ‘Demain c’est loin’, d’IAM, ‘Vieillir’, de Jacques Brel, ainsi qu’à ‘La centenaire’, de Linda Lemay.

« L’antre refoule, l’essence se répand, lâche les boudoirs

Et gobe l’émission, sale limace dans ta baignoire
Joue pas avec mes poches vides et ce que je bois
Mes pecs moulés parlaient de l’espoir. Ils pendent à la Derrick.

Démaquillée, pour une page de pub, j’me déchire
Jobard nicotinien, étouffe bien, j’me rase donc j’arrive
Rive, sous vide, serre-tête long, pendule
Je pense à Mémé qui m’a dit « à plus », jamais je ne l’ai revue

Pencher le diable pour sortir de la glacière, t’as qu’à le faire
Mais c’est toujours la mémère qui pousse derrière
Pousse, poussin, au milieu d’un chant de bretons
Menhirs dans un parking, et voir les videurs faire rentrer les ronds

Le pauvre thé, ça fait gamberger ; au Rwanda, trois mouvements :
On coupe, on compresse, on découpe, on emballe, on pend
A court de bras, on fait rentrer l’argent du trac
Ouais, c’est sale, la vie ! Et parle pas de rami, ici

Ici, le rêve des jeunes c’est le Golfe, je t’ai dit, surveille ta quinine
Ton téléphone à l’air morne, Mamie
Bouge ta face. J’essuie comme tout le monde, je déchire rien
Mes vieux, merci, j’ai Gandhi, c’est plus malin ; lui, il se lave à la fin

La fin, la faim, la faim crucifie les moyens quadra-zincous malsains
Honteux jusqu’à demain, après on verra rien
On marche sans l’ombre d’un câlin du soir au matin
Papy dans un coin, toutou à la main, brandit le parchemin

Chemin, chemin, y’en a pas deux pour être un vieux
Frippé comme une enclume, ne pas fermer les yeux, la vie j’en veux
Une croûte pour y entrer debout, sans sortir, aux trois-quarts cuit
Réussir, s’évanouir, devenir un souvenir

Souvenirs : avoir été si jeune, en avoir plein le répertoire
Des gars rayés de la carte qu’on efface comme un tableau
– tchpaou ! – c’est le soir.
Croire ? En qui ? En quoi ? Les mecs sont tous des mouroirs

Vont dans le même sang, veulent s’en mettre plein l’étiroir
Tiroirs, on y passe notre vie, on y finit avant de connaître l’envers
Sous terre on s’instruit sans parler, ravi
Frictions, télévision trop forte, serre le chignon
La télé-réalité tape trop dur, besoin d’évasion

Évasion, infusions, effort d’imagination, ici tout est gris :
Les mûrs, les esprits, la table de nuit
On veut s’échapper de la pension, une aiguille passe,
On pense à l’action, faut se divertir, un jour tu pètes les plombs

Les plombs ? Certains chanceux en ont dans la semelle,
D’autres se les envoient pour une poignée de cachetons,
D’air Citronnelles, les larmes coulent comme un mauvais rêve
L’image du gant sur le sarcophage sonne latente, les SMS s’égrènent

Graines, graines, graines de déclinants, qu’espériez-vous?
Tout jeunes on leur apprend
Que rien ne défait un homme à part les flans
Du franc rieur discret au groupe de névrosés,
Les racines de vains chants, trop lents, impossibles à arrêter

Arrêté, pisser au plumard, changé avant de sortir
On part trois mois, le débris court, la décrépitation grandit
Les barreaux du lit font plus peur, c’est la routine, vu les répits
Frêle esquif à l’entrée du tchin-tchin, figurine qui parfois s’anime

S’anime, animé d’une furieuse envie de donner
Se voir incomplet, qu’importe le temps kiffé, on perd les dents,
On va flamber. Père et gamin, rentrer avec quelques papiers
En plus ça aidera, personne demandera qui est-ce qui est tombé

Tomber ou pas, pour tout, pour rien, on prend le risque,
Pas grave cousin, de toute façon dans les deux cas on n’en sort rien
Vivre comme un chien ou une pince, y’a pas photo
On fait un choix, fait griller le mégot, crier les boyaux

Boyaux, une trêve, plein les bottes, mais la cible est trop loin,
La flèche ricoche, le diable rajoute une encoche.
Encore trop mioches, les mecs cochent leur propre case
Découchent pour des vaches, j’entends les cloches,
Les coups de pioche, creuser un trou c’est trop fastoche

Fastoche, facile, le bourgeon du bourgeois doux deale.
Se dire ‘Mémé’ ? La hantise. Porcelet dans le caddie
Tchac ! Le rasoir sur soi chaque matin, par ici le Ripolin
Ca c’est toute la journée, lendemain après lendemain

Lent des mains ? C’est pas le problème. On vit au jour le jour
On a le temps ou on le perd lentement, les autres le prennent
Demain c’est ouin, on n’est pas pressés, au fur et à mesure
On avance en essuyant nos fesses pour parler aux futurs

Futurs, les futurs changeront pas grand-chose
Les générations prochaines seront pires que nous,
Leur vie sera plus morose
Notre avenir, c’est la minute d’après.
Le but ? Anticiper, prévenir avant de se faire clouer

Clouer, cloué sur un banc, rien d’autre à faire,
On boit à notre mise en bière,
On relit les gazettes, y’a quoi d’autre à faire ?
Les murs nous tiennent comme du papier tue-mouches
On est là, jamais on s’en sortira, le temps nous tient avec sa fourche

Fourche ou fourchette, se moucher la chique, seconde après seconde
Sacs d’occasion et une pièce de plus ajoutée à nos fonds
Contre leurs lasers, certains désespèrent, beaucoup touchent terre
Les obstinés refusent le combat, suicidaires

Cidaire, sidérés, les vieux regardent l’humain se diriger
Vers le mauvais côté de l’éternité, d’un pas ferme et décidé
Préférant broder, en bas, en haut, on va s’emmerder
Y’a qu’ici que les langes sentent la fumée

Fumée, encore une bouffie, la voilà tombée
La tête sur l’oreiller, la merde à l’instant est tombée
Par là, faut naître, un tri se fait à l’entrée, un môme se fait baquer
Un enfant, ça fait sérieux pour un gars qui est menotté

Menottés, pieds et poings liés par la fatalité
Pris au pied du donjon, le veston est le geôlier
Le bluff ? La règle. On a grandi avec des vieux
Grabataires courageux, mais la vie est courage, on chute comme on peut. »

« Entre instruction et idées
Incompréhension, bande de bosses soi-disant mal enlevées
Fictions, respiration, trois louches d’Hextril
Couilles inutiles, légendes et mythes débiles

Assis au resto, côtelettes panées au kilo
Réserves de crédibilité, en garde, les mythos !
Ça file des billets de 20, pack de Hennessy dans les mains
Oublier qu’on tirait sur un gros joint

Pincettes à fric, ci-mer au plastique
Plein d’alcool, oracle à la messe, Lunatic
Ergonomie pas pareille, guibolles dures comme un roc
Petit homme qui croit qu’on brave l’heure, choc

On cherche la Veuve Cliquot, cachée derrière les dicos
Horizon médicamenté, pique-aux-fesses, faut-ce-qui-faut
Personnes honnêtes ignorées, super-pitres, zéros
Politiciens et journalistes en visite au zoo

Musculeux respectés, près de familles humbles
Bave qui blaste la mosaïque de la chambre
Entre les dévastés, les carcasses de types déclaftés
Où est le gosse ? Qu’il vienne me gratter

Pull-overs oranges qui s’allument, les minots qui fument
Parti des foules, improviser par amertume
M.O.F., les Trois Suisses, cheveux qui crissent
Silence brisé par le portable de la nourrice

Polos de chez Damart, survêtements mi-sable
Crème ou lait dès lors qu’arrive le soir
Nichons bidons, histoires de grison
Cupides divisions, amas de chignons

Clichés d’Orient, cuisine au piment
Jolis noms sur marbre pour des bâtiments dans la forêt de ciment
Désert de midi, vermeil écrasant
Lit la nuit, pendant douze mois c’est Ramadan

Pas de distractions, se créer un peu d’action
Jeux de dés, de contrée, paris d’argent, méchante attraction
Rires interrompus, attestations d’infarctus
Même attendrissement pour des corps repus

Marcher sur les couverts usagés, rêver de voyager
Postes de radios en jachère, lot de chaînes à ranger
Bougon sans retour, psychothérapeute sans pitié
Meilleur lien d’amitié qu’un type puisse trouver

Génies du Scrabble faisant leurs classes sur des coussins vagues
Nouvelles bagues, terribles techniques de drague
Individualités qui craquent parce que stressées
Personne ne bouse, personne ne sera torché

Vapeurs d’éther, d’eau écarlate, d’alcool
Fourgons de la morgue matés comme le pactole
C’est pas drôle. Le chien meurt enfermé dans la cage
Bave de rage, les barreaux grimpent au deuxième étage

Piler du hachis ? C’est sage si tu veux sentir la viande
Si tu ronfles ? Ta femme va rien entendre
Mais l’hospice est pas loin, les amis non plus
Ca commence par des blattes au cul, ça finit par des grandes battues

Regarde la vie : ce qui change ? Y’a que les saisons
Tu baves du cresson, craches du cresson, chies du cresson
Te prends pour Luc Besson, mais est-ce que ça rapporte ?
Regrette pas les fistons quand la Grave frappe à la porte

Crois-tu que leurs affiches nous traitent comme des brindilles
Sont pas mamies, OK, mais le respect ça se torpille
Cou pâle en un sens, ça parle qu’à deux pour cent
OEil pourri, bouche sans dent, c’est stressant

Très tôt, c’est déjà la famine dedans, les bandes de travers
« Astiquer baignoire » : la merde au cul, elles marchent déjà de travers
Pas facile de parler d’amour, travail à l’urine
Les vieilles gazelles se brisent l’échine dans les cuisines

Les velus ressassent épilation, ça rassure
Mais c’est toujours la même merde derrière la dernière couche de bromure
Feu les rêves gisent enterrés dans la cour
A cent-douze ans conduire, mourir, finir comme Tupac Shakur

Mater les photos, majeur tout tordu, popo
Pas mal d’amis se sont déjà mués en tas d’os
Une fois tu gagnes, mille fois tu perds, le futur c’est un loto
Pour ce, je dédie mes textes en qualité d’ex-voto

Mémé, ici t’es jugée à la réputation forte
Manque-toi et tous les jours les bougres pissent sur ta porte
C’est le tarif minimum
Et gaffe : ceux qui pètent transforment le secteur en oppidum

Gelée au framboise, ça t’excite, y’a plein de glace -cassis
Et tant pis pour le froid, t’enquilles
Les bosses veulent sortir, les gnons tombent comme des massues
Les cicatrices de ton cul pompent les pansements du S.A.M.U.

Tant d’énergie perdue pour des surgelés Findus
Les odeurs de fumier plein la merde dans la vue
En attendant, les fraises-poires foirent, clapotent sur la nappe
Les crêpes partent, et même le balai dérape

C’est le bordel aux WC, dans les couloirs on ouvre les extincteurs
Le service devient le terrain de chasse des inspecteurs
Le rot a le goût d’ail, car les os ont trop fait d’écailles
Regarde pépé, il joue aux dés dans un sombre cercueil

C’est trop. Tes potos chient sur le vieux magnéto
Un sac de popo pour les fuites et tu files au dodo
La vie est dure si on veut du rêve
Ils mettent du pneu dans le slip et te tendent ça : « Ça relève »

Tu me diras : « Ça va, c’est pas trop »
Mais pour du Tchernia, un ami doux quand on n’a rien, c’est chaud
Je sais de quoi je parle, moi le fêtard :
J’ai dû fêter mes cent ans avec trois bouteilles d’Arnica

Le vioque bout : ce soir, où est le string ?
D’entrée, les mûres sont réservées comme des femmes de pakis
Mais qui peut comprendre, la tête pleine
Qu’un type à bout tombe sec, plus de sang dans les veines ?

Et qu’on ne naît pas pour traîner et servir à rien
Je pense pas à demain parce que demain, c’est ouin. »

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