Sortie

Papifredo - Gaze mon petit

En 1997, Papifredo n’a même pas un quart de siècle mais déjà pas mal de vécu dans le hip-hop. Le grand public avait découvert son argot, sa gouaille et sa grosse énergie l’année précédente sur Guet-Apens de Weedy et du T.I.N. Les mêmes ingrédients sont réunis pour Gaze mon petit, qui sort en fin d’année chez Artikal. Fredo n’a qu’un goût modéré pour l’egotrip et le rap politique. L’accent est plutôt mis sur un rap « de proximité », qui conte le quotidien des quartiers populaires de Paris (« Les Kisdés », « Habitant de la France », « Un Garnement ») avec verve et humour. « Des Sappes plus reuch’ » est d’ailleurs un sommet du genre : le truculent Papi y baisse le ton pour mieux coller à un beat tranquille et lâcher un texte superbement écrit, entre ambition et désillusion. Gaze mon petit n’a pas forcément marqué l’histoire du rap français, mais il s’agit d’un disque très attachant, porté par la grosse personnalité de Papifredo. Qui est d’ailleurs toujours actif, vingt ans plus tard. Les effets bénéfiques de la salade, sans doute.

Stéphanie Narjiss Ménard et Vincent Stora

(Collaboratrice de Night & Day et cofondatrice d’Artikal, cofondateur d’Artikal)

« On a découvert Papifredo quand il a posé sur la compilation Police. Son morceau nous a particulièrement impressionnés, il nous a donné envie de bosser avec lui. C’est comme ça qu’on s’est lancés dans un projet d’album. C’était vraiment un coup de cœur. Six mois seulement se sont écoulés entre Police et Gaze mon petit, et Papifredo a tout enregistré durant ce laps de temps. C’est un mec ultra-productif. En studio il est génialissime, pas besoin de cinquante essais pour que la prise soit bonne. Il sait ce qu’il veut, artistiquement il n’y a rien à redire. Après, il a les qualités de ses défauts. Il est dans une espèce d’euphorie permanente, il déborde d’énergie, il est authentique. Notre rôle c’était surtout d’essayer de le canaliser. [Rires] Vingt ans après, je réécoute encore Gaze mon petit, je l’ai sur mon téléphone. Je trouve que c’est un très bel album, intemporel, il a été très bien accueilli. Je n’aurais rien voulu faire différemment dessus. Simplement, j’aurais aimé qu’on ait davantage de moyens pour le développer, pour mettre Papifredo en avant. Certains médias ont joué le jeu, mais on s’est heurtés à un mur du côté de Skyrock, par manque de moyens financiers. À côté de ça, Papifredo c’était le mec qui s’était fait connaître grâce à ses featurings et à ses apparitions sur compilations. Là il avait le premier rôle, il n’était plus en accompagnement, c’était son album. Et quand il s’est retrouvé à faire sa promotion il n’était pas forcément prêt, notamment pour parler de son projet. Aujourd’hui, Papifredo est toujours actif. Il a son label, Blandem, il continue de sortir des projets, il a des centaines de morceaux dans son ordinateur. On l’a fait venir au concert Night & Day Live, il a une sacrée patate, c’est impressionnant. À côté du rap, il est devenu coach sportif. Et il fait ça de la même manière, à fond. C’est un passionné. Presque excessif. [Rires]. » (Propos recueillis par L’Abcdr du Son, octobre 2017)

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